Print Friendly, PDF & Email

« Cette année sera celle du changement ». Vincent Peillon a réuni, le 10 juin, 300 invités de « l’édusphère », la ministre du numérique, Fleur Pellerin, des cadres du système éducatif ou de grandes institutions, élus des collectivités territoriales, des représentants de l’édition et des services numériques et même quelques rares enseignants, pour assister au « point d’étape » de sa « stratégie numérique ». Six mois après le lancement du 13 décembre, les projets avancent, des ressources apparaissent, une administration du numérique nait. Le signal envoyé du sommet est-il audible sur le terrain ? C’est là où l’effort ministériel semble le moins convaincant.

Vincent Peillon et Fleur Pellerin, accompagnés de Louis Gallois, sont allés au-devant des élèves du lycée parisien Diderot pour constater la place prise par le numérique dans l’enseignement. Il a longuement discuté avec un élèves en brevet de m’étier d’art horlogerie, un métier traditionnel où, selon le professeur d’horlogerie, B. Gabret, des logiciels aident à la conception de pièces pour la restauration des horloges. En BTS IRIS, en STI2D les étudiants montrent leurs projets qui utilisent tous des ressources numériques.

Un changement fondamental

C’est Fleur Pellerin qui justifie en premier l’effort ministériel pour le numérique. Elle-même s’engage à donner la priorité aux établissements scolaires pour le raccordement au haut débit. Elle engage l’Etat dans la constitution d’une filière du numérique éducatif et fixe l’objectif que les jeunes « aient une plaine maitrise du numérique ». Pour Catherine Becchetti-Bizot, inspectrice générale, l’éducation aux médias est une nécessité pour apprendre à gérer les flux d’information, pour en produire et pour comprendre les stratégies économiques ou politiques qui sous-tendent ces flux. Jean-Paul Delahaye, Dgesco, souligne le changement « fondamental » apporté par le numérique à la transmission des connaissances. « On voit émerger une nouvelle façon de construire la pédagogie », dit-il. « Le numérique modifie la relation entre maitre et élèves, entre maîtres, entre l’école et les manuels ». Mais « ce mouvement se situe dans le cadre disciplinaire », souligne-t-il.

« Il ne faut pas avoir peur du numérique », déclare Vincent Peillon. « Ce n’est pas un énième plan mais une mobilisation nouvelle ». Le ministre rappelle les « 15 plans » qui ont précédé sa « stratégie » « qui n’ont pas tous bien marché », parce que « cela ne peut marche que si l’on a la totalité de la chaîne » ce qui n’a pas été le cas. V. Peillon veut donc donner le sentiment que son plan couvre toute la chaine du numérique. Mais que propose-t-il concrètement ?

Ressources et dispositifs

Le ministre promet des ressources dès la rentrée 2013. La plupart concernent le primaire. Ainsi « les fondamentaux » produits par le CNDP sont de petits films vidéos portant sur des notions au programme comme le complément d’objet. On promet 200 films différents. « English for Schools » est un cours d’anglais à distance développé par le CNED. D’Col proposera des aides individuelles dans 1085 classes de 6ème dans des établissements défavorisés à la rentrée. Les élèves auront 2 heures par jour pour ce travail. M@gistère propose un service de formation à distance des enseignants du primaire créé dans le cadre de la réforme des rythmes qui propose 9 heures annuelles. Enfin l’éducthèque réunira des ressources données par les grandes entreprises publiques : INA, CNRS, IGN, Louvre etc.

La « stratégie Peillon » va plus loin que les ressources pour viser « toute la chaine » du numérique. . Une nouvelle direction sera crée au ministère sous la dépendance de la Dgesco et du Secrétariat général pour piloter la stratégie numérique. Elle sera confiée à l’inspectrice Catherine Becchetti-Bizot. Elle pilotera des délégués académiques (DAN). Le ministère va renforcer l’éducation aux médias en offrant des exemples de séquences pédagogiques et une modification des programmes. Le B2i sera refondé au collège et le B2i lycée « relancé ». Il insistera davantage sur les traces et l’identité numérique. Une partie de la formation sera dévolue au numérique. Chaque établissement proposera à la rentrée une réunion sur le numérique. Vingt collèges « connectés » sont créés. Ils proposeront une autre pédagogie avec au moins 1 heure d’utilisation du numérique par jour. La question de l’avenir du manuel scolaire revient comme un leitmotiv dans les déclarations et clairement le ministère lorgne vers les 400 millions dévolus aux manuels scolaires…

Et les enseignants ?

Pour clore la journée, Vincent Peillon a signé avec 7 conseils généraux des conventions relatives aux collèges « connectés ». « Peut-être veut on aller trop vite », nous confie Serge Pouts-Lajus, un consultant renommé. « J’adhère à l’idée de lancer un mouvement mais l’épreuve des faits risque d’être difficile car on veut aller fort ». La vraie conclusion de la journée est peut-être offerte par la présidente de la CNIL, Isabelle Falque-Pierrotin. Elle propose que le numérique éducatif devienne la grande cause nationale de 2014. Un voeu qui éclaire les ambitions et les manques de la stratégie ministérielle. Dans ce voeu, les carences du numérique éducatif sont prises au sérieux et l’ambition du changement est portée à un haut niveau. Mais c’est aussi le manque de moyens de ce nouveau plan étatique qui est souligné par cet appel à la charité publique. Enfin, « rien ne changera sans les enseignants », dit V. Peillon. Compte-il sur la nouvelle administration du numérique pour les associer au changement?

François Jarraud

Le dossier de presse

Sur la politique académique

La présnetation de la stratégie le 13 décembre