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Entre quartiers de banlieue, zones résidentielles et villages ruraux, les établissements scolaires de la région de Mantes la Jolie, dans les Yvelines, se déploient dans une mosaïque toute hexagonale. Ils sont fortement mobilisés dans le mouvement des lycées et collèges contre les restrictions budgétaires.

Profs, élèves et parents tentent de trouver ensemble des moyens efficaces pour se faire entendre. La participation des parents est un élément important de ce mouvement. Nous avons échangé avec deux d’entre eux, Patrick Liège, élu au conseil d’Administration du lycée Senghor de Magnanville pour l’Association des parents d’élèves indépendants, et Josiane Royer, mère d’un collégien scolarisé au collège Vaucouleurs, et d’une lycéenne de Magnanville, deux établissements fortement perturbés depuis le retour des vacances.

Qu’est ce qui les a poussés à s’engager dans le mouvement, quelles actions mènent ils, quelles sont leurs craintes pour l’avenir de leurs enfants, voici quelques questions que nous avions envie de leur poser.

Pour Patrick Liège, l’école est en danger, sa fille quittera bientôt le lycée mais l’inquiétude demeure pour les élèves plus jeunes. L’intention sur la suppression des moyens semble très politique que ce soit pour les suppressions d’heures de soutien, ou les suppressions de postes d’enseignants. Un certain nombre d’incompréhensions demeurent comme le développement des heures supplémentaires alors que des postes d’enseignants disparaissent. Le système de la dotation horaire globale n’est pas expliqué aux parents mais, malgré sa complexité, ils commencent à en percevoir les enjeux pour la scolarité de leurs enfants. Ils voient le nombre de postes en moins pour l’an prochain, constatent la disparition des heures de soutien alors que de nombreux élèves en ont besoin dans le secteur du Mantois.

Après dix jours de protestations, les parents ne sont pas encore assez mobilisés pourtant le problème les concerne tous. Les médias relaient peu le mouvement, ce qui n’aide pas à la mobilisation. Les forces de police sont même intervenues dans un établissement voisin, le collège de Vaucouleurs, pour l’évacuer dans l’une indifférence quasi générale.

Certains parents râlent de peur que les grèves et les manifestations ne remettent en jeu la réussite de leurs enfants au bac, surtout que ce sont les terminales qui sont les plus fortement engagés dans le mouvement. Mais les râleurs ne sont pas très nombreux. D’autant que les enseignants du lycée Senghor de Magnanville fournissent des polycopiés et font le maximum pour que les notions à apprendre soient récupérées, y compris sur leur temps personnel. Habituellement, lors des grèves d’enseignants, les réactions virulentes sont plus nombreuses.

Mardi soir a eu lieu l’assemblée générale pour décider de la suite du mouvement. Une centaine de parents étaient présents. Un blocus du lycée a été décidé pour jeudi.

Josiane Royer constate elle une véritable alliance entre les parents, les enseignants et les élèves dans la mobilisation. Les trois parties sont présentes aux assemblées générales, ce qui permet de discuter, de décider ensemble des actions. Pour Josiane, les AG s’enchaînent, le mardi en fin d’après midi au lycée de Magnanville pou sa fille, le vendredi au collège de Vaucouleurs pour son fils et le mardi dans la soirée pour celle qui réunit tous les établissements du Mantois. Mardi, l’assemblée générale de Magnanville a été plutôt houleuse mais elle a débouché, à force d’échanges ouverts, sur un plan d’actions. Des parents étaient mécontents car les élèves avaient été laissés seuls lors d’actions de blocage du lycée, d’autres accusent les enseignants de manipuler certains élèves qui minoritaires empêcheraient la majorité de travailler. Enfin, un groupe souhaite trouver un compromis pour que les choses avancent. Pour que le rectorat revienne en arrière, il faut que les actions prennent de l’ampleur, soient relayées par les médias. Les parents doivent donc se mobiliser ensemble, pour un objectif commun : conserver les moyens pour que leurs enfants réussissent. Finalement il est décidé que ce sont les parents qui occuperont le lycée jeudi 27 mars. Ensuite les cours auront lieu mais des blocages intempestifs pourront être organisés. Les lycéens participeront aux manifestations uniquement s’ils sont accompagnés d’enseignants et de parents. Une manifestation devant le rectorat de Versailles avec d’autres établissements de l’Académie aura lieu vendredi. Les élèves de leur côté préparent une lettre pour expliquer leur mouvement.

Josiane Royer est plutôt d’ordinaire une modérée. Là, elle participe aux actions, se mobilise pour convaincre les autres parents car elle est en colère par ce qui se passe, par cette impression d’indifférence alors que tout le monde devrait se sentir concerné. Pour elle, ce n’est pas seulement la qualité de l’éducation de ses enfants qui est remise en cause mais aussi l’avenir de la France. « On prend la réalité en face, on a l’impression qu’on prend les profs pour des bons à rien, les décisions sont économiques, elles n’ont rien à voir avec la pédagogie » dit elle. Les Zep bénéficiaient jusque là de moyens pour les sortir de l’isolement, elles en auront moins. La suppression de la 3e professionnelle au collège de Vaucouleurs est catastrophique : des jeunes qui avaient jusque là accès à une formation n’auront plus rien, ils sont lâchés. Idem pour les lycéens qui échoueront au bac : au lycée de Magnanville, il n’y aura plus de place pour eux. Un autre exemple concret a fait réagir Josiane : la suppression de nombreuses options dont l’option arabe qui attiraient des enfants du Val Fourré vers le lycée Senghor de Magnanville et offraient une véritable ouverture.

Elle constate aussi du côté des enseignants des établissements en grève, une grande fatigue, une démoralisation et du côté des lycéens une angoisse sur leur avenir. Mais les assemblées générales comme les actions, donnent l’occasion aux profs, aux élèves et aux parents de dialoguer, de s’épauler et de se mobiliser ensemble.

Propos recueillis par Monique Royer

Les blogs du mouvement

Au Lycée Senghor de Magnanville

http://www.mag-2008.blogspot.com/

Au collège de Vaucouleurs :

http://collegeencolere.centerblog.net/