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Un nouveau dossier B2i : pour quoi faire ?

par Bruno Devauchelle

Lorsqu’en décembre 2001 nous avons réalisé le premier dossier B2i® nous avons été très heureux de voir l’impact qu’il avait eu. Persuadés que le Brevet Informatique et Internet était une  » bonne  » mesure, et pensant qu’elle serait, après quelques hésitations, adoptée par tous, nous n’avons pas imaginé qu’il nous faudrait revenir sur cette question, trois années après. Or, la réalité des pratiques, mais aussi la suite qui a été donnée à cette initiative à tous les niveaux de l’institution, nécessitent que nous fassions un point sur le  » seul dispositif « , appuyé par les programmes disciplinaires et qui aujourd’hui sert de cadre à l’introduction des TIC dans le système éducatif.

Lorsque la note de service du 23 novembre 2000 est publiée au Bulletin Officiel de l’Education National, ses promoteurs sont peut-être loin d’imaginer le destin qu’il aura. En effet, la note de service étant le niveau le plus bas dans la hiérarchie des textes officiels, il aurait pu aussi bien disparaître dans les mois ou les années qui ont suivies. Or non seulement le Brevet Informatique et Internet n’a pas disparu, mais il est devenu la norme de référence française (avec le Certificat Informatique et Internet) pour désigner ce que doit être la place des TIC dans le système scolaire et universitaire.

Le changement de majorité politique en 2002 aurait pu être l’occasion de revisiter ce dispositif, voire de le supprimer. Il n’en a rien été. Bien au contraire, dès la première année le B2i® a été confirmé; on a vu progressivement son intégration dans les programmes d’enseignement de l’école primaire (2002) et l’on est en train de l’intégrer dans les programmes du collège et probablement dans le futur nouveau brevet des collèges. Dans le même temps, l’enseignement supérieur a pris à son compte la poursuite du développement du dispositif en développant les deux niveaux du C2i®.

Etrangement, bien qu’il soit en cours d’expérimentation depuis la rentrée scolaire 2002 dans plusieurs lycées, le B2i® niveau 3 n’est toujours pas officialisé. Aucune information n’a été donnée publiquement sur le devenir de ce niveau dont on peut penser qu’il va devenir urgent de le finaliser pour que l’ensemble du dispositif soit enfin en place.

Rappelons pour mémoire que l’une des intentions premières du B2i® a été de lutter contre le risque de dérive commerciale qui était en train de se développer en Europe depuis 1996. A cette date un consortium avait créé une certification, le PCIE® -Permis de Conduite Informatique Européen- qui proposait la mise en place de formations et de certifications (moyennant paiement) soutenues par ce groupe d’entreprises du secteur des technologies de l’information et de la communication.

Le B2i® est donc une réponse politique à une critique récurrente à propos de l’introduction des TIC dans le système éducatif. Outre le refus de cette marchandisation, il faut aussi insister sur la volonté affirmée par les concepteurs de ce brevet d’introduire une dimension citoyenne explicite en association avec la promotion des usages des technologies en éducation. En d’autres termes les  » inventeurs  » du B2i® pensent qu’il n’y a pas d’usage des technologies qui ne repose sur une conscience citoyenne de leur usage, et ce quel que soit le contexte. Cela signifie que, dans leur usage, les technologies de l’information et de la communication doivent être comprises comme porteuses d’une dimension politique que l’on ne peut considérer comme neutre et qu’il convient d’apprendre aux jeunes cet usage critique dès l’école.

La jeune histoire du B2i – il a quatre ans à la date de sortie de ce dossier – le montre pourtant encore comme largement balbutiant. De nombreuses hésitations, des frilosités voire des oppositions sont mises à jour. Le taux de mise en place du B2i® dans les établissements est encore loin des 100%. Notre enquête que l’on peut lire dans ce numéro spécial établi que 65% des répondants déclarent le B2i effectivement en place dans leur établissement. Or ce chiffre est à modérer du fait qu’une grande partie est plutôt composée d’acteurs déjà impliqués dans l’intégration des TIC, dans leur pratique et dans leur établissement.

La lecture du rapport de l’Inspection Général de 2003 donne à ce sujet un éclairage singulier sur ces hésitations, puisque parmi les responsables désignés comme freins, l’ensemble des corps d’inspection est évoqué. Même si, à notre avis, ce n’est pas la seule cause, il faut reconnaître que la place des cadres intermédiaires de l’institution scolaire a été, au travers du B2i®, perçue comme particulièrement frileuse, certains n’hésitant pas à considérer qu’ils n’assumaient pas complètement leur fonction institutionnelle.

En proposant ce deuxième dossier sur le B2i® nous souhaitons apporter, à nouveau, un regard critique, positif et volontariste sur ce dispositif. Nous souhaitons aussi énoncer un certain nombre de propositions, à l’analyse des témoignages et travaux qui accompagnent ce dossier, que nous soumettons à la lecture critique de tous nos lecteurs.

Bruno Devauchelle