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Par Jean-Louis Auduc

L’architecture scolaire influe sur les usages. Or elle ignore les usages des jeunes et les pratiques des enseignants du XXIème siècle.

Lorsqu’on visite des établissements scolaires, écoles, collèges, lycées, même construits récemment, on est surpris que l’organisation de l’espace au-delà de modifications de façades reste très marqué par un modèle éducatif qui n’a plus cours aujourd’hui et cela quelque soit la couleur politique du décideur.

Depuis plus de vingt-ans, les textes réglementaires (lois ou décrets ) évoquent la nécessaire rentrée des parents dans l’école. Comment de constructions récentes ont prévu un espace pour éviter que les parents ne soient reçus dans un couloir ? Combien d’établissements ont prévu une salle pour les parents notamment pour leur permettre de ne pas être reçus dans la classe où ils se retrouvent en situation d’élèves, ce qui ne favorise pas le dialogue ?

Depuis une vingtaine d’années, on évoque le travail en petits groupes, les nécessaires moments de « remédiations », « d’aide personnalisée », « d’accompagnement personnalisée ». Combien de constructions, de rénovations récentes ont prévu hors des structures classes pour de trente à quarante élèves, un certain nombre de petites salles pour du travail dans des groupes restreints, pour que l’accompagnement personnalisée puisse réellement prendre tout son sens ? On en est le plus souvent resté à une structure où la classe est l’unique vecteur de transmission et où à part le CDI, aucun autre espace n’est prévu.

De nombreux politiques évoquent depuis plusieurs années la nécessité que les enseignants soient plus présents dans les établissements scolaires de tous niveaux. Les mêmes, lorsqu’ils ont à construire une école, un collège, un lycée, ne prévoit aucun espace individualisé comme cela existe dans d’autres pays pour que les enseignants puissent tranquillement préparer leurs cours , remplir leurs bulletins ailleurs que dans la salle des professeurs surchargées et bruyantes, recevoir des élèves ou des parents pour un entretien.

Il y a là un grand écart insupportable entre les finalités des réformes mise en œuvre ou désirées pour l’école et l’organisation architecturale actuelle des établissements scolaires de tous les niveaux. L’architecture scolaire n’est pas la cinquième roue du carrosse de la mise en place de pédagogies différentes, d’innovations permettant une meilleure prise en compte pour plus d’ambition de la diversité des élèves, elle en est souvent une des conditions.

Un tel écart ne semble pas exclusif à la France, puisque Michel Serres dans un entretien au journal Le Monde du 13 avril 2012 évoque dans le domaine de l’éducation « à quel point les vieilles recettes sont encore d’actualité » et argumente son propos par rapport au retard de l’architecture universitaire aux Etats-Unis par rapport aux enjeux pédagogiques : « Même l’université de Stanford dans laquelle j’enseigne et qui bénéficie des apports philanthropiques de Bill Gates construit des nouveaux locaux calqués sur l’architecture précédente, c’est-à-dire conforme à l’ancien esprit pédagogique avec ses grands amphithéâtres pour ces cours magistraux…Or, il faudrait partir de la nouvelle donne générationnelle et du nouveau rapport aux connaissances »

Il est donc plus que jamais nécessaire d’avoir une réflexion de fond sur l’architecture scolaire. C’est un enjeu décisif pour l’amélioration des conditions de travail des personnels comme des élèves. Il s’agit dans ce domaine, non seulement de permettre du travail avec des effectifs diminués pour certaines heures, de meilleures rythmes de fonctionnement des établissements, mais également d’engager une réflexion avec les régions, les départements, les communes concernant l’architecture scolaire, un des éléments essentiels du bien-vivre son travail dans un établissement adapté à tous ses acteurs, lieu non seulement d’apprentissage , mais de bien-être et d’épanouissement..

Pourquoi ne pas prévoir d’organiser dès l’automne 2012 un grand concours national sur une « architecture scolaire adaptée aux jeunes du XXIe siècle » à l’image de ce qui avait été organisé pour le « Grand Paris ». On pourrait d’ailleurs y associer les différentes écoles d’architecture existantes.

Suite à cette initiative, il y a urgence à mettre en place avec les collectivités territoriales un plan pluriannuel de mise en place de bureaux pour les enseignants, d’ordinateurs personnels dans l’établissement et de salles pour recevoir les élèves et leurs parents, leur permettre de se rencontrer, favoriser le travail en petits groups, est indispensable pour développer une école de la réussite pour tous et pour chacun et construire une véritable communauté éducative.

Jean-Louis Auduc

Liens :

Apprendre avec l’architecture

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/laclasse/Pages/20[…]

Architecture et réussite éducative

http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/laclasse/Pages/20[…]

La meilleure école du monde

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2012/03/22032[…]

Investir et rénover

http://www.cafepedagogique.net/regionales/Pages/idf22_Sommaire.aspx

Constuis moi un lycée

http://www.cafepedagogique.net/regionales/Francilien/Pages/0[…]

Ecorégion et bâtiments scolaires

http://www.cafepedagogique.net/regionales/Francilien/Page[…]