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Une vraie réponse à une fausse question. Le ministère met en avant un dispositif anti fraude au bac. Et si la question était mal posée ?

Coqueluche des médias le responsable du programme de lutte anti fraude du ministère, Cyril Moreau a du développer devant la presse l’impressionnant dispositif anti fraude imaginé pour le bac. Après l’incident de la publication sur Internet en 2011 d’une question d’une épreuve de maths, le ministère a beaucoup communiqué sur cette question.

Un des derniers actes de Luc Chatel a été la signature du décret du 3 mai 2012 qui modifie la procédure disciplinaire à laquelle s’ exposent les fraudeurs. Elle est simplifiée et plus rapide. En même temps le ministère demande au auteurs de sujets de signer une charte de déontologie, sans que l’on sache vraiment si les signatures sont nombreuses. Enfin cette année le ministère met en place des équipes chargées de détecter les téléphones mobiles actifs dans l’établissement. Pour le ministère, tout a été fait pour lutter contre le fléau de la fraude.

Tout vraiment ? En fait il s’avère que la fraude est nettement moins fréquente que ce que l’on peut entendre. Selon le ministère, 400 cas ont été instruits en 2011 pour 700 000 candidats bacheliers. Dans la plupart des cas les fraudeurs ont écopé d’une peine avec sursis. Le cas de fraude le plus massif de 2011, celui du BTS NRC en Ile-de-France, résultait de la faiblesse de la surveillance classique lors de l’examen. Les candidats n’ont même pas eu à utiliser leur portable. Ils ont sorti leur manuel, leur cours ou recopié la copie du copain…

Mais cette fois ci encore, les nouvelles technologies adressent une bonne question à l’école. Quand la plupart des épreuves reposent sur la mémorisation simple et la restitution de connaissances, la tentation peut être forte de chercher sur Internet des informations ou d’utiliser la capacité de mémoire des appareils.

Mais Internet au bac, pourquoi pas ? « Quand vous faites un devoir à la maison vous avez accès à Internet. Donc pourquoi en priver les candidats au bac ? » C’est le raisonnement du ministère danois de l’éducation qui a testé ce dispositif avant une éventuelle généralisation. Les enseignants veilleront à ce que les candidats ne puissent pas tricher en dialoguant entre eux par exemple. Mais la mesure semble assez intéressante pour que le ministre danois la mette en place.

Que doit évaluer le bac ? Si le bac évalue des repères (dates, vocabulaire, définitions etc.) il doit aussi peser les compétences disciplinaires acquises par les candidats. On a vu ainsi se multiplier récemment des épreuves qui testent les capacités du candidat à maîtriser des savoir faire complexes. On peut citer les épreuves expérimentales scientifiques ou encore les TPE. Ces épreuves prennent aussi en compte de façon plus satisfaisante que les devoirs classiques les évolutions scientifiques des disciplines. Elles se rapprochent davantage de ce que sont les cultures disciplinaires réelles. Imaginons un instant ce que pourrait être l’épreuve de cartographie du bac avec un logiciel SIG… Mais l’initiative danoise a aussi l’intérêt d’accéder à un espace que l’Ecole a bien du mal à investir : celui des pratiques sociales des adolescents. Intégrer Internet c’est aussi faire un lien entre l’Ecole et la vie réelle des adolescents, tous « digital natives ».

Si la lutte contre la fraude est nécessaire, elle ne doit pas empêcher la réflexion sur les épreuves elles-mêmes. Sinon le réveil risque d’être difficile..

François Jarraud

Au Danemark