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Par François Jarraud

Peut-on former à tout avec des jeux sérieux ? Le dernier Forum organisé par Daesign, un célèbre concepteur de jeux sérieux, montre une évolution des jeux vers une formation au savoir-être, une capacité qui intéresse de plus en plus les entreprises. Daesign a par exemple montré deux nouveaux jeux particulièrement novateurs sur la gestion du stress et sur les compétences cognitives des cadres. Ces nouveaux outils reposent la question des usages des jeux sérieux pour la formation des enseignants et des élèves.

Alors que la génération des Digital Natives baigne dans l’univers des jeux vidéo, leur utilisation pénètre rapidement celui de la formation professionnelle, ne serait ce que grâce aux économies qu’ils permettent en terme de coûts de formation. Daesign, un des éditeurs phares sur ce créneau, propose des outils de formation de commerciaux ou de managers qui ont fait leurs preuves. A l’occasion de son Forum annuel, le 6 avril, Daesign a montré de nouveaux produits qui attaquent maintenant le savoir être et le développement personnel.

Peut-on enseigner une discipline traditionnelle avec le jeu sérieux ? C’est ce que fait Michelin avec « Anti Trust Mission », un jeu de formation au droit commercial. Les commerciaux du groupe apprennent les limites légales des propositions commerciales et comment faire face au concurrent habile à exploiter les failles du droit de la concurrence. Le jeu immerge les commerciaux dans des situations réelles avec le seul risque d’un « game over »…

Plus novateur, le jeu Misivias, présenté par Cédric Ohanessian d’Arnava, propose aux entreprises une véritable évaluation des compétences de leurs cadres. Le jeu les amène à simuler la gestion du personnel d’une entreprise. Il évalue leur résistance attentionnelle, leur capacité d’analyse de dossiers, les prises de décision. Au final il restitue une véritable évaluation des compétences qui va au-delà des savoirs purs ou des tests classiques de personnalité puisque les joueurs ont été mis face à des situations. Le rapport final d’évaluation est riche et précis. Il constitue une base de discussion avec le salarié (ou le futur cadre) qui éclaire les uns et les autres.

Franck Jullien, de l’entreprise Comenius, a présenté un nouveau jeu développé avec Daesign pour un grand groupe bancaire qui porte sur la gestion du stress. Ce jeu de rôle invite à endosser un personnage qui devra faire face à des demandes stressantes au sein d’une équipe de travail. Le joueur doit réagir et prendre sa place dans l’équipe. Il peut aussi entendre ce que les autres membres de l’équipe pensent de ses réactions. Au final, le jeu permet de mieux comprendre ses propres réactions au stress, celles des autres et le fonctionnement d’un groupe. On a là un véritable outil de développement personnel extrêmement intéressant et, contrairement au précédent, dépourvu de jugement et de conséquences sur sa carrière. Proposé librement aux 7000 salariés du groupe, en 6 mois il a déjà été utilisé par plus de 2000 personnels.

S’ils sont conçus pour la formation professionnelle continue, les jeux sérieux ont aussi une efficacité en formation initiale. C’est ce qu’a rappelé Hélène Michel (Grenoble Ecole de Management) à propos d’un jeu de gestion de clientèle développé avec Daesign pour une école de commerce. Il simule des contacts avec des clients et permet d’évaluer les réactions des étudiants. L’évaluation montre que les étudiants qui n’ont aucune expérience en entreprise tirent peu de profit du jeu car ils le vivent comme un simple jeu vidéo. Par contre ceux qui ont cette expérience, même courte, en saisissent immédiatement les apports. Pour Hélène Michel, c’est toute la différence entre la simulation et le simulacre.

Et l’Education nationale ? Les jeux sérieux ont des atouts économiques comme la réduction des coûts de formation puisque la part du présentiel diminue voire disparaît. Ils en ont d’autres. Les utilisateurs soulignent la motivation des apprenants. Ainsi 100% des joueurs de Misivias vont au bout de la formation, ce qui est loin d’être le cas avec les outils classiques de formation à distance. Ils permettent de travailler des compétences que l’on a bien du mal à développer face à 200 étudiants ou même 30 élèves comme la gestion du stress ou le savoir être face à des clients ou des subordonnés. Ainsi aux Etats-Unis, deux jeux sérieux servent à la formation des enseignants à la gestion du groupe classe. Avec « Mon APB », un outil de formation à l’orientation post bac développé par l’Onisep, l’Education nationale teste depuis quelques mois son premier jeu sérieux.

François Jarraud

Liens :

Mon APB : Le premier jeu sérieux de l’Education nationale

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2012/01/09012[…]

Des jeux sérieux pour la formation des enseignants

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lesysteme/Pages/201[…]

Jeux sérieux : Retour d’expériences

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/20[…]

Des jeux annoncés pour l’Education nationale

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/11/[…]

Entretien avec H Michel

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2011/rentree_11[…]

Un compte-rendu du Café

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/04/06ser[…]

Dossier Enseigner avec le jeu

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/laclasse/Pages/93_Dos[…]

Le jeu sérieux une vieille idée (J Alvarez)

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2009/05/Jeuseri[…]