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Vous n’avez même pas eu le temps de retenir le nom du Scéren que le voici remplacé par un nouveau sigle : Canopé. Pour Vincent Peillon, venu inaugurer Canopé à Chasseneuil du Poitou, le 3 février, il s’agit de  » définir ce que pourrait être le réseau de création et d’accompagnement pédagogiques du xxie siècle ». A quelques jours de la publication d’un rapport de la Cour des comptes, le CNDP amorce un virage moderniste susceptible d’assurer son avenir dans un paysage éducatif modernisé et largement numérique.

C’est un nouveau tournant pour le CNDP. La vieille maison entreprend une triple mutation : organisationnelle, éditoriale et numérique. La nouvelle stratégie doit se traduire  » à la fois par un renforcement du pilotage national du réseau, et par une attention particulière portée à la proximité du service », affirme V. Peillon. Elle doit rendre plus visibles  » les nouveaux ateliers, espaces de création, d’échanges et de découvertes, qui seront développés au cours des prochains mois. Simultanément, de nombreux services innovants seront offerts aux enseignants, en lien avec les nouvelles Écoles supérieures du professorat et de l’éducation ».

Revoir l’offre éditoriale

« Le constat a été fait », nous explique Jean-Marc Merriaux, directeur général du CNDP. « Notre offre éditoriale n’est pas adaptée aux attentes des enseignants et aux besoins ministériels. Il faut effectuer notre mutation tout en accompagnant le personnel et en le respectant ». Canopé veut passer de l’édition papier, dominante au CNDP, à « des ressources multiformats adaptées à chacun des canaux de diffusion disponibles (print, web, mobile, TV) ». De 52 collections différentes, toute l’offre sera restructurée autour de 3 univers éditoriaux : « éclairer », « des contenus mieux adaptés aux enseignants », nous confie JM Merriaux, « maitriser » « des dossiers complets », et « agir » : « des ouvrages pratiques et des séquences didactiques ».

L’offre numérique sera revue. On passera de 350 sites web, dont 106 pour le seul CNDP, environ à une seul. Cela donnera au réseau une meilleure maitrise de ses contenus et aussi davantage de lisibilité sur l’offre. La restructuration devrait être terminée en avril 2014. Elle implique une requalification du personnel et un plan de formation a été lancé par le CNDP (118 formations pour 2014).

De nouveaux centres

Aujourd’hui le réseau Scéren compte plus de 120 médiathèques et librairies. JM Merrieux veut « mieux gérer l’offre de proximité » et faire évoluer les espaces vers des espaces de créations et d’accompagnement pédagogiques. Les nouveaux ateliers Canopé offriront un lieu de prêt de ressources, un lieu événementiel, un lieu de formation et un lieu d’expérimentations recherche. Visiblement le CNDP s’est inspiré de la « classe immersive », des laboratoires de création développés ici ou là. C’est un de ces nouveaux espaces qu’est venu inaugurer V Peillon à Chasseneuil. Pour JM Merriaux il devrait en exister un à terme dans chaque département. Cet alignement vers la formation et l’animation pédagogiques implique une refonte du réseau en lien avec les Espé et les collectivités locales.

Un nouveau réseau

C’est la réforme la plus lourde concerne le réseau. Actuellement le Scéren c’est un coeur central, le CNDP, et 31 centres régionaux indépendants. « Cette organisation génère des coûts de fonctionnement car il y a de nombreux doublons. Elle ne permet pas de mutualiser facilement les services et les productions », poursuit JM Merriaux. Si « aucune décision n’est prise sur l’avenir du réseau », il est clair que la direction du Cndp envisage une autre organisation pour son réseau. Les CRDP autonomes pourraient passer sous l’aile du réseau central.

C’est aussi ce que devrait recommander le rapport de la Cour des comptes attendu à la mi février. Il devrait souligner les pertes financières impliquées par l’organisation actuelle. D’une certaine façon, en annoncant maintenant la « refondation » du CNDP, sa direction prend les devants sur un rapport qui sera forcément salé.

Le rapport devrait également aborder la question de la place du CNDP dans son environnement. Quel rôle aura à jouer à l’avenir Canopé vis à vis des rectorats ? Pour le CNDP il devra proposer des formations au numérique, soutenir la politique numérique rectorale. La question des rapports avec les collectivités locales se pose également. Aujourd’hui nombre de lieux du CNDP dépendent des conseils généraux. Le réseau devrait renforcer son partenariat avec les collectivités locales particulièrement sur le numérique. Enfin la question des rapports avec les Espe se pose également. Les nouveaux centres de Canopé devraient participer à la formation continue et les sites de Canopé pourraient être englobés dans les Espé.

Un soutien syndical limité

« La restructuration du réseau, c’est une bonne chose », nous ad ite Claudie Paillette, représentant le Sgen. « Ca sera plus cohérent et ca évitera des doublons ». Même accueil au Se Unsa où Hervé Ferrière estime que la perte d’autonomie des CRDP serait « la moins pire des solutions « dans la situation actuelle. « Le modèle de 1992 est totalement dépassé », confie-t-il.

Par contre les syndicats sont plus réservés sur le réorganisation éditoriale. « Le plan de formation d ela direction est ambitieux », nous dit H Ferrière. « Il faut l’accompagner et être vigilant. Mais on va jouer le jeu ». Au Sgen, Claudie Paillette est plus alarmiste. « Que vont devenir les personnels des métiers du papier ? On a des inquiétudes sur la gestion des ressources humaines qui n’est pas assez transparente ». Pour elle, « l’ouverture des nouveaux centres es « incohérente » alors que des centres anciens sont menacés. C’est le cas pour le CDDP 92, pour 2 antennes dans le Nord et 4 dans le sud. Pour Hervé Ferrière, « l’équité geographique » est aussi un souci premier. La réorganisation du CNDP se fait sous surveillance. Mais les syndicats sont déjà dans l’inquiétude de la publication du rapport de la Cour des comptes.

François Jarraud

Le réseau canopé