Non je n'ai pas changé d'avis, semble dire la Cour des comptes. Face aux difficultés des élèves, il faut améliorer la gestion des enseignants. Cette analyse est à nouveau portée par la Cour des comptes dans une étude minutieuse des dispositifs de soutien aux élèves publiée le 4 mars. La Cour des comptes renoue avec ses recommandations de 2013 en demandant l'annualisation des temps de service des enseignants. Une nouvelle gestion qui économiserait de nombreux postes... Et qui nous ramène aux projets Chatel.
Présenté par Didier Migaud, président de la Cour des comptes, Sophie Moati, présidente de la 3ème chambre et Henri Paul, rapporteur général, le 4 mars le rapport repose sur une enquête minutieuse menée dans 6 académies et 21 établissement. S'y ajoute une étude portant sur pas moins de 880 écoles et établissements.
La Cour relève d'abord les "hésitations" du ministère à propos des dispositifs d'aide. On est passé de l'aide aux élèves en difficulté à l'accompagnement de tous les élèves, note-elle. Tout cela s'est fait à travers un catalogue "hétéroclite" de mesures bien connues des enseignants (PPRE, accompagnement personnalisé, accompagnement éducatif, APC, tutorat etc.). La Cour relève que les professeurs y perdent leur latin, d'autant que ces dispositifs se succèdent rapidement. Elle montre aussi les carences. Il n'y a pas de continuité entre école, collège et lycée. Il n'y a rien pour les élèves de CAP alors que les besoins sont importants. "Le collège apparaît comme le parent pauvre des dispositifs d’individualisation développés dans les années récentes, qui ont surtout concerné le primaire et le lycée. Cette situation est d’autant plus paradoxale que le besoin d’individualisation se fait particulièrement ressentir au collège et que les toutes premières tentatives d’individualisation se sont manifestées au niveau du collège", note la cour.
La Cour pose aussi la question de l'individualisation des apprentissages. "Les dispositifs conçus spécifiquement à des fins d’individualisation, même lorsqu’ils sont intégrés au temps d’enseignement commun comme l’accompagnement personnalisé, constituent une séquence non notée, qui n’est de ce fait pas forcément prise au sérieux par les élèves, voire par certains enseignants. Il en résulte un risque d’absentéisme des élèves – ou d’engagement inégal des enseignants. Les inspections générales l’avaient souligné dans leur rapport précité d’octobre 2010 consacré à l’ensemble des dispositifs d’aide et d’accompagnement des élèves. De manière plus générale, il paraît illusoire d’attendre des bénéfices de dispositifs d’individualisation si le paradigme général de l’enseignement demeure celui de l’uniformité".
Elle soulève aussi le coût des dispositifs. Même s'il n'est aps calculé officiellement, la Cour l'évalue à environ 2 milliards.
Comme remède la Cour recommande l'"annualisation du temps de travail des enseignants du secondaire de façon à intégrer le suivi aux obligations de service. Pour la cour cela permettarit de "revoir la définition du temps de service des enseignants du second degré pour l’élargir à des plages obligatoires dédiées aux autres missions de l’enseignant et notamment aux dispositifs d’individualisation (suivi individuel des élèves, temps de concertation, évaluation des besoins des élèves, etc.) (recommandation réitérée). Cela aurait aussi l'avantage de "donner aux directeurs d’école et aux chefs d’établissement la possibilité de moduler la répartition du temps de service des enseignants et des emplois du temps des élèves en fonction des besoins des élèves, notamment en prévoyant la mise en place sur l’année scolaire de plages horaires variables de soutien et d’accompagnement (recommandation réitérée)". S'ajoute à ces recommandations la demande d'un effort de formation. La Cour relève par exemple que dans la moitié des collèges aucun enseignant n'a reçu de formation pour l'accompagnement des élèves.
En fait la Cour des comptes reprend ses recommandations de 2013. L'annualisation consiste à passer d'obligations hebdomadaires (18 heures de cours par exemple) à un nombre d'heures dues annuellement. Pour la Cour cela permettrait de reconnaitre des tâches qui ne sont pas rémunérées aujourd'hui. Par exemple pour le fonctionnement de l'équipe pédagogique. La Cour relève justement qu'il y a beaucoup d'hypocrisie dans le fait de parler d'équipe sans lui donner les moyens d'exister. Mais l'annualisation sert surtout à récupérer un nombre important d'heures perdues. Les gains les plus importants peuvent être attendus dans le technologique et le professionnel où les élèves partent en stage en entreprise. Tout ce temps serait récupéré pour l'enseignement. "L'annualisation du temps de service conduirait à dégager d'importantes économies de postes. Cela faciliterait grandement l'organisation des activités scolaires en particulier les remplacements", reconnaissait le rapport de 2013. Comment faire travailler plus pour le même salaire les enseignants peut se traduire en gains scolaires pour les élèves, cela reste à démontrer.
François Jarraud
Cour ds comptes
Le rapport de 2013