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Etre et parler le rôle de l’école

Si tout le monde reconnaît l’importance de l’apprentissage de l’oral à l’école, peut-on faire un bilan des pratiques en classe ? En Suisse, rappelle André Giordan (Université de Genève), l’école apprend l’art oratoire. Michel Grandaty (IUFM Toulouse) rappelle que les instructions officielles encouragent les pratiques orales. Mais il souligne surtout leur évolution. Alors que l’oral ne servait qu’à adapter le cours du professeur aux réactions des élèves, proposant comme activités la réponse à des questions posées par l’enseignant; on s’oriente maintenant vers des activités de débat et de construction de savoirs. Autant dire que l’oral illustre une évolution de l’enseignement. Pour Michelle Laurissergues (ANAE), c’est une occasion de changer l’école. Jean-Didier Vincent, neurobiologiste, ancien président du Conseil national des programmes, souligne l’importance du langage comme porteur d’émotion. C’est en cela qu’il est constructeur. D’où la nécessité de « réintroduire la joie chez les maîtres ». Il fallait l’annoncer avant la rentrée.

Michelle Laurissergues, Michel Grandaty, André Giordan (de g.à d.)

Présentation de l’offre E.N.T. de trois industriels

Scolastance, Accenture et un groupe d’éditeurs réunis au sein du KNE (Kiosque numérique de l’éducation) partagent le même stand à Hourtin, chacun y apportant ses compétences propres, l’un en développement informatique, l’autre en ingénierie et le troisième en éditions de produits pédagogiques. Tous trois s’intéressent aux ENT (espaces numériques de travail) et aux initiatives que prennent les collectivités territoriales pour promouvoir le développement de plates-formes de communications accessibles en ligne à tous les membres des communautés éducatives : enseignants, personnels administratifs, élèves et parents. Scolastance a développé une solution qui regroupe des services classiques de vie scolaire (gestion des absences, enregistrement des notes, cahier de textes) et des services de communication (mails et forums) et de gestion de ressources. Scolastance réalise plusieurs expérimentations dans une dizaine de lycées en Alsace et en Lorraine notamment.

L’objectif du KNE est d’apporter aux établissements, via la plate-forme de Scolastance ou tout autre du même type, des ressources pédagogiques éditoriales : dictionnaires et encyclopédies de Larousse et Le Robert, manuels numériques de Hatier, Magnard ou Belin. Pour les éditeurs privés, la distribution de ressources ne peut pas être gratuite. Le KNE se présente donc comme un marché où les gestionnaires des établissements acquièrent des droits d’usages de produits en ligne sélectionnés par les enseignants.
Ces industriels parient sur le développement des espaces numériques de travail. En tous cas, ils s’y préparent. Il faudra être attentif aux résultats des expérimentations déjà lancées en Alsace, dans les Bouches du Rhône, en Lorraine et bientôt en Ile de France et en Picardie. Dans l’offre très foisonnante, les usagers feront leurs choix et nul doute qu’ils nous surprendront.

Oralité, écriture : quelles frontières ?

Avec Michel Grandaty, maître de conférence à l’IUFM de Toulouse, chercheur associé à l’INRP. Il travaille aussi à l’Institut des sciences de l’Université de Toulouse le Mirail.

Si l’évolution de l’écrit passe par l’évolution technologique, qu’en est-il de l’oral ?

L’oralité dans toutes ses dimensions permet l’écoute et la participation. <strong>Il n’existe pas de frontières que l’on puisse établir entre l’oral et l’écrit mais il s’agit plutôt d’un gradient</strong>. Des oraux (type conférence, discours politiques…) sont très écrits et à l’inverse des écrits type SMS, mail avec smile, sont de l’oralité écrite. On peut cependant relever des caractéristiques communes : l’oral est de l’interaction, du temporel. Il s’enracine dans des situations, l’écrit échappe à l’espace temps (on peut lire quelqu’un de mort). Comment ont évolué ces  » frontières poreuses  » ? Il ne s’agit pas d’une évolution mais d’une <strong>R</strong>évolution. Ce n’est pas parce qu’il y a évolution technologique qu’il y a évolution des pratiques sociales sur le même rythme. Ce sera lent.

Médias : le reflet des territoires ?

Deux approches sont essentiellement soulevées, en miroir l’une de l’autre. La presse doit rendre compte du territoire et le territoire doit intéresser la presse. En les mettant l’une en face de l’autre, a émergé de la tribune et de la salle la question cruciale de la pluralité de la presse et la nécessité d’un service public. En Polynésie (W. Kotra, directeur de RFO) ne dit pas qu’ils manquent d’informations -elles arrivent du monde entier via le câble-, mais bien de qui va parler de leur territoire s’il n’y a pas de service public ? En Allemagne, Mme GRIEFAHN, députée du Deutsch Bundestag, pense que la presse a pour mission essentielle de faire connaître l’autre, surtout à l’heure de l’élargissement de l’Europe. Quant au Conseil Général de la Gironde (par la voix de J. TOUZEAU, vice-président), il pense qu’une de ses missions est de s’adresser à l’habitant du territoire de façon à ce qu’il se sente porté, présent dans l’information. Des approches forts différentes pour des territoires aux problématiques différentes.

Enseignement de la craie à la souris quelle réalité ?

Les 10 intervenants de ce débat représentaient toutes les catégories qui agissent autour de l’école : enseignants, éditeurs, responsables politiques, chercheurs, parents d’élèves. L’intérêt du sujet qui a attiré un nombreux public a permis aux intervenants de dresser un large panorama des questions qu’il pose.
Quatre questions proposées par le Scéren CDNP ont inauguré le débat :

  • Comment les enseignants peuvent intégrer les TIC ?
  • Quelle promotion des usages etdes bonnes pratiques est possible ?
  • Comment décrire les usages pédagogiques et les tranférer ?
  • Quelle place pour les ressources pédagogiques ?

Après cette mise en route globale, ont été abordées les questions des pratiques dans la classe. Le B2i a été présenté comme une initiative qui rencontre encore peu de succès sur le terrain malgré la volonté institutionnelle forte. Cela a amené a poser la question de la place de l’école dans l’acquisition des compétences TIC des jeunes. Les résistances encore nombreuses sont confortées par un vocabulaire qui s’efforce de comparer l’ordinateur aux moyens traditionnels au lieu de chercher à identifier les nouvelles pratiques possibles. Une enseignante d’histoire géographie a alors présenté les activités nouvelles qu’elle pouvait développer grace à l’utilisation du  » cartable électronique  » fourni à ses élèves et à elle-même : la richesse, la variété et le dynamisme des supports permet, pour elle, de favoriser les apprentissages.
Un élu local de la Gironde en charge des questions éducatives a particulièrement insisté sur le rôle des collectivités territoriales pour lutter contre les inégalités, au-delà de l’obligation que fait la loi. 4800 ordinateurs installés dans le département ne doivent pas faire oublier la nécessité d’une réflexion sur les pratiques adaptées aux besoins réels.
Les éditeurs présents ont ensuite insisté sur leur responsabilité afin de donner des outils qui correspondent aux besoins des élèves. Se heurtant parfois à la volonté des enseignants, ils constatent l’hétérogénéité des pratiques et ils énoncent la volonté de faire faire le lien livre/numérique aux enseignants, c’est-à-dire de les amener à mixer les pratiques pour mieux adopter les nouveaux manuels électroniques.
Un formateur d’IUFM a dénoncé l’évolution actuelle qui, malgré le C2i, ne favorise pas les moyens pour la formation initiale des enseignants. Un enseignant de l’Edhec de Lille a présenté une expérience réussie, pour les enseignants et les élèves, de e-learning, tout en soulignant qu’il y avait une forte synergie présentiel/distanciel et que la réussite (90% des enseignants utilisateurs, 70% des 2000 étudiants usagers quotidiens). En fin de présentation un parent d’élève du département des Landes a mis en évidence l’intérêt de l’expérience du cartable numérique, mais il en aussi souligné les limites en signalant que les écarts culturels entre les parents restaient encore très importants devant les TIC.
Les questions du public ont particulièrement porté sur la question de l’accompagnement des usages surtout sur le plan technique. Les échecs d’intégration des TIC dans les classes ont surtout êté présentés comme un problème de maintenance et d’assistance aux usagers. A la fin de ce débat, un collègue Québecois présent dans la salle a pu témoigner des difficultés rencontrées de façon assez similaire de l’autre coté de l’atlantique, même si les questions ne sont pas toujours posées de la même façon (le soutien scolaire n’est pas vu sous le même angle).