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« Cette consultation est une véritable consultation ». Alors que le nouveau programme de maths de seconde suscite des interprétations et des revendications, Jacques Moisan promet de tenir compte de la consultation des enseignants. Doyen de l’inspection générale de maths, il répond aux questions du Café sur la place de la géométrie, le choix des thèmes, l’algorithmique et son avenir, l’avenir de l’épreuve expérimentale.

D’abord, je souhaiterais dire que, contrairement à ce qui a pu être écrit, cette consultation est une véritable consultation. La DGESCO et moi nous sommes engagés à ce que les demandes majoritaires des professeurs soient prises en compte, dans la limite d’une continuité nécessaire avec les programmes de collège.

Ainsi, le programme définitif applicable en classe de seconde à la rentrée 2009 ne pourra être connu avant le 15 mai ! Il devrait être rendu public dans le courant de la semaine suivante en même temps que les aménagements des programmes de 1re (pour la rentrée 2010) et de terminale (pour la rentrée 2011).

Quelles sont les orientations générales qui ont guidé l’Inspection Générale dans l’élaboration de ce projet ?

Les objectifs du programme sont :

• une cohérence et continuité, dans la forme et dans l’esprit, avec les programmes de collège appliqués depuis la rentrée 2008 ;

• une rédaction mettant en avant, comme pour le collège, les types de problèmes que les élèves doivent savoir résoudre ;

• un recentrage autour des contenus nécessaires à toutes les poursuites d’études au lycée ;

• l’introduction de véritables thèmes d’études permettant une différenciation et une facilitation des orientations scientifiques.

Le poids de la géométrie est, dans le projet, assez réduit : de quelle façon peut-on imaginer les programmes de Première et Terminale pour qu’ils poursuivent l’apprentissage de la géométrie, entrepris en Collège, après un hiatus d’un an ? Par ailleurs l’étude de la géométrie vectorielle semble utile en particulier comme modèle privilégié en algèbre linéaire. N’introduire le vectoriel qu’en Première seulement ne risque-t-il pas de péjorer l’appropriation de ce modèle, qui semble indispensable aux élèves qui se destinent à des études scientifiques ?

En ce qui concerne la géométrie non repérée, nous pensons qu’un travail sur des problèmes mettant en œuvre la géométrie du collège est suffisant. S’il faut identifier ces contenus dans le programme (au risque que les élèves les considèrent comme des redites du collège) nous le ferons.

Pour ce qui concerne la géométrie vectorielle, elle a été supprimée totalement du collège. Deux possibilités s’offraient à nous : enseigner le programme ancien de 4e, 3e et 2nde en classe de seconde ou le réserver aux seuls 40% des élèves qui en ont besoin, ceux qui suivent une 1re S ou une 1re STI, pendant leur première. Dans le souci de ne pas mettre en seconde des élèves en difficulté avec des mathématiques dont ils n’auront pas besoin, nous avons choisi la seconde option. Les premiers résultats des remontées académiques nous laissent à penser qu’il y a une demande forte des enseignants à enseigner les vecteurs en seconde. Si cette tendance est confirmée, nous nous plierons — à regret, je dois dire — à cette demande.

Les trois thèmes d’étude proposés sont, pour certains, des nouveautés pour beaucoup d’enseignants de Seconde : quels dispositifs peuvent être mis en place pour les aider à se les approprier, avant la rentrée 2009 ou en début d’année, en l’absence de manuels ? Quelles sont les orientations qui ont guidé l’Inspection dans le choix des trois thèmes d’étude retenus pour le projet ?

Sur les trois thèmes d’études seul le premier (cryptologie et codage) est nouveau. Il est à destination des enseignants qui aiment bien aborder des problèmes nouveaux et innover.

Le contenu du thème « phénomènes d’évolution » est connu de tous les enseignants de lycée » et ne devrait poser aucun problème. Quant aux « utilisations de la théorie des graphes », elles font l’objet d’un enseignement en spécialité mathématique de terminale ES : il y a donc au moins un professeur par lycée qui connaît les contenus.

Sur les thèmes d’étude comme sur toutes les parties nouvelles dans les contenus (probabilités et statistiques, algorithmique, notations et raisonnement) ou dans l’esprit (fonctions), nous mettrons à la disposition des enseignants avant la fin juin des documents ressources qui sont en cours d’élaboration et seront finalisés une fois connu le programme.

Des notions d’algorithmique sont introduites dans le projet. Elles confortent une orientation apparue déjà, de-ci de-là, dans les programmes de plusieurs classes dès 2000. Quels sont les objectifs de cet enseignement ? Il avait, semble-t-il, été question qu’un enseignement de l’informatique comme nouvelle discipline soit un des éléments de la réforme du Lycée. Cette annonce en avait surpris plus d’un, car la création d’une discipline informatique est un « serpent de mer » depuis plusieurs décennies. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est de ce projet et de son articulation avec l’enseignement de l’algorithmique dans le cadre des enseignements de Mathématiques ?

Nous pensons que la démarche algorithmique, par la rigueur qu’elle nécessite, son caractère auto-évaluant (ça marche ou ça ne marche pas) et la simplicité des outils mis en œuvre (à un niveau élémentaire) est une pratique efficace pour la formation au raisonnement et peut être décisive pour certains élèves, en délicatesse avec l’expression écrite traditionnelle.

L’introduction d’une utilisation de l’algorithmique en mathématiques a pour premier but de remédier à un retard dans l’enseignement français des mathématiques. La démarche algorithmique, essentielle dans la pratique des mathématiques mais, en dehors du programme de spécialité en terminale L où elle est explicitée, elle figure depuis des années dans différents programmes de mathématiques seulement dans les textes d’introduction et non dans les contenus (exemples : programmes de la série S de 2001, programmes de STI de 1993) et de ce fait n’était pas exigible. Nous souhaitons clairement que cette démarche soit intégrée à la pratique de tous les enseignants. La pratique d’une démarche algorithmique sera poursuivie en première et terminale.

Pour ce qui concerne la réforme du lycée, je n’ai aucune indication sur ce qu’elle sera et sur le maintien ou non d’un module « informatique et société numérique » qui rappelons-le n’est pas si surprenant car il correspond à un engagement du candidat Sarkozy. Si un tel module est rétabli, il sera vraisemblablement suivi d’enseignements de l’informatique en 1re et terminale. Il sera alors temps de voir comment l’articuler avec la démarche pratiquée en mathématiques, mais je peux garantir que nous le ferons.

L’épreuve pratique expérimentale de TS va être interrompue, en l’attente d’une refonte du Baccalauréat, au plus tôt en 2013. Pouvez-vous proposer des éléments de bilan de ce travail, amorcé il y a trois ans ? Avez-vous des projets pour pérenniser les aspects positifs qu’a eu ce dispositif sur le fonctionnement des équipes d’établissement et la généralisation de l’usage des TICE dans l’enseignement des Mathématiques, en particulier via l’écriture des futurs programmes ?

Comme vous le savez, cette épreuve n’en a jamais été une et est restée expérimentale. Il est clair qu’il n’y aura aucune modification des épreuves du baccalauréat avant l’aboutissement de la réforme du lycée, au plus tôt pour la session 2013.

Nous avons maintenant une banque d’exercices de terminale S pour cette épreuve de 75 sujets environ. Cette banque servira dans les années qui viennent pour les professeurs de terminale S qui souhaitent continuer à pratiquer une épreuve de ce type, à titre expérimental. Ces professeurs seront accompagnés par les IA-IPR de mathématiques dans les académies.

Nous allons profiter du délai qui nous est imposé avant une mise en place officielle pour conduire une expérimentation d’épreuves de travaux pratiques sur tous les niveaux du lycée. Ainsi, à la rentrée prochaine, nous travaillerons plus particulièrement sur la classe de seconde, comme d’ailleurs certaines académies ont commencé à le faire.

Jacques Moisan

Doyen du groupe des mathématiques de l’inspection générale de l’éducation nationale

Entretien Didier Missenard

Liens :

L’inspection générale de maths

http://igmaths.net

Dans le Café, le projet de programme en seconde

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/sciences/m[…]

Le projet de programme, sur Eduscol

http://eduscol.education.fr/D0015/consult_Maths.htm

Dans l’Expresso du 23 mars, la mise au point de J. Moisan à propos du lien entre réforme et nouveau programme

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2009/03/2[…]

Le courrier de J-P. Kahane au comité scientifique des Irems

http://www.univ-irem.fr/IMG/pdf/JPKahane-Commentaires-Proj[…]