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Echos du forum mondial des enseignants innovants de Hong Kong
L'internationale de l'éducation

A l’heure du retour, une fois le choc thermique et le décalage horaire absorbés, que reste t’il de ce séjour dans la démesure ? Un zeste de cosmopolitisme, une impression de Babel mais surtout, une conviction plus forte encore, celle que l’éducation est une richesse portée par des énergies individuelles reliées entre elles par le fil invisible de l’innovation. Les enseignants innovants ont un petit grain de folie dans la tête et un cœur généreux. Le décor kitsch, clinquant de Hong Kong, a accueilli une véritable internationale de fous furieux dont l’air amical et le sourire radieux ne font pas oublier leur obstination à frayer leur chemin souvent hors des sentiers officiels. Ce qui compte pour eux, me semble t’-il c’est d’ouvrir les portes du savoir.

 

Avant de partir à Hong Kong, je suis d’abord passée à Nantes pour accompagner mon fils à un concert de NTM. Dans la débauche d’énergie du rap contestataire, les chanteurs Kool Chen et Joey Starr ont demandé au public d’applaudir les profs, de les soutenir lorsqu’ils descendent dans la rue parce qu’ils défendent un bien précieux, l’éducation. Je suis allée ensuite à Paris, au forum de l’éducation tout au long de la vie où des intervenants de pays différents, du monde de l’entreprise comme de celui de l’école ont défendu l’accès au savoir pour tous comme le moyen nécessaire de construire le monde du XXIe siècle. A Hong Kong, ce sont les modestes constructeurs de ce monde plus juste que j’ai rencontrés, les artisans d’une douce rébellion contre la fatalité d’un règne des égoïsmes.

J’ai été une piètre journaliste, préférant les discussions longues avec des enseignants à une enquête approfondie sur les motivations de Microsoft à se mêler si ostentatoirement d’éducation. J’ai choisi d’écouter Nicole l’israélienne, Ousmane le sénégalais, Peter le sud-africain, Pamela l’indienne, Roberto le canadien ou Nathan le néo-zélandais plutôt que d’assister aux conférences de presse. J’ai observé Alain et Benoît dans leur rôle de jury sans me donner la peine d’interviewer les organisateurs de l’évènement. J’ai accompagné Annie, Patrice, Eric et Bruno dans leur pérégrinations alors que j’aurais pu questionner la conseillère Tice de Darcos. Les uns étaient plus disponibles que les autres et puis, je revendique une certaine subjectivité. L’éducation se construit en permanence par les acteurs du terrain. Les ministres passent, les conseillers aussi, avec leurs ambitions personnelles et leur vision superficielle de ce qui fait l’école du quotidien.

Je retire de mes promenades dans les rues de Hong Kong et dans les projets de tous les continents, une énergie renouvelée parce que dans les différences de contextes, de thématiques, j’ai retrouvé une vision commune. Que chacun ait cherché une solution pédagogique à des difficultés rencontrées par leurs élèves en s’aidant de la technologie, avec les moyens du bord, en dépit des entraves du système, sans compter leur temps, moi, ça me donne des ailes.

J’ai été heureuse de côtoyer des enseignants français dont les projets et l’ouverture d’esprit ont donné envie aux autres délégations de les rencontrer. Vous avez découverts dans ce blog leur travail, pas toujours reconnus. Patrice par exemple, malgré le prix obtenu à Rennes, n’a rien pu faire pour sauver son poste. Il travaille désormais à plus de 100 kilomètres de chez lui et continue malgré tout à épauler Annie pour la réussite de son école nomade. Alors, sous forme de conclusion, j’aimerais adresser un grand merci à tous les enseignants qui simplement font avancer les choses, à ceux qui comme Eric, Bruno, Annie et Patrice mettent leur intelligence, leur humanité au service de l’éducation, de l’accès au savoir pour tous. Une dernière fois, je vous adresse de bons baisers de Hong Kong.

United colors of Tice

Le séjour s’achève, une journée passée dans les rues de Hong Kong, depuis les marchés de jade ou alimentaires jusqu’à la rue des antiquaires. Les buildings rutilants, les centres commerciaux reluisants de luxe, laissent la place à des rues moins resplendissantes mais tellement plus vivantes. Sur les étals du marché, des tortues, des serpents et des poissons frétillants dans des bacs, nous étonnent.

Photo Patrice Girard

A l’heure du repas, en guise de dessert, l’équipe française dresse un bilan du forum. Côté jury, Benoit Montessinos et Alain Chaptal sont plutôt satisfaits. Le choix des candidats primés correspond à la logique des débats auxquels ils ont contribué. Etre jury leur a permis  de voir les projets en détail. Chacun avait 7 à 8 projets pour lequel il devait donner des notes, exercice peu facile surtout dans le cadre d’un jury international où les pratiques de notation varient d’un pays à l’autre. Malgré l’organisation un peu flottante, et les craintes, le résultat reflète les coups de cœur et les échanges. « Ce ne sont pas forcément des projets qui sont favorables à la politique commerciale de Microsoft » nous dit Benoit.

« Tous les projets sont des histoires fantastiques » renchérit Alain « il fallait se poser la question de la généralisation et se méfier des aspects superficiels pour ne retenir que les projets construits avec une vraie stratégie». Benoit trouvait difficile de valoriser des initiatives à priori modestes mais qui révélaient une véritable prouesse dans des contextes peu favorables. Par exemple, un enseignant indien a mis en place un observatoire des étoiles dans un village de montagnes où l’électricité est peu accessible. Ce sont des projets à encourager, peut être faudrait il une catégorie particulière. Alain pointe la préparation du jury avant le forum comme le chaînon défaillant. Chaque candidat devait préparer une présentation très formalisée que les membres du jury consultaient avant de venir. Une plateforme collaborative était ouverte pour le jury, elle a été peu utilisée et son animation n’a pas stimulé les échanges. Certaines présentations n’étaient pas claires, donnaient l’impression que le projet était sans intérêt or, après avoir discuté avec le candidat, l’impression s’estompait car le projet tenait la route. La forme exigée avait bridé les enseignants.

Tous autour de la table, nous soulignons la qualité des projets présentés, la richesse des échanges entre les participants. L’innovation pédagogique était bien là, la nécessité d’un tel forum une évidence. Avec plus de simplicité, moins de débauche de moyens, ce serait bien d’organiser un tel forum en France, suggère Benoit Montessinos qui admet avoir passé d’excellents moments. Quasiment en chœur, nous lui parlons du Forum de Rennes organisé en mars dernier.

Photo Patrice Girard

Autour de la table, un partisan du libre, des utilisateurs exclusifs d’Apple, le responsable des partenariats éducatifs Microsoft en France, et des enseignants navigant entre le libre et le Microsoft savouraient en riant cette union sacrée pour l’innovation pédagogique. Nous partagions la même question : pourquoi les pouvoirs publics, nationaux, européens ou internationaux, n’organiseraient ils pas ce type d’événement, histoire de laisser au clou les querelles de chapelle.

Alors, de retour dans la rue, Benoit Montessinos de Sésamaths et Thierry de Vulpillières de Microsoft posèrent devant une boutique Apple pour sceller sur le numérique l’harmonie d’un bon moment partagé du côté de Hong Kong. Comme un écho à nos débats du premier jour.

Jeudi : la folle journée d'Annie

Jeudi matin, la liste des trente projets sélectionnés dans les trois catégories (communautés, contenus, collaboration) pour la finale est annoncée. Annie et Patrice sont de la partie. Eric et Bruno n’ont pas l’air déçus de ne pas être retenus. L’un a déjà connu les honneurs à Zagreb, l’autre à Rennes et la qualité des projets présentés ici rend les décisions du jury difficiles. Nathan le néo zélandais, Ousmane le sénégalais et Pamela l’indienne sont retenus pour la finale mais pas Peter le sud africain ni Mary des Seychelles.

Annie apprend qu’elle devra répondre à quelques questions devant la caméra. Le stress monte, Annie redoute l’exercice et se sent peu à l’aise en anglais. Des questions lui sont remises pour préparer l’entretien. Le stress monte encore. Bruno, au départ enseignant en anglais qui communique comme il respire, propose de l’aider. Avec Patrice, ils partent tous trois potasser les questions.

Une partie de la délégation canadienne avec Roberto en premier plan

Pendant ce temps, je rencontre Roberto Gauvin, directeur du Cahm dans le Nouveau Brunswick et mari de Danis dont nous avions fait la connaissance l’an dernier à Helsinki. Roberto fait partie de la délégation canadienne menée par Jacinthe, une personne que j’ai grand plaisir à revoir ici. Il collabore avec Mario Asselin dans l’aventure des blogs pédagogiques. Bref, avant de nous asseoir ensemble autour d’une table, nous savions déjà que nous aurions plein de choses à nous dire. Roberto présente ici une expérience avec Zune, l’équivalent Microsoft de l’i-pod. Les élèves sont filmés comme des présentateurs météo mais en guise de carte de prévisions, ce sont leurs propres présentations powerpoint qu’ils commentent, une façon de rendre encore plus vivante leur travail. Le projet ne fait pas partie des finalistes mais Roberto n’est pas déçu tant le forum lui paraît une opportunité formidable de glaner de nouvelles idées. Car, dans son école, l’équipe travaille constamment sur de nouveaux projets, dont le point central constitue le blog. Dernièrement, le Cahm a travaillé avec l’Université de Moncton sur l’élaboration de scénarios pédagogiques sur l’utilisation de la robotique en mathématiques. Les scénarios sont en ligne et enrichissent le fonds des ressources pédagogiques francophones. Avant que je ne rejoigne nos finalistes français, Roberto me parle de la réaction plutôt courroucée du monde du libre canadien sur sa venue dans un forum organisé par Microsoft. Visiblement, nous n’avons pas en France l’exclusivité des querelles de chapelle.

Après le repas, Annie entre dans la salle d’enregistrement, encadrée de Patrice, de Bruno son traducteur et de sa reporter. Elle sera seule à répondre mais finalement elle pourra le faire en français. Sous le regard encourageant de Patrice, elle surmonte sa timidité en reprenant au vol les questions traduites par Bruno. La séance terminée, nos candidats foncent vers leur stand pour répondre cette fois aux questions du jury. Bruno traduit toujours, se passionnant pour le projet, débordant les réponses d’Annie pour ajouter des éléments qui lui semblent importants. La lecture nomade intéresse beaucoup les autres enseignants du salon. Une candidate irlandaise me dit combien cette idée simple va l’aider à son retour à permettre à une de ses élèves de onze ans, qui n’avait jamais été scolarisée auparavant, à apprendre à lire.

Lors de la conférence de clôture, Ousmane défend haut et fort la francophonie en s’étonnant que l’anglais soit la seule langue pratiquée, sans traducteur pour inclure tous les enseignants dans les échanges. Son intervention, joliment troussée, lui vaut de chauds applaudissements et le collier de fleurs de Nathan.

Nous rentrons à l’hôtel pour nous préparer pour la soirée de gala où tenues élégantes seront de mise puis nous rejoignons en bus et en bateau le lieu des festivités. Un dragon nous accueille. Dans une salle de réception, les participants se font lire les lignes de la main, des calligraphes décorent des éventails et les flashs crépitent. Qui sont les plus beaux ? Les thaïlandaises sont magnifiques, les indiennes ont revêtu leurs plus beaux saris et parmi les africains, de belles couleurs se distinguent.

Le repas est somptueux, douze plats défilent sur les plateaux tournants posés sur les tables. Nous dinons avec l’équipe allemande. A côté se trouve Carry qui m’avait invitée à Taiwan, l’équipe canadienne n’est pas loin non plus. Nous sommes entourés d’ondes amicales. Mais le stress d’Annie monte encore.

Le repas se termine, le palmarès s’annonce. Trois projets sont primés pour les trois catégories avec en complément un prix du public. Visiblement, les scores sont serrés. Aucun français n’est appelé sur la scène, Annie pousse un ouf de soulagement. Nous sommes heureux car Ousmane a reçu un prix, un pas important pour son projet qu’il espère ainsi voir mieux aidé à son retour. Nous empruntons le bateau du retour, un peu grisés par le vin et le kitch, un peu tristes aussi car le forum est fini.

 

Note du 11/11

Palmarès

Catégorie collaboration

Première place Nouvelle Zélande : Nathan Kerr, Collaboration and    Digital Learning Projects within a Multi-Cultural

Deuxième place Ouganda : Ronald Ddungu, Education for  Sustainability

Troisième place Brésil/Portugal : Emilia Miranda, Marise Brandao et    Marli Fiorentin, Flight BPF

Catégorie communauté

Première place Australie  : Andrew Douch, Anywhere Anytime Biology Class

Deuxième place Afrique du Sud : Sarietje Musgrave, Spread the Sunshine

Troisième place Allemagne/Autriche : Elke Mayer, Gabriele Jauck,  Together in a World of Learning

Catégorie  contenu

Première place Inde : Parambir Singh Kathait, Let's Explore the Universe

Deuxième place Sénégal : Ousmane Diouf, Electronic Alarm

Troisième place Royaume-Uni : Dan Roberts, Recharge the Battery  

Irlande : Kate O'Connell, Flying High Exploring Aviation

Prix du public

Première place El Salvador : Mariella Paz, Business Game

Deuxième place Singapour : Fong Yin Kuan, Digital Story Telling @   Beacon

Troisième place Thaïlande : Pongpanote Phongpanngam, Instructional Games   for Kids by Kids

 

Tice : la pédagogie avant tout

Eric Sayerce Pon, enseignant d’histoire-géographie au collège est un passionné de pédagogie, plus que de technologies. Il a intégré les Tice dans ses pratiques pédagogiques jusqu’à devenir aujourd’hui formateur au rectorat de Bordeaux sur les Tni, les ent et le thème du handicap et des Tice.

Car c’est avec les questions de handicap qu’Eric a pu vérifier tout l’intérêt de passer par les Tice. Un de ses élèves gravement dyslexique a manifesté son désir de participer en classe, lui qui n’avait aucune confiance en lui, lorsque Eric a utilisé le tableau interactif en géographie. L’effet attractif de l’outil avait joué son rôle. Avec le Tni, l’élève peut venir au tableau sans avoir à écrire. On peut l’amener progressivement à le faire. Mieux encore, le fait d’enregistrer les pages, permet de revenir en arrière et de visualiser les progrès qui sont faits.

Eric a également utilisé les MP3 pour travailler avec les élèves dyslexiques. Un élève de la classe lit ses cours et les enregistre pour un élève dyslexique qui emmène l’enregistrement chez lui pour l’apprendre. Le binôme change à chaque fois, ce qui permet à l’élève dyslexique de tisser des liens avec tous les élèves de la classe, de le sortir de sa solitude de départ. Eric a constaté également un effet bénéfique chez les autres élèves, surtout moyens. « Si tu prends un élève moyen, comme il sait qu’il va aider, il va s’investir plus en classe car il doit retransmettre ».

Eric rencontre Fabienne Saint-Germain, autre enseignante innovante adhérente de l’association Projetice qui lui parle des utilisations possibles du Tablet PC avec la possibilité de rentrer des informations avec le clavier, l’écriture numérique ou la reconnaissance de l’écriture. Pour chaque devoir, Eric crée une version orale et une version écrite, l’élève dyslexique choisit la version qui lui convient. Il répond en utilisant une des trois possibilités du Tablet.

A la fin de sa première année dans le collège, un ent est proposé par le rectorat de Bordeaux. Eric s’en sert  pour mettre en ligne tous les éléments vus en cours, ce qui permet aux élèves de récupérer ou de revoir les notions vues. Les éléments sont au format texte et au format MP3 ou vidéo. Il constate que les élèves en difficulté buttent souvent à la maison sur les documents et, qu’en absence d’explication, ils abandonnent. Eric propose aux élèves de poser des questions par le biais de la messagerie de l’ent.

Tous les outils qu’Eric a intégré dans ses pratiques pédagogiques ont bénéficié au départ à un élève dyslexique. Puis, l’équipe pédagogique a décidé d’étendre l’expérience à tous les élèves en mathématiques, français, espagnol et histoire. Après un trimestre, l’équipe repère les élèves en très grosse difficulté et construit un environnement adapté aux difficultés de chacun. Les parents sont impliqués au travers d’un questionnaire, distribué également aux enseignants et proposé à l’oral à l’élève concerné et qui servira de base pour la construction d’un programme adapté. Chaque élève possède un carnet de bord et des fiches navettes hebdomadaires sont destinées aux parents.

Pour Eric, le contexte est favorable au développement des usages avec les Tice. Les outils sont moins compliqués et les développeurs paraissent avoir enfin compris les besoins pédagogiques. Le socle de compétences permet d’autres modes d’évaluations et l’accompagnement éducatif d’autres modalités d’acquisition. Enfin, l’arrivée des élèves handicapés dans les établissements obligent ceux-ci à mettre en place des solutions innovantes.

Les Tice permettent de travailler, d’évaluer autrement à condition que ce soit la pédagogie qui prime sur l’outil. « L’innovant, c’est celui qui va savoir quoi faire avec un outil, pas seulement se servir de l’outil ». Pour Eric, l’utilisation des Tice amène un changement et nécessite une analyse critique pour savoir ce que l’enseignant veut faire changer, comment il va le faire, pour quel objectif, quelle plus value. « A partir du moment où tu utilises les Tice, tu acceptes de rompre avec le cadre traditionnel de la classe, de te mettre en danger, d’individualiser les cours. » Le regard posé sur l’élève est différent : il valorise, met en confiance, motive. Ces réflexions émises après avoir adopté et mis en œuvre le Tni, le Tablet PC, le baladeur MP3 et l’ent, Eric les accompagne avec des partenariats sur la dyslexie.

Sur l’ent, un espace est réservé à l’information des parents d’enfants en difficulté, ce qui permet de communiquer hors des horaires de l’école et hors cadre de l’établissement. Des informations sont aussi disponibles sur la dyslexie, grâce aux liens tissés avec un groupe de spécialistes lyonnais.

Décidément, Eric poursuit son exploration pédagogique des Tice pour le handicap.

Le stylet magique

Bruno Boddaert présente au forum des enseignants innovants un projet monté à Aubenas avec Fabrice Foray, enseignant en BTS et Jean-Marc Ancian, enseignant en CLIS. Amis dans la vie, ils ont décidé d’allier leurs compétences pour réunir dans un même projet des BTS et une classe de CLIS autour d’un objet technologique. Bruno, membre de Projetice, signale que l’association peut mettre à disposition des PDA, Fabrice a l’idée d’utiliser des balises satellites, et Jean-Marc suggère une course d’orientation, les enfants de CLIS ayant souvent des difficultés de repérage sur un plan. La discussion entre amis aboutira à un projet confié à des étudiants de BTS pour créer un code logiciel permettant de faire une course d’orientation à partir d’un PDA.

La mise en œuvre du projet a amené bien des surprises. A partir d’un parcours d’orientation composé de mots, d’idéogrammes, de photos, chaque enfant doit se rendre à un endroit et, lorsqu’il y est parvenu, valide sur son PDA. La façon dont est décrit le parcours varie en fonction du niveau de lecture de l’enfant. L’utilisation du Pda a permis de développer chez les élèves de la Clis des qualités de motricité fine (tenir un stylet, écrire avec par exemple).Ils ont appris à envoyer un message par bluetooth, renommer un fichier, aller chercher des fichiers sur un tablet PC en utilisant bluetooth, etc. L’apprentissage est donc allé au-delà des capacités attendues liées au repérage dans l'espace.

Les incidences sur la sociabilité sont également sensibles. Au sein des classes, de petits ou de grands, les élèves, âgés de 8 à 12 ans ont beaucoup échangé. L’impact a été positif sur l’ambiance. D’autant que le fait de pouvoir ramener le Pda chez eux, et donc de montrer à leur entourage leur maîtrise de l’outil, a amélioré leur estime de soi. Ils se sont retrouvés dans un rôle d’expert. Les 4 étudiants, chargés du projet, sont venus plusieurs fois rendre visite à la Clis pour se rendre compte de ce que les enfants sont capables de comprendre. Ils ont été étonnés par leur niveau de manipulation du PDA. Ces rencontres et la qualité de leur relation avec les élèves ont donné une motivation supplémentaire aux étudiants, un niveau d’engagement particulièrement fort. L’expérience a suscité l’intérêt de beaucoup d’habitants de ville où se situe la CLIS. Leur regard a changé et la Clis semble mieux intégrée.

Pour Bruno, l’expérience est réussie mais pourrait être améliorée. Les balises ne fonctionnent pas toujours et la saisie avec une tablette numérique de base faciliterait le travail. Bruno a quitté Aubenas pour Grenoble, mais la suite du projet lui apparaît positive. Les étudiants du BTS et les élèves de la Clis collaborent désormais régulièrement autour su thème de la programmation et du handicap. Des idées autour de la validation de compétences à l’aide de balises GPS germent. Autre signe positif : la Clis de Privat aimerait aussi développer un tel projet. Les trois amis n’ont donc pas fini d’exploiter toutes les promesses du Pda pour sortir les Clis de leur isolement.

Des Landes à Hong Kong

Annie et Patrice Girard sont à Hong Kong car ils ont remporté le grand prix de Rennes pour leur projet "lecture nomade". Annie est enseignante en primaire à Orthevielle dans les Landes. Chaque année, elle a dans sa classe des enfants nomades qui vivent en caravane. Ils arrivent plus tard et quittent l’école plus tôt pour suivre leurs parents forains. Ils passent souvent deux ans au CP. Chez eux, la culture est orale et compter est important, mais la lecture est accessoire.

Pour les motiver, Annie a l’idée de passer par un support audio. Une fois par semaine, elle leur demande de s’enregistrer à la maison en train de lire. La méthode choisie est une méthode européenne conçue spécialement pour les enfants nomades, avec un retour constant entre l’image et l’écrit. Le lendemain matin, la classe écoute leur enregistrement. Les textes les concernent, concernent leur vie et leurs questionnements. Ils lisent à labri du regard des autres élèves mais avec le soutien de leurs parents, peuvent recommencer autant de fois qu’ils le souhaitent. Quant aux autres élèves, ils entendent des récits qui leur permettent de découvrir la vie des gens du voyage. Le baladeur est prêté à partir d’une convention signée avec les parents ; une façon aussi de les impliquer encore plus. Les familles sont contentes qu’on leur fasse confiance et voient leurs enfants motivés pour lire. L’initiative permet donc de créer du lien social au sein de la classe mais aussi avec des parents souvent à l’écart de l’école.

A partir de cette expérience, Annie a eu l’idée de réaliser des podcasts vidéos de remédiation pour tous les élèves en difficulté, en utilisant le tableau numérique interactif. Devant la caméra, les élèves expliquent à leurs parents et avec leurs mots à eux la leçon qu’ils ont apprise en se servant des cours enregistrés sur le Tni . Le « qu’as-tu appris » permet aux enfants de vérifier leurs apprentissages et aux parents de mieux comprendre comment apprennent leurs enfants. D’autres podscasts vidéos sont réalisés : le journal télévisé des bonnes nouvelles à partir des informations du Petit Quotidien, des journaux artistique, scientifique. Selon la répartition des tâches entre eux, les élèves sélectionnent des informations, rédigent un résumé puis le tapent pour le prompteur, s’occupent de filmer, de prendre le son. Ils peuvent aussi réaliser des reportages, des interviews comme ce fut le cas avec les frères Bogdanov il y a deux ans. Toutes ces émissions sont visionnées depuis les i-pod fournis en prêt.

En début d’année, les parents donnent formellement leur accord sur les droits à l’image. En règle générale, le projet leur plaît. Il leur ouvre vraiment les portes de l’école. Pour Annie « ce n’est pas une intrusion, c’est pour voir ce que font les enfants dans la classe. Plus tu montres, moins tu as de questions ». Cette ouverture de la classe a fait débat au sein des enseignants. Maintenant, certains de ses collègues ont fait une page web pour montrer leur classe.

Pour Annie, il y a déjà fort à faire côté pédagogie alors son mari Patrice l’épaule côté technologies. Enseignant en lycée professionnel en électrotechnique, webmaster du lycée et du site de l’école, il est devenu, à titre bénévole, personne ressource dans la classe d’Annie sur les outils (TBI, podcast..). 3 à 4 contenus sont réalisés par semaine. Annie amène le travail réalisé par les enfants, Patrice en fait la synthèse, de 45 minutes de film, il arrive à un format final de 3 minutes. Il veille aussi à synchroniser l’image et le son.

Utilisateur exclusif de Mac depuis 88 89, le caractère intuitif de ce système l’avait séduit, lui qui se trouvait nul en DOS. Patrice a tout appris en autodidacte. Il a commencé à produire des cours dès le début des années 90. Les voyages qu’il fait avec Annie ont été source de diaporamas puis rapidement de vidéos. Patrice a pris goût au montage, aujourd’hui encore le plus gros travail technique à faire. Pour lui, le plus dur a été le démarrage des podcasts, il y a trois ans. Ils étaient encore peu répandus, il était donc difficile d’échanger avec d’autres producteurs de podcasts pédagogiques. Les gens d’Apple l’ont conseillé et le réseau Itic a répondu à certaines de ses questions. Aujourd’hui, Annie et Patrice forment d’autres collègues sur la baladodiffusion, enseignants des Landes avec le CDDP ou utilisateurs d’Apple avec les sessions ITICA. Pour eux, le podcasting, complété par le Tni, véritable mémoire des cours, est à l’avant-garde des Tice car il est très simple et efficace quoique peu utilisé.

 

Annie et Patrice semblent très heureux d’être au forum car ils ont là une occasion unique de partager avec d’autres enseignants utilisateurs de Tice qui viennent du monde entier. La barrière de la langue se dresse parfois entre eux et d’autres enseignants, mais ils peuvent voir ici un panel d’innovations impressionnant.

« On invente rien, on transforme des idées, on va aller voir des idées qu’on va utiliser ».nous disent-ils. Ils aimeraient créer une de bibliothèque de vidéos regroupant tous les podcasts faits par les élèves sur des présentations de livre. Ils ont repéré des choses intéressantes, picoré des idées sur lesquelles ils pourront se baser. Annie n’aime pas l’idée du concours, Patrice nuance car pour lui, cela peut être aussi le couronnement d’un projet.

Leurs élèves et leurs amis suivent au jour le jour leurs aventures au forum grâce à leur blog :

http://web.me.com/anniegirard/CE1/Blog_Hong-Kong/Blog_Hong-Kong.html

Indian song

Pamela Chauhan, enseignante indienne de New Delhi, présente un projet récompensé à Hanoï lors de la rencontre des enseignants innovants asiatiques. « The global language club »  est un site de partage pour les enseignants en anglais. Pamela l’a utilisé également pour créer une communauté virtuelle. Au départ, elle déposait ses cours pour que ses élèves puissent les consulter lorsqu’ils sont chez eux, pour revoir une notion par exemple. Elle travaillait beaucoup sur la forme, de façon à présenter les notions à priori abstraites avec des images, des schémas. C’est aussi ce qu’elle enseigne à ses élèves « si tu veux qu’on te comprenne, lorsque tu décris quelque chose, il faut qu’on l’imagine, qu’on le visualise, qu’on le sente ». Pour mettre en application, ces principes, les élèves ont conçu ensemble un document de sensibilisation sur l’hygiène, son importance pour la santé et les moyens pour la respecter.

Avec un ordinateur portable, Pamela est allée présenter le document à des enfants de la rue. Car, pour elle, il est important d’amener l’éducation auprès de tous les enfants, y compris ceux qui ne peuvent aller à l’école. « C’est ma contribution à la société » nous dit elle. Une salle mise à disposition par son oncle sert de classe. Les cours se font plutôt sous forme de discussions, d’échanges sur les thèmes qui concernent la vie quotidienne (la survie quotidienne ?). Pamela leur apprend aussi à lire pour qu’ils puissent avoir accès à un niveau minimum d’informations.

La communauté « The global language club » s’est progressivement enrichie. Les élèves de son école bénéficient maintenant de véritables cours en ligne et d’un accompagnement individuel et d’un système d’entraide mutuelle. D’autres enseignants ont rejoint le projet. Pamela a réussi à les convaincre sur deux points. Ce que les élèves apprennent en ligne, ils le voient moins longuement en classe, ce qui permet de libérer du temps pour travailler autrement ou sur d’autres thèmes. Et, en permettant aux élèves d’apprendre par eux-mêmes et d’utiliser les nouvelles technologies pour réaliser des outils de communication, de sensibilisation, elle favorise l’acquisition de compétences nécessaires pour s’intégrer dans la société du XXIe siècle. Pamela a rassemblé tous les éléments pour gagner le concours des enseignants innovants : une intention pédagogique, des ressources technologiques et une ouverture vers la communauté. Sera-t-elle couronnée ce soir ?

Le voyage des tortues

Marie May Iman est enseignante en technologies de la communication et de l'information aux Seychelles et elle aime les tortues, espèce malmenée. Alors, elle a demandé à ses élèves de réaliser des documents de sensibilisation sur la préservation de l’espèce afin de les diffuser ensuite auprès du grand public. Un dépliant, une affiche, une brochure, une pile de diapositives ont été créés. Mais avant, les élèves ont collecté des informations sur l’espèce, ses conditions de vie, les dangers qui la guette. Pour dessiner les déplacements, ils ont suivi les migrations des tortues avec des images satellite.

Marie est la représentante des iles de l’Océan Indien. L’an dernier, à Helsinki, un enseignant malgache est venu présenter son projet. Les Comores ou l’Ile Maurice sont absents du réseau. Luc, le responsable des programmes « partners in learning » pour cette zone souligne les problèmes d’achat de matériel, de connexion. Utiliser les nouvelles technologies n’est pas chose simple ce qui ne veut pas dire que l’innovation soit inexistante mais, faute de moyens, elle se base peu sur les nouvelles technologies. L’usage des téléphones mobiles pour apprendre est une voie prometteuse pour développer les usages. Des projets sont à l’étude au Sénégal avec Wapeduc. S’ils se concrétisent positivement, ils pourraient être reproduits dans les Iles de l’Océan Indien. L’innovation profiterait alors des opportunités technologiques.

La tolérance, ça se pense

Peter de Lisle enseigne les nouvelles technologies et l’anglais dans une école secondaire sud africaine. Il est persuadé que pour lutter contre la xénophobie, il faut comprendre l’autre et plus précisément, son schéma de pensée. En exposant sa façon de voir avec d’autres, de culture différente, en s’intéressant à leurs visions des choses, on enrichit sa propre réflexion et on pense mieux. De l’idée, il est passé à la réalisation. Les logiciels de cartes mentales, comme Inspiration, sont des outils qui permettent de représenter les idées, les associations entre elles. Utilisés en ligne, ils peuvent être partagés et enrichis collectivement. Outre les objectifs liés à la citoyenneté, le projet de Peter permet aux élèves de renforcer leur maîtrise des Tic, de l’anglais et de la communication.

En pratique, Peter organise des projets collaboratifs entre une classe sud-africaine et une autre classe d’un autre pays africain. Il préfère travailler avec un pays du même continent car pour lui, il est important que les sud-africains sortent de leur isolement, de leur « sentiment de supériorité ». Pour Peter, beaucoup de Sud Africains estiment que leur pays est privilégié, sans problème en comparaison avec les autres nations africaines. Or, l’Afrique du Sud connaît aussi des problèmes d’inclusion ou de violence.

Une thématique commune est exploitée, chacun expose ses idées représentées sur une carte ou un arbre. On voit ainsi ce que les autres pensent, on peut réagir à cette représentation. Pour travailler avec une classe rwandaise, des élèves sont partis du film « Hôtel Rwanda » afin de réfléchir autour de la question du génocide. Ils ont aussi conçu avec leurs homologues rwandais un projet de mémorial pour les victimes de génocide en utilisant le logiciel Sketchup.

Avec un collier de fleurs

Nathan Kerr se promène dans les allées du forum avec un collier de fleurs. Il a remporté le concours de l’enseignant innovant néo-zélandais et se place parmi les favoris ici.

Dans son école secondaire multiculturelle de 1400 étudiants, 50 langues sont parlées. L’anglais, le maori mais aussi les langues natales des réfugiés et immigrants venus d’Afrique ou d’Asie. Comment permettre à tous ces élèves aux langues et aux cultures différentes d’apprendre, de s’intégrer, d’avoir toutes les chances de réussir dans le pays ? Avec les nouvelles technologies ! Nathan a développé trois projets différents. Le premier utilise les vidéos des archives nationales mises à disposition gratuitement dans les établissements scolaires. Les élèves choisissent des films, les présentent et les traduisent pour d’autres étudiants qui viennent consulter le site. Le deuxième s’appuie sur movie maker pour créer des films, des animations. Le troisième se base sur l’utilisation du téléphone mobile pour filmer, collecter des éléments. Les trois supports permettent avant tout aux élèves de mieux connaître leur pays d’adoption, de le présenter avec leur regard propre et de partager leurs productions avec d’autres élèves néo-zélandais. Ils reconnaissent aussi les compétences des apprenants dans les usages des outils des technologies de la communication courants, des compétences fréquemment partagées.

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