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Comment éduquer à la liberté et à la lutte contre les discriminations ? Voilà deux questions qui sont au coeur de l’éducation civique mais qui peuvent rencontrer des obstacles dans l’Ecole d’aujourd’hui. Fenêtres sur cours, le magazine du Snuipp, questionne deux chercheurs : François Audigier, université de Genève, et Françoise Lorcerie, université d’Aix-en-Provence. Ils apportent des réponses qui questionnent à leur tour l’Ecole.

Pour le premier, « le travail sur les règles de vie, tout comme les conseils de classe, sont des initiations à la vie politique. Il est donc important de savoir que les règles ne s’établissent pas, dans une société démocratique complexe, sur un simple accord d’un groupe de participants. Les règles de vie obéissent à des règles qui leur sont supérieures, extérieures et antérieures : la Loi, à travers les règles de l’école, des principes : les Droits de l’Homme et le respect de la personne humaine, et le fait que les règles soient déjà intériorisées par les élèves. Il convient de ne pas faire croire aux élèves qu’ils les inventent, mais d’en faire un travail d’explicitation. Enfin se pose la question du pouvoir que l’institution scolaire, à travers les enseignants, souhaite accorder aux élèves. Le droit est d’abord un espace de libertés : comment initier au droit, à une citoyenneté si nous ne dessinons pas à la fois des espaces, des temps et des objets objets de liberté pour les élèves ? Il y a là un paradoxe sur lequel il faudra réfléchir ».

Françoise Lorcerie s’interroge sur l’action de l’Ecole dans la lutte contre les discriminations. « Il faut définir l’école comme un espace juste où l’appartenance ethnique ne doit pas avoir d’effet non voulu, ni sur la répartition des classes, ce qui est souvent le cas au collège sous des pressions diverses, ni sur les attentes vis-à-vis des élèves, ce qui arrive au primaire. Sur ce point, l’école peut beaucoup et elle fait déjà beaucoup… Maintenant, faut-il une éducation spécifique au non racisme ?… Avec la course au programme, c’est sûrement utile, d’autant que les programmes d’éducation civique ne font qu’une référence timide et formelle au racisme. De surcroît, aucune directive de l’Education Nationale ne traite de l’indispensable mixité ethnique des classes et de l’égalité des élèves dans un contexte de renvoi à l’origine. La seule initiative institutionnelle en la matière, c’est encore la loi interdisant le port ostensible des signes religieux… qui s’analyse sociologiquement comme un nouveau message de défiance et une obligation supplémentaire de conformité imposée aux minoritaires ». L’initiative revient donc aux enseignants.

Fenêtres sur Cours 269 (en pdf)
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