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Les nouvelles ESPE vont-elles faire l’impasse sur les nouveaux hussards noirs de Vincent Peillon ? Ancrées dans des représentations traditionnelles de l’étudiant, certaines universités ont décidé d’ignorer ces étudiants travailleurs. ‘ »A l’ESPE de Perpignan absolument aucun aménagement de prévu pour les emplois avenir professeur (EAP) malgré les (fausses) promesses qu’ils ont faites pendant les portes ouvertes du campus », annonce une jeune emploi avenir professeur qui entre en M1 sur le groupe Facebook des EAP. Sa plainte est relayée par d’autres étudiants d’autres académies qui se trouvent aussi devant un emploi du temps impossible.

Les EAP sont un des fleurons de la refondation. Voulus par Vincent Peillon, ils doivent répondre à deux difficultés majeures du recrutement des enseignants. D’abord le déficit dans certaines disciplines comme les maths, le français et les langues vivantes, et dans certaines académies. L’autre objectif c’est l’ouverture sociale du métier d’enseignant. « En élevant le niveau de recrutement des enseignants à bac + 5, la réforme de la masterisation a détourné de ces carrières les étudiants issus des milieux les moins favorisés. Or l’adéquation entre la composition sociologique du corps enseignant et la physionomie de l’ensemble de la société française a toujours été une clé de la réussite de notre système scolaire », dit-on au ministère. Les EAP doivent être boursiers et les jeunes vivant en ZUS ou ayant étudié en ZUS sont prioritaires. Enfin les EAP sont aussi un mode particulier d’entrée dans le métier. Amenés à faire 12 heures en établissement, les étudiants se frottent petit à petit au métier d’enseignant dont ils découvrent sur le terrain avec un tuteur les réalités. C’est presque une entrée par apprentissage. En échange de leurs 12 heures hebdomadaires, les EAP bénéficient d’une aide financière de l’Etat qui leur permet de financer des études trop longues pour les jeunes issus des milieux populaires. En cumulant cette aide avec leur bourse, les étudiants peuvent toucher environ 900 euros (de 617 à 1086 euros en fait) mensuellement.

L’Université peut-elle continuer à ignorer la profession enseignante ? Ces 12 heures encore faut-il pouvoir les faire ! C’est là que le traitement qui leur est réservé dans plusieurs universités pose problème. Plusieurs ESPE ignorent les contraintes qui pèsent sur les EAP. Par exemple, dans plusieurs universités, les étudiants en master 1 ont des emplois variables d’une semaine sur l’autre ce qui rend leur travail à l’école ou au collège impossible. Ailleurs, on leur accorde des autorisations d’absence aux cours mais on les oblige à abandonner le contrôle continu. Entre l’éducation nationale qui veut aider des jeunes contraints de travailler pour financer leurs études et les universités qui ont décidé d’ignorer ces contingences, pourrait s’ouvrir, après les accréditations, un second front. En pénalisant les AEP c’est aussi leur démarche professionnalisante qui est déqualifiée, en douce, par certaines universités…

François Jarraud

La relève est bien là