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Quel bilan budgétaire peut-on faire du quinquennat Sarkozy ? Incontestablement c’est celui d’un recul des dépenses d’éducation dans le budget et dans le PIB français. Cinq années de vaches maigres matérialisées par des suppressions de postes pas seulement massives mais aussi mal ciblées.

Repères

La dépense intérieure d’éducation : L’effort national pour les dépenses d’éducation représentait 132 milliards en 2009, soit 6,9% du PIB. L’Etat en assure 57%, les collectivités locales 25%, les ménages 11% et les entreprises 7% (essentiellement dans le professionnel et technologique). La part de l’éducation nationale en 2009 représentait 52 %.

Les évolutions : La dépense intérieure d’éducation n’a cessé de diminuer dans le PIB national. Depuis 1998, elle a perdu 1 point de PIB. La part de l’Etat est passée de 61% en 2000 à 57% en 2009, celle de l’Education nationale de 56 à 52%. Les collectivités locales finançaient 22% de la dépense en 2000. C’est maintenant 25%.

Le budget de l’éducation nationale a reculé en termes réels depuis 2008. Le budget de la mission enseignement scolaire est passé de 59 milliards en 2008 à 61,6 en 2010 et 61,8 en 2011 soit une hausse de 0,3%. Autrement dit son évolution est moins rapide que l’inflation.

Le collégien, grand perdant du quinquennat. Vu du côté des élèves. Que représentent ces évolutions pour les élèves ? La dépense moyenne par écolier est passée de 5630 euros en 2007 à 5690 en 2009. Pour un lycéen, l’évaolution est de 10 710 à 11 400 euros. Pour un étudiant, la dépense moyenne est de 10670 euros en 2007 et 11260 en 2009. Par contre la dépense moyenne pour un collégien est passée de 8 230 euros en 2005 à 8130 en 2007 et 8020 en 2009.

L’évolution du nombre des enseignants. Selon les statistiques ministérielles , le nombre d’enseignants n’a cessé de diminuer durant le quinquennat aussi bien au primaire que dans le secondaire. Dans le premier degré on est passé de 338 000 enseignants en 2006 à 331 000 alors que le nombre d’enfants scolarisés du CP au CM2 est passé de 3,9 millions à 4,1. On n’a pas retenu les chiffres du préélémentaire puisque celui-ci est ajusté par l’Etat pour faire face au déficit d’enseignants. Dans le second degré, il y avait 383 000 enseignants en 2006. Il n’y en a plus que 349 000 en 2011. Entre temps le nombre d’élèves est passé de 5 485 000 à 5 353 000.

Comment situer cela par rapport aux autres pays ? C’est un rapport du Centre d’analyse stratégique, un organe gouvernemental, et l’édition annuelle des Regards sur l’éducation de l’OCDE qui fournissent les meilleures comparaisons internationales.

En terme de nombre total d’emplois (public et privé) pour mille habitants, la France n’a pas de quoi faire la bonne élève puisqu’elle figure dans la seconde moitié de la classe. Fait aggravant, alors que la plupart des pays (sauf l’Italie) tentent d’augmenter leur nombre d’enseignants, la France est à la baisse alors que, rappelons-le, son taux de natalité est un des plus hauts des pays occidentaux.

le nombre de postes pour 100 élèves est, là aussi, bien bas : avec un peu plus de six postes d’enseignants pour cent élèves ou étudiants, la France « régresse dans la hiérarchie » comme l’indique avec euphémisme le rapport…

Mais c’est quand on observe les écarts de situations entre les différents degrés que la situation est la plus saisissante : la France traite particulièrement mal le primaire et le supérieur (ci-dessous). Le nombre de postes pour 100 élèves est en France un des plus faibles des pays observés, avec 5 enseignant pour 100 élèves, alors que le nombre oscille entre 6 et 10 dans la plupart des pays… Un enseignant de plus pour 5 classes, voilà qui ravirait bien des équipes enseignantes confrontées à de multiples difficultés quotidiennes, et qui leur permettrait d’envisager totalement différemment la prise en charge des situations d’apprentissages.

Concernant le salaire des enseignants, le rapport se livre à un comparatif intéressant en rapportant le salaire des enseignants à la richesse du pays (mesurée par le PIB par habitant). Moralité : la France fait bien peu d’effort pour ses enseignants…

Sources

Rapport du CAS

http://www.strategie.gouv.fr/article.php3?id_article=1356

RERS 2011

http://media.education.gouv.fr/file/2011/01/4/DEPP-RERS-2011_190014.pdf

Regards sur l’éducation

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2011_09Reg[…]

Comment la pression budgétaire détruit les objectifs des réformes

Luc Chatel serait-il capable de parler d’individualisation de l’enseignement, de lutte contre les inégalités et d’agir en sens contraire ? C’est ce que le SNPDEN démontre à l’aide d’un enquête menée en mars dernier auprès de 1500 établissements secondaires. “Pas de grand complot ministériel” prévient Philippe Tournier, secrétaire général. Juste une contradiction entre l’esprit des réformes et les réalités budgétaires.

“Personne ne s’intéresse trop à ce que nous sommes contraints d’arbitrer pour assurer une rentrée techniquement réussi”, affirme P Tournier. “Cette opacité silencieuse satisfait tout à fait le ministère”, mais le Snpden entend lever le voile. “Au moment où on nous farcit la tête d’une propagande tapageuse peuplée d’accompagnement personnalisé et d’autres dispositifs individualisés, la réalité crue c’est que ce sont les dispositifs qualitatifs que le sretraits d’emplois nous contraignent à liquider” avertit-il.

Du new management chatelien à l’accroissement des disparités. Syndicat de chefs d’établissements, le Snpden est bien placé pour observer la façon dont les contraintes budgétaires sont gérées sur le terrain. Luc CHatel a vanté son nouveau management des économies à réaliser au plus près du terrain. Il a promis qu’il permettrait de lier meilleure gestion et égalité. L’enquête du Snpden montre qu’au contraire les disparités se sont accrues. La baisse moyenne de 0,6% de la DHG est amortie différemment dans les académies. Dans certains cas (16%), les établissements ne savent même pas comment la gestion s’opère, signe d’une dégradation de la relation avec les académies.

Entrons grâce au Snpden dans la cuisine des établissements. Quels moyens utilisent-ils face aux suppressions de postes ? Ils limitent le nombre de cours à effectifs réduits (33% des établissements mais 51% des L.P.). Ils suppriment les actions de remédiations (27% mais 31% des collèges). Ils abandonnent les projets éducatifs (21% mais 47% des lycées généraux). Ils effectuent des regroupements pédagogiques artificiels. Le nouvel accompagnement personnalisé devient une variable d’ajustement pour un gros tiers des établissements.

Prendre plus à ceux qui ont moins. La conséquence c’est selon le Snpden l’aggravation des inégalités sociales dans le système éducatif. “Ce sont les établissements les plus exposés qui sont les plus touchés”, explique le Snpden. “Non point du fait de quelque noir dessein. Mais pour une raison fort logique : dans un système rigidifié par des normes, les retraits de moyens se font en priorité là où des moyens supplémentaires avaient été mis”. Les exigences budgétaires frappent donc plus fort les plus faibles. Elles travaillent contre l’individualisation vantée par le ministre.

Une enquête indispensable. Le travail du Snpden plombe le discours présidentiel sur l’égalité des chances. Alors que Luc Chatel s’apprête à publier un ouvrage réalisé avec le très “républicain” Chevènement, elle montre la distance entre les sourires et les mots et la nudité des décisions. Elle conforte l’idée que les qualités communicationnelles du ministre cachent la réalité. Nul doute que Luc Chatel soit interpelé dans les jours à venir sur ces questions.

L’enquête du Snpden

http://www.snpden.net/sites/default/files/files/Enq[…]

501 témoignages de chefs d’établissement

http://www.snpden.net/sites/default/files/files/resultats_enque[…]

Editorial de P Tournier

http://new.snpden.net/direction/pdf191/06_07-rentreetechniqueme[…]

En éducation comme ailleurs l’argent ne suffit pas à faire le bonheur

Quand l’OCDE nous dit, comme dans le 13ème numéro de Pisa in Focus, que “de plus grandes dépenses en éducation ne garantissent pas de meilleures performances chez les élèves”, ça mérite d’y aller voir de près.

Pour l’OCDE au-delà de 20 000 $ par habitant, le PNB n’a pas un impact déterminant sur l’éducation. L’Organisation définit une tendance nettement ascendante entre le PNB et les performances en lecture des élèves de 15 ans. A première vue plus un pays a un PNB important meilleures sont ses performances jusqu’à 20 000$. Au delà la courbe se casse et devient plate comme si le passage de 20 000 à 40 ou 60000 n’avait pas d’effet. “Au delà de 20 000 $, la richesse produite n’est plus un prédicteur des la performance du pays dans Pisa”, écrit l’Ocde. Au delà de 35 000 $ de dépense éducative, et non plus de PIB, “la dépense n’est plus corrélée au niveau dans Pisa” précise l’Ocde. D’où l’idée que l’investissement éducatif, les moyens, ne comptent que pour les pays pauvres et moins dans les pays riches.


Si cette loi s’avère en gros exacte, en détail les propres graphiques de l’OCDE montrent que c’est plus complexe. Dans les pays pauvres où le PIB devrait etre lié au niveau, on des pays à PNB identique comme la Serbie (près de 430) et le Panama (moins de 375) avoir des résultats extrêmement différents. La même observation peut être faite entre la Thaïlande, ou même Shanghai et l’Azerbaidjan. D’une certaine façon l’échelle du graphique nourrit la courbe tendancielle puisque les écarts entre les pays du premier groupe sont écrasés.

Qu’en est-il pour les pays riches ? Effectivement le plus riche, Luxembourg, celui qui dépense le plus, a les mêmes performances que la Turquie. La France dépense à peu près autant pour chaque élève que la Finlande, bien meilleure, ou l’Espagne, moins bonne. Et la Pologne fait mieux que nous avec moitié moins de dépenses. Les choix de gestion ont donc leur importance.

Et l’OCDE propose quelques critères qui expliquent les écarts. “Les pays qui ont de bonnes performances dans PISA attirent les meilleurs étudiants dans l’enseignement en leur offrant de hauts salaires et un statut attractif”. D’autres critères ? Les pays qui font redoubler ont de moins bons résultats que ceux où le redoublement est faible. Les pays qui trient les élèves et mettent à l’écart les faibles aussi de la même façon que ceux qui font des classes de niveau. En fait ce que nous explique l’OCDE c’est que ce sont les pays qui croient en l’éducabilité de tous les jeunes qui ont de bons résultats.


Payer les profs, rendre leur métier attractif, éviter redoublement et sélection précoce chez les élèves, lutter contre les inégalités entre établissements, c’est le contraire de ce qu’ont fait les ministres français depuis 10 ans. Voilà des objectifs pour notre système éducatif. Et des observations à faire dans les programmes éducatifs des candidats. Parce que là aussi il n’y a pas photo.

Pisa in Focus n°13

http://www.oecd.org/document/45/0,3746,en_32[..]

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