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Par J-C Fumet et F Jarraud

Droits et grands enjeux du monde contemporain : un nouvel enseignement en section L à la rentrée.

La réforme des lycées atteindra à la rentrée 2012 les classes de Terminale. Pour la section Littéraire, elle prévoit un nouvel enseignement de spécialité : droit et grands enjeux du monde contemporain, dont l’enseignement constituera une petite révolution dans cette filière traditionnellement dévolue à la philosophie (8h hebdomadaires). Apport bienvenu de connaissances précises dans le domaine juridique souvent méconnu des élèves ou instruction civique renforcée ? Cette nouvelle spécialité, qui a pour vocation de sensibiliser les élèves aux études juridiques, plus porteuses en termes d’intégration professionnelle que celles de sciences humaines, ne doit-elle pas « normaliser » une filière parfois jugée trop détachée des enjeux sociaux du monde réel ? Principaux concernés par cette nouvelle discipline, les professeurs de SES, d’éco-gestion ou d’histoire – les professeurs de philosophie n’en sont pas exclus, à condition d’être titulaires d’un diplôme de droit ou d’I.E.P – devront gérer avec tact un programme particulièrement ambitieux.


Les spécificités de ce nouvel enseignement.

Les questions au programme seront abordées telles que le droit les conçoit et les problématise, en vue de solutions juridiques spécifiques, c’est-à-dire dans la perspective d’un traitement selon la loi, ses méthodes, principes et ses traditions. Le but : une compréhension « réaliste » des questions qui traversent notre époque, à partir de cas concrets et dans le cadre d’une généralisation éclairante (selon une démarche présentée comme inductive, à l’inverse des cours de droit universitaires qui partent des lois pour analyser les cas). Par la découverte de métiers du droit, du site Légifrance, dédié à la publication des textes légaux, et du rôle général du droit dans l’organisation de la société, on devra donner à l’élève une vision fonctionnelle et pragmatique de ce domaine dont en général, il ignore tout.


Un contre-champ au cours de philosophie ?

L’enseignement de spécialité abordera les définitions fondamentales : la loi comme expression de la volonté générale, les principes de la légalité, la nécessité de la loi pour garantir les libertés, la responsabilité pénale, l’infraction et l’interdiction, etc., qui pouvaient jusqu’alors être évoqués en ECJS et en philosophie – cette dernière apportant sur ces questions une réflexion critique et distanciée. Ce nouvel enseignement pourrait donc apporter aux élèves les éléments de connaissance positive indispensables à l’élaboration d’une analyse réfléchie des questions abordées en philosophie et en nourrir utilement les développements. Mais la distance critique à l’égard des valeurs implicitement portées par le droit dans son exercice réel, demandera une vigilance particulière pour les enseignants : comment limiter l’adhésion indistincte aux normes admises, sans déstabiliser les contenus de connaissance exigées par le nouveau cours de droit ? Quand on sait combien les contenus positifs d’apprentissage ont la faveur des élèves, en raison du sentiment de sécurité qu’ils apportent, et combien le domaine législatif est empreint de traditions et de conventions entérinées par l’usage, que l’étude de la philosophie s’efforce d’éclairer dans leur relativité, on mesure la difficulté de l’harmonisation des approches.


Concepts juridiques versus notions philosophiques.

Lorsqu’il s’agira d’expliquer la souplesse du droit, dans son interprétation, son évolution, ou son application pondérée par l’appréciation des conditions particulières, les « revirements de la jurisprudence » ou les arcanes du droit contractuel, sans donner le sentiment d’un arbitraire opportuniste, mais en maintenant l’attention sur le caractère discutable et révisable des décisions rendues, on conçoit à la fois l’importance d’une conceptualisation philosophique de ces questions et le risque d’alourdissement des contenus déjà vastes prévus par le programme. Les thématiques de la responsabilité, de la personnalité, du droit du travail, de la propriété ou du vivant, recoupent également certaines problématiques induites par le programme de notions de philosophie. Mais d’autres points du programme, comme le droit de la famille, risquent de soulever des problèmes délicats : comment aborder la question de la famille homoparentale, comme sujet de non-droit, par exemple ? Comment référer cette absence de réalité juridique à l’absence de définition juridique de la famille – sinon en référence à la définition canonique à titre de modèle implicite ?


Un programme vertigineux.

A parcourir le programme proposé pour ce nouvel enseignement, on devine cependant que les sujets étudiés ne bénéficieront pas d’un temps d’approfondissement suffisant pour en dégager les dimensions les plus problématiques : bioéthique, organisation politique de la France, droit et institutions de l’Europe, ONG, dangers d’internet et liberté de communication… Les indications de mise en œuvre, si elles ouvrent volontairement le plus large champ de possibles pour ne pas restreindre les initiatives des enseignants, permettent difficilement d’imaginer comment l’enseignant pourra venir à bout de présenter même succinctement ce très vaste ensemble de manière cohérente au cours de l’année scolaire, à raison de 3h d’enseignement hebdomadaire. Si on peut reconnaître à cette nouvelle discipline la vertu d’un contenu positif et programmatique, donc susceptible en principe d’une évaluation objective et moins aléatoire qu’une épreuve de réflexion créatrice, et son indiscutable intérêt pour les élèves, on peut cependant s’alarmer de l’incroyable diversité de ses contenus et de la difficulté d’en organiser le déroulement parmi les enseignements spécifiques de la section littéraire.


Le texte du B.O :

http://www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_o[…]

Le site du nouveau lycée réformé :

http://www.education.gouv.fr/cid50538/site-nouveau-lycee-2011.html

Le site de la Terminales 2012 :

http://www.education.gouv.fr/nouveau-lycee/la_term[…]

Lectures pour les vacances


Qu’apporte la philosophie à la vie ?

Question un peu impertinente, qu’un professeur de philosophie hors normes a décidé de poser aux grands auteurs : non sans succès, car la collection « Vivre en philosophie » initiée par Balthasar Thomass, suscite un réel engouement du public, séduit par l’idée de Vivre heureux avec Spinoza ou de S’affirmer avec Nietzsche. Si la commande initiale s’orientait davantage vers le développement personnel, Balthasar Thomass a choisi de livrer, plutôt qu’une version allégée de l’Éthique ou de Zarathoustra pour bobo mal dans sa peau, une étude simple mais rigoureuse des principales thèses des ouvrages abordés. Derrière l’aisance et la clarté du style, on devine la maîtrise du sujet et la familiarité ancienne de B. Thomass avec ses modèles : de brefs ouvrages étonnants, séduisants, ponctués de « Questions vitales » et de « Philo-action », qui proposent des approches lumineuses pour des questions complexes et permettent de réviser plaisamment ses classiques sans craindre les simplifications réductrices.


Un bout de chemin en si bonne compagnie

Le premier auteur choisi se prête particulièrement bien à l’idée de la collection : Spinoza est entre tous un auteur à vivre, dont l’existence privée appliquait à la lettre les préceptes plein de raison qu’il développait dans ses ouvrages. Présenté en quatre points « techniques » (symptômes et diagnostic, clés pour comprendre, moyens d’agir et vision du sens de l’existence), la doctrine spinozienne est en réalité parcourue selon ses interrogations structurantes : les affects, la nécessité, changer ses passions, Dieu.

Menée comme une enquête, l’explication de B. Thomass appose des images simples et des constats courants sur les thèses exigeantes de Spinoza : on s’en trouve si bien éclairé qu’on en oublie les obscurités du style more geometrico de l’Éthique et qu’on se sent chez le philosophe comme chez un vieil ami perdu de vue. On se gardera, évidemment, d’exiger de cette aimable promenade les subtilités d’un manuel d’érudition. Mais on y trouvera des passerelles fécondes, entre vie réelle et abstraction conceptuelle, pour nourrir l’enseignement en classe.

Davantage conçus pour des lecteurs curieux que pour des spécialistes, les chapitres d’exercices de sagesse pratique ramènent le lecteur vers des considérations familières, bienvenues après certains développements plus denses. On peut s’y livrer de bonne grâce et y trouver quelques clés personnelles de cheminement ou de conversation, tout en gardant à l’esprit cette idée spinozienne : l’horizon de la béatitude compte moins que le cheminement qui y tend.

Balthasar Thomass – Etre heureux avec Spinoza – Vivre en Philosophie. Ed. Eyrolles, 2008 – 178p. 14€

http://www.eyrolles.com/Loisirs/Collection/8533/vivre-en-philosophie.php

Une philosophie de la sexualité.

Une philosophie de la sexualité, c’est le pari du philosophe André Comte Sponville, à travers l’ouvrage qu’il vient de publier chez Albin Michel, Le sexe ni la mort. Le titre, inspiré d’une célèbre maxime de La Rochefoucauld, « le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement », renvoie le lecteur au soleil métaphorique d’une trouble fascination. L’expérience si banale et si grave de la sexualité, rarement explorée par les philosophes dans sa trivialité fascinante, nous plonge dans des abîmes de gêne et de sérieux en nous confrontant à notre animalité, prise entre exigences morales et illusions passionnelles. Faux objet échappant à l’observateur qui prétend la scruter du dehors, cruelle assignation s’il s’essaie à la spiritualiser, la sexualité nous ramène sans égards à l’épreuve du réel, à laquelle il s’agit de se rendre fidèle, nous dit l’auteur, non par cynisme, mais pour « sauver nos amours des illusions de la passion ».


L’ouvrage s’ouvre sur un premier essai consacré aux trois formes de l’amour distinguées dans le Petit Traité des grandes vertus (1995) : l’érôs platonicien comme désir passionnel et comme manque, la philia d’Aristote, vertu du sage dans l’amitié heureuse, dont la joie de persévérer dans l’existence serait l’écho chez Spinoza, et l’agapè chrétienne de pure charité de Thomas à Simone Weil. Le second essai, qui donne son titre à l’ouvrage, reprend une conférence donnée par l’auteur en 2004 à la Société française de sexologie. Un troisième essai, sur l’amitié et le couple, explicite la leçon de vie et de vertu du philosophe, tandis qu’un appendice final rassemble deux articles plus spécialisés sur l’amour chez Pascal (De la concupiscence à la charité) et chez Simone Weil (« Devenir rien »), dans une progression de complexité régulière qui conduit le lecteur d’un heureux moment de conversation érudite à une méditation sur la spiritualité – sans que jamais l’élégance et la clarté de l’auteur ne lui fausse compagnie.


Le sexe ni la mort, Trois essais sur la mort et la sexualité (01/2012). 416p. – Prix : 21.50 €

EAN13 : 9782226238610


Outils pour la classe


Olivier Dhilly : Comprendre la philosophie.

Un manuel pas tout à fait comme les autres sort chez Ellipses, tandis que fleurissent les nouvelles éditions scolaires traditionnelles : un livre qui prend le parti de l’histoire chronologique des idées – mais saisies du point de vue focal de la pensée de l’auteur. Olivier Dhilly s’intéresse à l’intuition matrice de chaque théorie : à quelle question commune (au sens où nous pourrions tous nous la poser) le philosophe s’efforce-t-il de répondre dans son œuvre ? Question qui n’aurait aucun sens réduite à une formule, mais qui permet de tramer l’orientation d’une pensée et sa place dans le processus historique de la réflexion rationnelle. Points de vocabulaire, repères, anecdotes viennent émailler les chapitres brefs et accessibles de l’ouvrage, qui constitue, sans prétention mais avec rigueur, un agréable précis de culture générale tout public.


Auteur d’ouvrages d’aide scolaire (éditions de l’Opportun et de l’Étudiant), mais aussi concepteur d’un site web d’aide en ligne, Web Philo, Olivier Dhilly, agrégé de philosophie, professeur au Lycée d’État de la Légion d’honneur et à l’Université Paris Panthéon Assas.

Votre ouvrage se veut-il un Panthéon des grands auteurs ?

Olivier Dhilly : S’il y a des auteurs qui ont traversé les siècles, ce n’est peut-être pas sans raison. Mais ce n’est pas pour autant qu’ils sont forcément bien connus et bien compris. Bergson disait qu’un philosophe a une grande intuition et passe sa vie à la décliner au travers de toute son œuvre.

Les auteurs contemporains peuvent-ils se prêter à un tel traitement ?

Olivier Dhilly : Il s’agit de montrer comment eux aussi s’inscrivent dans une tradition, mais avec l’originalité de chacun. On oublie par exemple que lorsque Deleuze parle de cinéma, c’est aussi parce qu’il est un lecteur de Bergson, ou un lecteur de Spinoza quand il parle du désir. Ce n’est pas une pensée qui émerge ex nihilo, et on la comprend mieux située dans son contexte.

Dans les milieux de l’art et de la culture, on aime bien réutiliser certaines notions empruntées aux philosophes contemporains : on parle de déconstruction, de rhizome, souvent mal à propos et comme si c’était évident alors que c’est assez compliqué. Ce sont de faux arguments intellectuels qui noient les gens, qui les intimident et qui ruinent la discussion. J’essaie au contraire de clarifier au mieux ces notions par une explication précise.


Mais un tel effort de vulgarisation peut-il vraiment ouvrir des perspectives, si on n’a pas déjà une bonne teinture de philosophie ?


Olivier Dhilly : On peut trouver des ouvertures assez générales, dans les introductions et les conclusions des chapitres, mais après… cela demande beaucoup de travail. Ce ne sont pas 2h de lecture qui peuvent rendre philosophe, de même qu’on ne devient pas musicien après avoir assisté à 3 concerts. La demande du public pour la philosophie est très forte et beaucoup pensent qu’on peut facilement s’approprier le discours d’un auteur, ce qui n’est évidemment pas le cas. J’essaie de m’approcher le plus possible d’un discours compréhensible, mais il faut s’intéresser de près aux questions et multiplier les approches pour parvenir à se les rendre familières. Disons que ce livre concerne peut-être davantage les élèves de classes préparatoires que du lycée, et un grand public cultivé, des gens ayant déjà fait des études, plutôt que des débutants.


Olivier Dhilly – Comprendre la philosophie – Éditions Ellipses octobre 2011 – 512 pages – 20,30€ – ISBN : 9782729870744

http://www.editions-ellipses.fr/product_info.php?products_id=8144


Programme de l’agrégation 2013 :

Au programme de l’agrégation externe, pour la session 2013, « La forme », Hobbes et Bergson pour les épreuves écrites, Le Sophiste de Platon et La théorie physique de Duhem pour l’oral. L’agrégation interne portera sur « Le temps » pour l’explication de texte et « La liberté » pour la dissertation.

Le détail du programme des épreuves de langues du concours externe :

http://media.education.gouv.fr/file/agregation[…]

Pour préparer la rentrée, le stage GFEN secteur philosophie

> »OBÉIR, DÉSOBÉIR, CRÉER DU DROIT ?

Pour convoquer la Justice de notre temps »

Les 29, 30 et 31 août 2012

3, rue Récamier, Paris 7ème


Le problème philosophique de la désobéissance civile ; pourquoi, et comment, est-il possible de créer du droit ? « Le peuple comme source de pouvoir », selon l’argument de Bertrand Russell, peut-il se constituer en tribunal pour juger si les États sont coupables ou non de crimes de guerre ?

Ces questionnements contemporains trouvent leurs sources dans la figure légendaire d‘Antigone, que le GFEN a souvent évoquée et travaillée, notamment par le biais de la démarche du « procès ». Comment, à partir d’un renouvellement de la démarche, peut-on s’appuyer sur cette figure canonique pour mieux penser notre temps ? Antigone désobéit-elle à la loi de Créon pour elle-même et sa famille, ou pour que la loi change pour tous? S’agit-il d’une désobéissance civile, d’une désobéissance civique, d’une simple objection de conscience ou d’un acte de résistance ?

A retrouver sur le site du GFEN :

http://www.gfen.asso.fr/fr/les_activites_du_secteur_philosophie


Débuter en philosophie


Le site de Reims met en ligne des documents officiels pourles débutants : statut et missions, activités du TZR, instructions sur le travail des élèves etc.

http://www.ac-reims.fr/datice/philo/index.htm


Des sites académiques précieux pour les enseignants et les élèves.

Le site d’Amiens, peut-être le plus original ?

http://pedagogie.ac-amiens.fr/philosophie/

Celui de l’académie de Nantes :

http://www.pedagogie.ac-nantes.fr/57995593/0/fiche___pageli[…]

Le site de l’académie de Grenoble :

http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/index.php?lng=fr

Et celui de l’Académie de Créteil :

http://philosophie.ac-creteil.fr/

Sans oublier la bibliothèque de textes de philosophie en ligne Minute-Philosopher :

http://t.m.p.free.fr/TMP/Accueil.html


Textes Philo 6

Textes philo 6 est une base de données de textes philosophiques, qui joue le même rôle qu’un recueil de textes classiques, mais également qu’un manuel de cours, le côté pratique de l’informatique en plus, avec possibilité de prendre des notes, d’opérer des tris rapides de textes, selon tous les critères possibles (par auteur, par thème, etc.). Ce magnifique logiciel, offert par Pierre Hidalgo, webmestre du site grenoblois, tourne sur PC et Mac OS X.

http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/articles.php?lng=fr&pg=433


Philosophies TV

 » A une époque où de la Philosophie, il n’est fait mention que pour en faire une forme vague de sagesse qui n’engage à rien, un discours intellectuel désincarné, ou un jeu scolaire, lui redonner sa place est essentiel. A une époque où tout doit être évoqué en quelques minutes, la nécessité de retrouver la possibilité d’une parole qui prenne son temps pour ouvrir un chemin s’impose ». C’est pour répondre à ces ambitions que des professeurs de philosophie ont créé « Philosophies TV », une web TV qui propose des cours et, gratuitement, des documentaires vidéos sur les grands philosophes. Par exemple, Edgar Morin évoquant la crise et la mondialisation.

http://philosophies.tv/