Print Friendly, PDF & Email

Par Françoise Solliec

Comment faire lire et écrire les élèves ? Trois réponses sont données ici, au travers d’un documentaire de Cap Canal et de la présentation de deux aventures récompensées par le prix de l’innovation éducative.

Dans le documentaire « Ecrire » réalisé par Philippe Meirieu pour la chaîne lyonnaise Cap Canal, Luc Baptiste, écrivain et professeur d’une classe de cycle 3 de l’école Jaques Laurent à Vichy, affirme l’importance de faire écrire à ses élèves des textes longs, par opposition à des exercices courts. Tout un ensemble de textes a ainsi été réalisé dans sa classe à partir de l’histoire de Thésée. « C’est difficile d’écrire » dit pourtant un élève, « il faut avoir des idées, rentrer dans le détail ». « L’écriture, c’est difficile pour tout le monde », répond le maître, « il ne sert à rien d’attendre d’avoir des techniques, il faut faire écrire dans des domaines très différents », en partant d’observations, en faisant décrire des images, en racontant des histoires, etc. Dans un exercice de description d’image, il encourage les élèves « à se piller les uns les autres » et à se critiquer mutuellement, en mettant en valeur des différences que les élèves apprécient de reconnaître. Ainsi entraînés, ils prennent finalement d’eux-mêmes la plume… ou le clavier comme l’explique un élève « j’ai fait un blog, j’y décris des livres et des jeux de société ».

Dans le territoire de Belfort, les cinq lycées professionnels se sont associés, depuis deux ans, sous l’impulsion de documentalistes et d’enseignants de lettres, pour organiser un défi lecture. Dans chaque lycée, une classe est concernée ainsi qu’une partie de son équipe enseignante, constituée d’un documentaliste, d’un enseignant de lettres et d’un enseignant d’arts appliqués. Les classes relèvent de filières et de niveaux différents, du CAP au Bac Pro.

Dans une première étape, les équipes enseignantes définissent 7 romans à lire par les quelques 100 élèves, qui vont se constituer en binôme. Des groupes d’élèves réalisent ensuite pour chacun des livres un questionnaire composé de 8 questions dont 3 doivent se poser sous forme de jeu. Ils auront alors deux mois pour élaborer les réponses aux questionnaires reçus et corriger ceux qui leur sont retournés. En parallèle, un marque-page est réalisé par chaque binôme.

Une journée de rencontre en mai permet de distribuer les prix à ceux qui ont le mieux répondu aux questionnaires, d’élire le livre préféré parmi les 7 étudiés et d’exposer les marque-pages. Même si les élèves sont parfois un peu réticents au début et estiment que lire 7 livres, c’est beaucoup, ils se prennent vite au jeu et, en majorité, les lisent tous. L’an dernier la participation des inspecteurs à la cérémonie de remise des prix a été fort appréciée et la récompense liée au prix qu’a reçu cette action permettra cette année la participation d’un écrivain à l’opération.

Pascal Le Bert, professeur de lettres au lycée Charles de Gaulle de Vannes a choisi de faire étudier à ses élèves de première les textes de Voltaire relatifs à ses engagements dans la défense d’innocents déclarés coupables par la justice (tel Calas). Mais cette introduction historique au fonctionnement de la justice est rapidement complétée par des références plus récentes (à l’affaire Dreyfus, à celle d’Outreau, à Denis Seznec, etc.), des lectures abondantes et des rencontres avec des avocats ou des représentants des tribunaux. Les élèves apprennent ainsi à écrire une critique, un article de presse, à argumenter un débat. Mais la production la plus marquante des élèves, pour laquelle cet enseignant a reçu le prix de l’innovation éducative, c’est le recueil « Des mots et des murs » né de la correspondance sur 5 ans entre les élèves et les détenus du centre pénitentiaire de Nantes. Les élèves y décrivent leurs sentiments sur la justice, la prison, posent aux détenus des questions sur leur parcours judiciaire, leur quotidien en prison. Les détenus répondent sans détours. Cela donne un dialogue riche et des lettres fortes.