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Les régions veulent piloter les lycées et les CRDP. Réunis à Paris le 4 juillet, 12 présidents de conseils régionaux dont le président de l’Association des régions de France (ARF), Alain Rousset, ont présenté leur vision du nouvel acte de décentralisation promis par François Hollande. Ce nouveau partage des compétences ferait des régions les vrais pilotes des lycées, l’Etat gardant le pilotage pédagogique et la gestion des enseignants.

« On ne demande pas d’autres compétences que celles que l’on a déjà », explique Alain Rousset, président de l’ARF. « On dit simplement que leur aboutissement générera des économies ». C’est au nom d’une meilleure gestion que l’ARF revendique « un nouvel acte de décentralisation » qui ferait des régions les vrais patrons des lycées.

« Toutes les compétences qui nous ont été transférées dans le passé ont été mieux exercées… On ne peut continuer à être dans un système où il faut être 4 organismes pour prendre une décision. Il faut un chef de file ». Pour l’ARF, l’argument gestionnaire impose de « clarifier » le partage des compétences. Il faut dire que la loi de décentralisation a brouiller les cartes ce qui permet actuellement à l’Etat de garder la main mise et a l’Etat de garder un fonctionnement centralisé.

Les revendications de l’ARF

L’ARF parle de « décentralisation de stratégie plus que de gestion » c’est à dire qu’elle revendique le pilotage dans son champ de compétences. Cela va bien sur au delà des questions d’éducation. Mais dans ce champ, l’ARF souhaite que les régions deviennent chef de files des politiques d’orientation. D’ailleurs le seul transfert de personnels d’éducation que l’ARF demande c’est celui des personnels des CIO. « On est sensible aux questions d’orientation car on veut un haut niveau de réussite pour les jeunes » , a précisé A. Rousset au Café pédagogique. L’ARF souhaite aussi que les régions soient associées à la lutte contre le décrochage.

Les régions devraient également élaborer le plan régional des formations tout au long d ela vie en concertation avec les acteurs économiques et sociaux et les recteurs. La région élaborerait la carte des formations initiales tant en apprentissage que pour les formations qualifiantes en lycée. Elle serait associée à la sectorisation des lycées.

Au centre du dispositif, un nouvel organe de pilotage serait créé dans chaque région réunissant le président du conseil régional, le recteur, le président du PRES représentant l’enseignement supérieur, le président du CESER représentant les acteurs sociaux economiques. Ce nouvel organe signerait un contrat pluriannuel avec le rectorat ou la DRAAF. Au niveau national, le Conseil territorial de l’éducation nationale accorderait aux régions la majorité sur les questions de lycées.

La région au coeur de chaque lycée

Pou rl’ARF, au contrat entre chaque lycée et l’Etat se substituerait un contrat tripartite entre le rectorat, la région et le lycée. Ce « pacte éducatif » responsabiliserait les équipes éducatives et fixerait des objectifs et des moyens. L’objectif de pilotage des régions est confirmé par la demande de modification des conseils d’administration des lycées. Leur composition serait revue pour que la part des représentants de la région et du monde socio-économique soit plus forte. Le lien entre région et gestionnaire de l’établissement serait « approfondi ».

Les régions pilotes du numérique éducatif ?

L’ARF souhaite aussi donner un rôle de premier plan aux régiosn en matière de numérique éducatif. Elles souhaitent prendre en charge la maintenance du matériel numérique qu’elles financent actuellement, « sous réserve de compensation financière par l’Etat ». On sait qu’aujourd’hui cette question mal réglée est un des points de blocage pour l’intégration des TICE dans les enseignements. Mais l’ARF veut aller plus loin. La région serait « systématiquement associée à la définition des grandes orientations et des expérimentations menées par l’Education nationale et à leur déclinaison sur le plan régional par le rectorat, en lien avec le réseau CNDP ». Pour Alain Rousset, « on ne veut pas recréer des réseaux d’intelligence collective comme le CNDP, on les prend »…

Si le Parlement suit les régions, celles-ci seront bien les vraies pilotes des lycées et de la formation professionnelle. Elles s’impliqueront davantage sur le terrain pédagogique. La question des rapports avec l’Etat demeurera cependant puisque les personnels resteraient de statut national.

François Jarraud

Entretien avec François Bonneau

Interrogé par le Café pédagogique, François Bonneau, vice-président de l’ARF en charge de l’éducation, précise les souhaits de l’ARF.

Peut-on parler de régionalisation des lycées ?

C’est une reconnaissance de ce que font aujourd’hui les régions pour l’accueil dans les lycées à tous les niveaux, de ce qu’elles portent au niveau de la modernisation des lieux comme des équipements et c’est une reconnaissance de ce qu’elles portent comme accompagnement de l’acte éducatif. Nous voulons que tout cela soit pris en compte et que le rôle de partenaire de la région soit reconnu avec la signature d ‘une nouvelle convention entre la région et l’établissement comme il en existe une aujourd’hui entre l’Etat et l’établissement.

Pourquoi modifier le conseil d’administration des lycées ?

Il faut que le rôle que nous tenons au niveau financier dans les établissements soit plus concrètement représenté autour de la table du CA.

Quel avenir pour le CNDP ? Sa régionalisation ?

Il ne fait pas démanteler le CNDP mais que les réseaux fonctionnent mieux. Les CRDP comme animateurs pédagogiques sont insuffisamment valorisés. Nous pensons que par rapport au numérique, à l’innovation, leur rôle doit être modifié. On doit avoir une connexion plus quotidienne entre la ressource CRDP, l’innovation CRDP et la réalité de l’enseignant dans chaque établissement. Cela passe par le numérique et nous y travaillons. Cela passe par les réseaux, la mise en mouvement des acteurs. La pédagogie c’est et ça reste l’Etat. Mais notre rôle de porteurs de moyens adaptés aux nouvelles conditions de la pédagogie fait des régions des partenaires.

Propos recueillis par F. Jarraud