Attention, Histoire-géographie en danger !
Alors que chacun de nous, professeurs d'Histoire-Géographie, commençons à travailler avec nos élèves le nouveau programme des classes de Première en lycée général, se confirme ce que nous pressentions dès l'année dernière et cet été en préparant nos cours : nous constatons d’ores et déjà l'impossibilité de le mener à bien dans les délais impartis, et à plus forte raison de le rendre intelligible à nos élèves.
La réforme du lycée a décidé de la suppression de nos disciplines en terminale scientifique ; nous devons donc préparer ces élèves au baccalauréat dès l’année de Première : le programme en question nous oblige, avec des élèves moins mûrs et moins armés qu'en Terminale, à transmettre une lourde compilation de connaissances superficielles :
- nous demandant par exemple de traiter en 16 heures les conflits du XXème siècle dans un même « paquet » incluant la 1ère guerre mondiale ; la 2nde guerre mondiale ; la guerre froide à Berlin, à Cuba et au Vietnam ; la guerre du Golfe ; la guerre d’ex-Yougoslavie et les attentats du 11 septembre, et pour faire bonne mesure la SDN et l’ONU ; une bonne dizaine de sujets, tous importants, tous porteurs de sens, tous issus d’un contexte particulier, et qu’il faut faire comprendre au pas de charge… Qui peut croire à la faisabilité d’un tel objectif ?
- pour résoudre ce problème les concepteurs ont trouvé une « solution » : une histoire thématique, qui n’aborde que certains aspects des sujets, et propose des allers-retours chronologiques permanents : le génocide des Juifs et des Tsiganes est étudié avant l'arrivée d'Hitler au pouvoir, la résistance française bien après en toute fin de programme et d'année… Qui peut croire qu'une histoire fractionnée, et même fracturée, peut participer utilement à la construction intellectuelle des jeunes ?
Au cœur de l'école républicaine réside la mission d'aider les jeunes à devenir des citoyens éclairés et critiques. Nous avons la faiblesse de croire que notre discipline y contribue et qu'à ce titre la maltraitance dont elle est l'objet n'est pas anodine.
Nous avons plusieurs fois manifesté notre inquiétude face à ces projets, et nous sommes heurtés à la sourde oreille de notre hiérarchie.
Aussi en appelons-nous à l'esprit civique de chacun et à l'indignation de tous :
• Nous appelons parents et lycéens à dénoncer avec nous :
- la disparition des dédoublements (travail en ½ classe pour comprendre les méthodes propres à l’histoire et à la géographie) ;
- la multiplicité des questions traitées (48 au total en 1ère générale pour 120h soit 2,5 heures par question, évaluations et corrections incluses !), qui empêche radicalement de prendre plaisir à étudier nos disciplines ;
- la définition tardive et floue des épreuves du baccalauréat, qui accroit les difficultés de préparation à l'examen.
Nous appelons donc tous les citoyens à signer la pétition nationale mise en ligne par le Snes pour une refonte du programme de première : http://www.snes.edu/petitions/index.php?petition=23 et à manifester leur inquiétude.
• Nous appelons les collègues du primaire à la faculté, de toutes les disciplines à dénoncer avec nous ces atteintes, car l'Histoire-Géographie n'est qu'un exemple des attaques subies par toute une profession et contre l'enseignement public en général.
• Nous appelons les enseignants d’HG en lycée à affirmer publiquement et collectivement l'impossibilité de tenir dans les délais ce programme et notre refus de porter une responsabilité qui n'est pas la notre, en signant en plus de la pétition nationale en ligne, une pétition académique demandant une rencontre collective avec l'Inspection Régionale ; celle-ci doit, en liaison avec l’Inspection générale au niveau national, prendre ses responsabilités et engager enfin le dialogue pour trouver des solutions rapidement (refonte du programme, étalement sur les 2 années du cycle terminal pour l'ensemble des séries générales ...) : la première échéance – juin 2012 – va arriver très vite.
Collectif des enseignants pour la défense de l’histoire-géographie.