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Dominique Auvigne est le Principal adjoint du Collège Françoise Dolto, à Paris dans le vingtième arrondissement, après avoir exercé de nombreuses années comme professeur de sciences économiques et sociales en lycée.

Comment présenter le collège Dolto ?

Le collège Dolto est tout à fait illustratif de la société en sablier d’Alain Lipietz . Les classes moyennes (dont la seule ligne de défense est la lutte contre l’hyper-hétérogénéité), ont déserté, mues par l’illusion de devoir faire quelque chose pour faire réussir leur progéniture dans des établissements privés. L’établissement se personnifie aussi par l’action et les interactions d’une équipe de 70 personnes (toutes catégories confondues) au service de l’égalité de traitement des élèves.

Que fait votre collège pour les élèves qui peinent à maîtriser les sept compétences du « socle » ?

La pédagogie différenciée se trouve évidemment de mise reposant sur un accompagnement éducatif présentant en moyenne jusqu’à 62 dispositifs, concernant jusqu’à 210 élèves. L’établissement peut se prévaloir d’une pédagogie du projet (tu es par ce que tu fais et non pas par ce que tu sais). Cela participe de la volonté de l’équipe de direction de respecter le principe d’équité. Afin d’assurer une meilleure cohésion sociale interne du public scolaire, l’établissement se lance dans une expérience de développement de médiation par les pairs. Par ailleurs, l’établissement a mis en place une politique ambitieuse de l’orientation dont l’objectif est d’atteindre prioritairement ceux qui vivent l’école de l’extérieur, en leur donnant des perspectives réalistes et souvent d’excellence…

Quelles sont les caractéristiques de cette manière de « voir » l’orientation ?

Trouver sa voie, vivre son enseignement post-3ème comme un enseignement choisi et non pas un enseignement subi, tels sont nos objectifs depuis la classe de 5ème. Dans ce but, l’établissement s’est doté d’un outil : le web-classeur de l’orientation (WO) qui est en train de se développer depuis la 6ème. Le premier trimestre est consacré à la connaissance des grandes voies de l’orientation. Au cours du second trimestre, un électrochoc est lancé au moyen d’un speed-meeting de l’orientation, où un élève arrive à rencontrer jusqu’à une vingtaine de professionnels en une matinée, suivi – pour les 3ème – de la séquence d’observation en milieu professionnel où nous offrons des stages prestigieux aux populations marquées par le principe de loyauté sociale. Le 3ème trimestre est consacré à l’affinement de projets plus individuels par des contacts directs –collectifs ou individuels- avec des entreprises ou des établissements de formation. Sécuriser le parcours et le projet de formation, tels sont les maîtres-mots.

Quelle question vous pose-t-on le plus souvent sur le collège Françoise Dolto ?

A l’heure des opérations d’affectation des élèves dans les collèges, surtout en 6ème, beaucoup de parents veulent savoir comment nous pratiquons une pédagogie « doltoïenne » ou « doltoïste », reposant sur les apports de François Dolto dans les sciences de l’Education, caressant sans doute l’espoir que le collège du secteur soit un collège spécialisé, salvateur de tous les maux sociétaux.

Françoise Dolto n’aurait peut être pas apprécié qu’un collège puisse porter son nom (pas son truc, m’avait dit l’un de ses fils lors d’un de nos speed-meetings de l’orientation). Si Françoise Dolto n’a pu que marquer l’ensemble du monde de la pédagogie, je sais que nos personnels œuvrent avec courage, ayant à l’esprit ce que savait le médecin d’éducation qu’elle imaginait être dans son enfance : un médecin qui sait que quand il y a des histoires dans l’éducation ça fait des maladies aux enfants, qui ne sont pas des vraies maladies, mais qui font vraiment de l’embêtement dans les familles et compliquent la vie des enfants qui pourrait être si tranquilles.

Propos recueillis par Gilbert Longhi