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Par Jean-Pierre Gallerand

Qu’apportent les jeux sérieux en classe ? Le moment du retour d’expériences est arrivé mercredi 23 novembre au Salon Educatice où le Café organisait une table ronde. Autour de la table les éditeurs de nouveaux jeux sérieux soutenus par un appel à projet gouvernemental et des enseignants qui ont expérimenté dans leur classe les premiers jeux sérieux.

Devant une salle comble, la table ronde qui réunit Pradeepa Thomas (académie de Créteil), Brigitte Redon, Frédéric Doumier, Julien Llanas et Idriss Aberkane, a apporté un éclairage passionnant et très instructif sur les jeux sérieux et leur intégration progressive dans l’enseignement. Ces jeux sortent d’une utilisation marginale, ils se développent avec de nouveaux produits et les premiers retours d’expériences sont plutôt positifs. « Il faut ludifier notre enseignement » a répété plusieurs fois Idriss Aberkane, cogniticien. « Si nous n’apprenons pas en jouant nous n’apprendrons plus ».

A quelles conditions le jeu sérieux peut il pousser la porte de la classe ?

Pradeepa Thomas a accompagné l’utilisation du jeu sérieux Ludiville en BTS Banque. Elle a participé en tant qu’expert pédagogique au « détournement » de ce jeu utilisé par une banque pour former les nouveaux conseillers clientèle. Dans ce jeu, les élèves expérimentent des situations réalistes de crédit bancaire. Pour Pradeepa, les étudiants ont été motivés par cette activité ludique et interactive. Leurs connaissances semblent plus précises que dans un cours « traditionnel ». Mais l’enseignant doit s’approprier le jeu avant les élèves, bien l’intégrer dans sa progression et gérer correctement la remédiation.

Julien Llanas, chargé de mission Prospective de l’académie de Créteil, présente les projets d’une académie particulièrement active dans le domaine du jeu sérieux. Avec Edugame challenge, elle propose un concours qui a pour objectif de développer la culture du jeu vidéo, de faire découvrir son industrie et de développer l’appétence pour le travail collaboratif et la créativité. L’académie participe à Edugame Lab, une plateforme d’échange réunissant six pays et douze partenaires. Enfin Edugame base est une base de données descriptive sur les jeux. Pour Julien Llanas, pour une bonne intégration des jeux dans l’univers scolaire, il faut d’abord que l’enseignant ait une bonne compréhension de la ressource. Il faut également s’assurer de la concordance entre la ressource, le contexte pédagogique et la durée des différentes étapes qui doivent « tenir » dans un cours. Le jeu doit permettre également le suivi de l’apprenant et son niveau doit être adaptable en fonction des élèves.

Quels jeux seront proposés prochainement aux enseignants ?

Deux jeux sont présentés, Kompany un jeu de rôle sur l’entreprise et Star Teacher, une plateforme ludique d’apprentissage et de pratique orale de l’anglais.

Frédéric Doumic de la société Ouat Entertainment, fait découvrir Kompany, un jeu sur Facebook qui apprend à gérer et développer une entreprise virtuelle. Ce jeux souhaité par un IPR de Poitiers a été réalisé sans financement académique mais avec l’aide d’entreprises comme EDF qui y jouent leur propre rôle. Le jeu, qui sortira début 2012, ambitionne un million de joueurs. Très addictif, il permet à chaque joueur de progresser à son rythme.

Brigitte Redon nous présente Star Teacher qui sera commercialisé fin 2012. Cette plateforme est le fruit du travail de trois sociétés Wizar Box, Voxler et Itop. Ce jeu n’est pas prévu pour être utilisé en autonomie mais dans le cadre d’un cours avec l’accompagnement de l’enseignant. Une mission finale est proposée aux élèves, comme jouer une scène dans un restaurant. Le logiciel permet de la préparer à partir de séquences courtes de films où le joueur répond à des questions de compréhension par écrit ou oralement. Un moteur de reconnaissance vocale et un moteur d’analyse de la prononciation permettent l’évaluation et la progression des joueurs.

Quelle efficacité pour le jeu ?

Pour terminer cette table ronde Idriss Aberkane, expert en neuroscience cognitive présente Salomon un projet de jeu sérieux sur la philosophie. Des activités « sérieuses » sont proposées aux élèves mais dans un cadre ludique. Les jeunes travaillent et sont évalués en groupes et progressent par étape. Idriss Aberkane milite pour le jeu en éducation : il permet une meilleure acquisition des connaissances et des compétences car il dégage du plaisir or « il ne faut pas avoir honte d’avoir du plaisir à apprendre ». Pour lui, le jeu ne doit pas être une béquille pour les élèves en difficulté. C’est l’enseignement qui doit être ludifié. En effet, le jeu mobilise la mémoire épisodique, ce qui explique que les connaissances et compétences acquises au cours d’un jeu sont acquises durablement. Autre point sur lequel Idriss Aberkan a insisté, la connaissance doit être collégiale, il faut faire travailler les élèves en groupes et l’enseignant est le maître du jeu, le médiateur, ce n’est plus celui qui distribue la connaissance.

L’intégration du jeu en éducation lui semble « naturelle » car conforme à ce qu’on sait du cerveau des mammifères. Mais elle passerait par une sorte de révolution pédagogique et culturelle.

Jean-Pierre Gallerand

Pour en savoir plus :

Les nouveaux jeux sérieux arrivent

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/04/06serieux.aspx

Les jeux sérieux ont-ils un avenir à l’Ecole ?

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/04/[…]

Dossier : Enseigner avec le jeu ?

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/laclasse/Page[…]

Les jeux sérieux permettent-ils d’apprendre ?

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/04[…]

Les conférences d’Educatice

http://www.educatec-educatice.com/animations_30_396_418_p.html