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Quand la Cour des comptes épluche le budget de l’Education nationale elle met en évidence la gestion très particulière de Luc Chatel. Entre autre son souci d’aller au delà des réductions de postes demandées par la présidence au point d’après la Cour de ne plus avoir les moyens de sa mission.

Le rapport « Résultats et gestion budgétaire 2011 » de la Cour des comptes analyse en détail la comptabilité de l’éducation nationale. Elle nous fait passer dans la cuisine gouvernementale, là où se prennent les décisions et les arbitrages de gestion.


La règle des 1/2 pas respectée

Première surprise : Luc Chatel est allé au-delà des exigences gouvernementales de suppressions de postes. On lui demandait de supprimer 16 000 postes en 2011. Il en a fait disparaitre 16 811. Il est allé au-delà de la règle du 1/2 pour les départs en retraite puisqu’il y a eu 32 720 départs en retraite sur cette année. Au primaire ce sont 8635 postes qui disparaissent pour 9730 départs en retraite : on est près du 1/1 ! Dans le secondaire 6296 pour 16785 on est plus près de 1/3.


Le privé favorisé


Si on regarde en détail l’évolution de l’emploi par rapport aux exigences de la loi de finances, on s’aperçoit que dans le primaire il a radié 8635 emplois quand on lui en demandait 8967. Par contre dans le secondaire 6296 postes ont disparu pour 5 000 demandés. La surprise vient du privé. Luc Chatel aurait du supprimer 1633 emplois. Il n’en a radié que 1416.


Une mauvaise gestion


Plusieurs faits lui ont facilité la tâche. Ainsi le rapport souligne une sous-consommation d’emplois parce que les stages étudiants des futurs enseignants ont été moins nombreux que prévu.  » Cette importante économie involontaire s’explique par les difficultés de coordination en 2011 entre les universités et les rectorats et par le fait que les universités ont généralement choisi des durées de stage moindres que celles souhaitées par les ministères, potentiels employeurs de ces étudiants, ce qui n’est pas sans poser question sur la qualité de la formation initiale professionnelle des futurs enseignants », écrit la Cour. Le ministère s’est trouvé impuissant à faire fonctionner correctement le programme Eclair d’enseignement prioritaire. 19 millions ont été économisés faute de trouver des préfets des études en nombre suffisant.


La montée des heures supplémentaires


D. Mignaud président de la Cour des Comptes - Photo CPLa Cour s’inquiète du recours massif aux heures supplémentaires.  » Le recours de plus en plus important aux heures supplémentaires par le ministère de l’éducation nationale1s’explique en partie par les difficultés rencontrées dans certains établissements pour pourvoir la totalité des enseignements par des enseignants payés sur heures postes ou sur blocs de moyens provisoires, mode habituel de rémunération des professeurs », écrit la Cour.  » Ce recours aux heures supplémentaires permet en partie d’afficher des réductions d’effectifs en en limitant l’impact à court terme sur le terrain. Il pèse en revanche évidemment sur la dépense totale. Il est aussi un révélateur de l’inadéquation entre l’offre de formation prévue et la réalité des moyens disponibles, compte tenu du mode de gestion actuel des enseignants.. »


Petites tricheries


Si globalement la Cour juge que la présentation des comptes ne permet pas d’apprécier l’efficacité de la mission enseignement comme le voudrait la LOLF, elle signale également la valse des indicateurs organisée par Luc Chatel. « Les cibles de certains objectifs ont été baissées entre 2009 et 2011, l’écart avec les résultats constatés paraissant de ce fait moindre », note la Cour qui donne des exemples : proportion d’élèves maîtrisant en fin d’école primaire les compétences de base en français – de 95 à 93,5 %- ; taux d’accès au brevet –de 84 à 81 %- ; taux d’accès à un bac général ou technologique des élèves de seconde GT. « Il en va de même pour l’indicateur « nombre d’académies bénéficiant d’une dotation globale équilibrée » du programme 230, dont la cible a constamment diminué jusqu’au PAP 2012 ».


Une gestion au jour le jour


 » Les dépenses ont été contenues au niveau de l’autorisation en Loi de Finances (LFI). Cela est dû principalement à des économies non reproductibles sur les départs en retraite, à des retards ou à des mauvaises évaluations de dépenses sur la mise en oeuvre de dispositifs nouveaux (« masterisation », nouvelles primes de fonction). Dans le même temps, les heures supplémentaires ont continué d’augmenter, traduisant l’inadéquation croissante de l’offre de formation aux moyens humains alloués sur le terrain dans le cadre des procédures actuelles de gestion des personnels », écrit la Cour.  » L’effort de maîtrise des effectifs à programmes scolaires constants et à obligations de service des enseignants inchangées trouve là une limite financière importante ».


François Jarraud

Le rapport

La formation des enseignants épinglée par la Cour des comptes