Que dit l'Inpection Générale sur les ZEP ? 

A quoi servent les ZEP ? Question redoutable…Quelques éléments essentiels tirés du rapport de l’Inspection générale sur les ZEP (nov. 2006)
Après un pilotage des années 1980 qui reposait sur la mobilisation (politique de projet, animateurs de ZEP), on est passé dans les années 1990 à un pilotage qui reposait davantage sur la prescription, et sur l’encadrement hiérarchique, principal et IEN, avec un coordonnateur censé faire le lien entre le projet et la hiérarchie. Les contrats de réussite tendent à instaurer une forme de pilotage plus souple, et plus rigoureuse à la fois. Mais ils sont restés construits sur des logiques de projet, et ont rarement fixé des objectifs et des moyens.


Or, on n’a jamais vraiment répondu à la question fondamentale :

- L’objectif de l’éducation prioritaire est-il l’équité du système éducatif français et par là, l’égalité maximale des acquis ou des réussites scolaires au moins jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire, objectif lié à la réduction des inégalités sociales (objectif clair des débuts) ?

-  Ou bien est-il devenu au cours des temps davantage un objectif de scolarisation plus que d’égalité des résultats, destiné à rendre plus supportables les inégalités, à développer lla cohésion sociale, mais aussi à garantir la paix sociale ?

– Dès lors n’a-t-on pas mis en place des politiques de « pansement » ou de compensation, surajoutées les unes aux autres au fur et à mesure des crises sociales (mouvement lycéen de 1990, crises de 1995, mouvement de novembre 2005) ou des changements politiques ?

– L’objectif actuel d’accès aux formations d’excellence est-il également un véritable objectif d’égalité des chances ou sert-il à repérer les individus les mieux armés des classes sociales défavorisées pour leur faire rejoindre des formations qui resteraient par ailleurs fermées au plus grand nombre ?


L’encadrement, le pilotage
L’IA, les corps d’inspection, les chefs d’EPLE, s’il peuvent porter les objectifs et accompagner les équipes, ne sont pas en mesure de construire la cohérence de proximité. Seules les communautés scolaires, l’ensemble des personnels avec les élèves et leurs parents, mais aussi les autorités de rattachement sont en mesure de l’édifier.
Un personnel d’encadrement ne produit jamais tout seul des résultats scolaires, en revanche il peut contribuer à ne pas les favoriser. Il faut donc travailler d’abord avec, pour et sur les personnels enseignants.

La pédagogie en éducation prioritaire : un équilibre difficile à trouver entre exigences et adaptation aux publics

À supposer qu’une telle définition soit pertinente, ce qui caractérise un élève de ZEP une fois dans la classe, est un déficit observable au niveau des compétences générales de base (maîtrise du langage, lecture, expression orale, socialisation…).
On note donc que, face à cette situation, le professeur en EP tend à recentrer ses choix et pratiques sur le système linguistique proprement dit, de façon réductrice et schématique. La langue tend à devenir objet d’étude et non pas outil de communication. Nous pouvons imaginer plusieurs justifications à ces choix qui ne sont pas toujours conscients :
– peur de perdre le contrôle de la classe à travers des activités plus ouvertes ;
– repli sécurisant sur des faits de langue identifiés au sein d’un système linguistique qui paraît fini (on « fait » le prétérit) : une confusion apparaît entre la fin (les compétences de communication langagière) et les moyens (les connaissances linguistiques).
- auto-limitation des contenus proposés en prévision du fait que tout prend un temps infini avec ce public qui nécessite une démultiplication permanente de toutes les tâches afin de parvenir à l’objectif défini.

(...) Les débutants « Des débuts rudes, à accompagner :

D’abord le déracinement : plus de deux cents jeunes professeurs de lettres, « néo-titulaires » à l’issue de leur année de stage de formation en IUFM, entrent à chaque rentrée scolaire dans les académies de Créteil et de Versailles, craintifs. Beaucoup sont en ZEP, majoritairement TZR, avec des services parfois complexes (deux collèges, compléments dans les classes des autres). Pointent à l’horizon désenchantement, désengagement, perte de foi. La charge du service complet, le choc d’un univers étranger (tout ce qui sollicite l’enseignant en dehors de SES classes et de SES élèves – des relations avec les parents aux petites lâchetés des collègues installés) pèsent lourd les premiers temps. L’aveu est unanime : « la première année, c’est très dur », « j’ai eu des difficultés », à quoi s’ajoutent l’impression de ne pas être aidé, le manque de solidarité quand on confie ses doutes en salle des professeurs : « Ces élèves-là, avec moi, ils ne bougent pas ! ». Des difficultés certes, mais aussi une conviction forte d’un choix professionnel revendiqué et d’un défi existentiel à assumer. Il faut d’abord « tenir », « survivre ». Les situations d’échec, d’erreur de casting sont l’exception.»



(...) Des projets, mais aussi les tâches instrumentales…

Écriture : Pour de nombreux élèves, des apprentissages extrêmement élémentaires ont dû être repris : graphie des lettres, lisibilité et régularité des lignes d’écriture. Ces objectifs explicites ont suscité des exercices fréquents et une attention permanente dans tous les écrits. La copie a également constitué une activité, et un objectif, de premier plan. Les élèves ont eu à copier, peu chaque fois, mais très régulièrement. Les professeurs se sont attachés à faire de ce travail une activité intelligente : associer les élèves à la formulation de brèves synthèses à copier, s’assurer que chaque élève est effectivement lecteur de ce qu’il copie, habituer à prendre au moins le mot comme unité de copie...

Au-delà d’un ensemble d’objectifs plutôt « instrumentaux », les élèves ont tous, selon des rythmes et avec une ambition diversifiés, été invités à rédiger des textes plus complexes : résumés de récits, récits brefs, lettres….
Cette activité, particulièrement difficile pour tous, nécessite certaines « médiations » : une phase orale préalable a lieu assez systématiquement pour que se conçoive un énoncé complet et se mobilise le vocabulaire nécessaire et suffisant ; on pratique souvent la « dictée à l’adulte », pour aider les élèves à objectiver la langue et à la considérer comme un matériau à travailler (…). Bien évidemment, l’évaluation a porté sur des indicateurs qui peuvent paraître restreints par rapport à ce que l’on peut viser dans une classe de 6ème ordinaire ; toutefois les progrès ont été là encore évidents, même si tous les élèves ne parviennent pas encore à rédiger un récit cohérent et complet.
(...) Inventer un pilotage national efficace

Les inspections générales proposent de continuer à restaurer un vrai pilotage national incluant les recteurs, qui porterait d’une part sur la définition des objectifs et du statut de l’éducation prioritaire, ce qui a été le cas pour la définition des réseaux ambition-réussite, et d’autre part sur les protocoles et outils pédagogiques et didactiques nécessaires. Elles ont proposé une beaucoup plus grande autonomie laissée aux responsables locaux (inspecteurs de circonscription et chefs des EPLE) dans le choix des moyens et des profils nécessaires à la mise en oeuvre de cette politique.
Il est proposé pour identifier et légitimer le pilotage national :
– à court terme : un groupe de travail ad hoc qui préparerait les différentes décisions à mettre en oeuvre, dont le secrétaire serait le délégué ministériel ;
– à moyen terme : un comité de l’éducation prioritaire, composé des directions essentiellement concernées (DGESCO, DGES, DGRH, DEPP…), de quelques recteurs (Aix, Créteil, Lille, Versailles, DOM…), de l’INRP/centre Alain Savary, de trois ou quatre élus (émanation du Conseil territorial de l’éducation nationale), des partenaires interministériels, des associations, des chercheurs, et des deux inspections générales.
Il paraîtrait souhaitable de mieux intégrer le pilotage national de la politique d'éducation prioritaire au sein d'un ensemble interministériel plus large, piloté par le ministre en charge des affaires sociales. Ainsi un lien très fort devrait être trouvé avec l'agence nationale de cohésion sociale et d'égalité des chances et avec tous les dispositifs relevant des programmes européen et national d'inclusion sociale ou de lutte contre les exclusions.



Une synthèse du rapport, par les auteurs eux-mêmes
http://www.association-ozp.net/article.php3?id_article=4128




Par ppicard3 , le samedi 01 décembre 2007.

Partenaires

Nos annonces