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Par Françoise Solliec

A partir du lundi 8 octobre, les clés USB vont être distribuées dans les établissements et les centres d’apprentissage. Comment cela va-t-il se passer ? Réponse du proviseur du lycée Eugène Delacroix, Maisons-Alfort.

Il va falloir construire un projet d’utilisation pour des équipements, certes intéressants, mais qui n’ont pas été demandés.

Avec 15 classes de seconde et 120 enseignants, c’est une palette d’environ 600 clés USB qui est attendue au lycée Eugène Delacroix. « Mais la distribution n’est pas un problème, » remarque Alain Burleraux, le proviseur, « toute la question est de savoir ce que les élèves, et les enseignants, vont en faire. Les informations nous sont arrivées du conseil régional pendant l’été et il va falloir maintenant mettre en place un projet d’utilisation d’équipements qu’on ne nous a pas présentés et qu’on n’a pas demandé».

Ce n’est pas qu’Alain Burleraux soit frileux par rapport aux outils informatiques. Bien au contraire. Il a fait partie de plusieurs groupes de travail nationaux sur le sujet, dont celui qui doit voir aboutir la rédaction de la charte des personnels de l’éducation nationale en matière d’utilisation professionnelle de l’informatique. Cela fait déjà plusieurs années que la communication par courriel institutionnel a supplanté la communication papier dans son établissement. Et, depuis un an, le lycée fait partie des quinze expérimentateurs franciliens d’une plate-forme ENT (BVS-Orange dans ce cas). Mais justement, s’inquiète-t-il « comment ces deux démarches vont-elles se compléter ? Les énergies des enseignants en matière informatique sont déjà canalisées par l’utilisation de l’ENT. Et est-ce que nous n’allons pas à nouveau connaître des problèmes de sécurité ? Certes, permettre aux élèves de transporter leurs fichiers partout avec eux est une bonne idée, mais est-ce que cela résoudra la question des 15% d’élèves qui ne disposent pas chez eux d’un ordinateur connecté ?

Et les élèves de seconde sont-ils la meilleure cible ? Il aurait pu être intéressant, quoique sans doute illogique, de démarrer avec les élèves de 1ère qui utilisent beaucoup ces outils dans le cadre des TPE. Ce n’est pas forcément avec des opérations qui nous arrivent toutes ficelées qu’on fera avancer des réflexions et des pratiques qui demandent beaucoup de temps pour s’établir.»

Le questionnement d’Alain Burleraux fait sans doute écho à un sentiment relativement général chez les proviseurs. Partagés entre les contraintes imposées par la gestion (et les gestionnaires) de réseaux de plus en plus complexes, la multiplication des équipements offerts par la région et les demandes suscitées par l’évolution des pratiques et des technologies, il leur faut souvent naviguer à vue, chacun pour soi, pour prendre les décisions qui leur paraissent les meilleures dans le cadre de leur établissement.

Cependant l’opération « une clé pour chaque lycéen », quoique rapidement menée, ne l’a pas été sans réflexion dans les services régionaux ni partenariat avec les missions TICE académiques. C’est ainsi que la clé est conçue pour éviter un maximum de problèmes de sécurité, que ce soit des problèmes de droit d’utilisation des contenus ou de contamination des ordinateurs qui les accueilleront. De plus, un dispositif d’accompagnement conséquent est proposé (documents et site, réunions académiques d’information, suivi par une société d’études mandatée par la région).

En fait, au lycée Delacroix comme dans bien d’autres, beaucoup de lycéens utilisent déjà une clé USB, notamment dans le cadre de la présentation des TPE ou d’exposés. Certains vont jusqu’à rendre ainsi des devoirs. Mais les enseignants prendront-ils l’habitude de proposer plus systématiquement aux élèves de seconde des exercices et des documents sous forme numérique ? « Je vais réunir les enseignants volontaires et consulter les coordonnateurs de discipline » conclut Alain Burleraux, « mais j’apprécierais de pouvoir prendre le temps de le faire et de ne pas être obligé de distribuer les clés sans avoir pu amorcer une réflexion entre nous ».