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« En insistant sur l’exigence de respect et de politesse des élèves à l’égard du maître, nos responsables politiques semblent nous dire que le respect de l’enseignant serait un dû, du fait même de son statut… En affirmant que « tout comportement mettant en cause les valeurs de la République ou l’autorité du maître ou du professeur fera l’objet d’un signalement au chef d’établissement », qu’ « aucun incident ne sera laissé sans suite » et qu’il faudrait développer le recours aux mesures de responsabilisation, nos responsables politiques semblent d’une part, réduire l’autorité à l’exercice de la force et d’autre part, externaliser son traitement hors de la classe voire hors de l’établissement. » Maitre de conférences à l’Éspé de l’académie de Versailles, Bruno Robbes démonte le discours gouvernemental sur l’autorité. Pour lui il ne suffira pas d’un enseignement de la morale civique pour que les élèves intègrent les valeurs républicaines.

Après les tragiques évènements que notre pays vient de vivre et avec ses résonnances dans certains établissements scolaires, on pouvait s’attendre à ce que la question de l’autorité à l’école réapparaisse.

Verbatim

Le 21 janvier lors de ses vœux au monde éducatif, le président de la République François Hollande associe à trois reprises le terme « autorité » aux maîtres[1]. Premier extrait : « il ne serait y avoir de transmission des valeurs sans un renforcement des maîtres, de leur autorité. Je veux insister là-dessus. Parce que le maître n’est pas une personne comme les autres, l’enseignant n’est pas un fonctionnaire comme les autres, il a ce que d’autres n’ont pas. Il a une responsabilité, il a un savoir, il a aussi une mission qui lui est confiée par la République. L’école doit donc être un sanctuaire de civilité, un lieu d’exercice pratique des valeurs au premier rang desquelles le respect, la politesse, et d’abord le respect et la politesse à l’égard du maître et du professeur. C’est une condition essentielle de la qualité des apprentissages comme de la préparation de la citoyenneté » (p. 13-14). Second puis troisième extrait : « tout comportement mettant en cause les valeurs de la République ou l’autorité du maître ou du professeur fera l’objet d’un signalement au chef d’établissement. Aucun incident ne sera laissé sans suite. (…) C’est en faisant en sorte que l’autorité soit respectée, celle du maître, que nous pourrons aussi veiller à ce que les valeurs de la République soient partagées et renforcées » (p. 14).

Le lendemain, la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem annonce onze mesures. Parmi elles, la « Mesure 2 » vise à « Rétablir l’autorité des maîtres et les rites républicains »[2]. Dans les huit points qui suivent, j’en retiens quatre qui concernent l’autorité : l’apprentissage et le respect (par les élèves) des règles de civilité et de politesse à l’école ; la reprise des mots du président concernant les signalements d’incidents au chef d’établissement, auquel est ajouté la mise en place « d’un dialogue éducatif associant les parents d’élèves et, le cas échéant, d’une sanction » ; le fort développement du recours aux mesures de responsabilisation ; enfin, l’idée selon laquelle « le rétablissement de l’autorité des maîtres passe également par la compréhension et la célébration des rites républicains et des symboles de la République (hymne national, drapeau, devise) ».

Quelles conceptions de l’autorité sous-jacentes dans ces déclarations ?

Dans un discours consensuel aux accents d’unité nationale, François Hollande nous présente « le maître »[3] dans sa posture professorale traditionnelle, en activant la dimension statutaire et asymétrique de son autorité : c’est une personne à part, un fonctionnaire différent des autres, dépositaire d’une responsabilité, d’un savoir, d’une mission. Pour compléter cette déclaration, le président ajoute l’exigence de respect et de politesse à son égard, comme s’il exprimait la nostalgie d’une époque où l’obéissance allait de soi. La suite donne à comprendre que c’est aux élèves de manifester ces exigences, au risque que tout comportement déviant de leur part ne soit signalé au chef d’établissement. Dans les propos de Najat Vallaud-Belkacem, l’accent est à nouveau mis sur l’apprentissage et le respect par les élèves des règles de civilité et de politesse, assorties d’un « dialogue éducatif » avec les parents et d’éventuelles sanctions. Un lien est enfin établi entre le « rétablissement de l’autorité des maîtres » (ce qui laisse entendre qu’elle aurait disparu) et les rites et symboles de la République.

En arrimant ainsi l’autorité du maître à la transmission des valeurs de la République, nos responsables politiques semblent considérer que l’autorité d’un enseignant passerait exclusivement par le fait qu’il est le maître (« Je suis votre professeur, donc vous allez m’obéir ! »).

Or, tout professeur sait qu’une telle affirmation est insuffisante en pratique. S’en tenir à rappeler son statut d’enseignant ne suffit pas. Ceux qui s’y arc-boutent en exigeant des élèves une obéissance immédiate et inconditionnelle sous la forme d’une soumission (autorité autoritariste) augmentent les risques d’être victimes ou auteurs de violences, en particulier avec des élèves aux comportements difficiles. Toute relation d’autorité légitime articule cette dimension statutaire et asymétrique, avec une dimension symétrique qui considère l’autre comme une personne humaine, notamment à travers sa parole. L’exercice de l’autorité nécessite qu’un enseignant associe : 1) cette dimension statutaire et les responsabilités qui en découlent[4] ; avec 2) une autorisation personnelle, c’est-à-dire une sécurité et une confiance suffisante en soi pour oser entrer en relation avec les élèves, les soutenir et les aider à poser des actes qui les conduiront progressivement à être autonomes ; et 3) une capacité fonctionnelle où l’enseignant fait la preuve, par ses actions en contexte[5], que l’influence qui exerce sur les élèves peut être reconnue au final comme bénéfique par eux. Exercer l’autorité n’a donc rien de naturel. C’est une posture professionnelle qui se construit. Les enseignants se demandent légitimement « comment faire ? » et il faut les y former[6]. Si l’idée de former les enseignants à la laïcité et aux valeurs de la République est bien présente dans ces déclarations – et des ressources existent pour cela – la formation à l’exercice de l’autorité en tant que telle n’est pas mentionnée[7]. Nos responsables politiques pourraient pourtant s’appuyer sur des propositions qui émanent de leurs services, qu’il serait préférable de ressortir plutôt que d’enterrer[8]. De même, les témoignages de professionnels de l’école qui s’efforcent déjà de construire et d’exercer leur autorité dans une perspective éducative peuvent s’avérer utiles[9].

En insistant sur l’exigence de respect et de politesse des élèves à l’égard du maître, nos responsables politiques semblent nous dire que le respect de l’enseignant serait un dû, du fait même de son statut.

Cette conception du respect est usuelle, traditionnelle. Le respect y est utilisé par une personne pour revendiquer des autres un devoir inconditionnel envers elle-même, par-delà son statut et quelles que soient ses façons d’agir. C’est ce que Piaget nommait le « respect unilatéral », en le distinguant du « respect mutuel » s’établissant par la réciprocité, la reconnaissance, l’écoute de l’autre[10]. Dans mes recherches sur l’autorité enseignante, j’ai mis au jour une troisième forme de respect que j’ai appelé le « respect initié par l’enseignant ». Les professeurs qui parlent de respect en ce sens l’envisage comme un ensemble de comportements qu’ils doivent d’abord s’imposer à eux-mêmes avant de les exiger des élèves, ce qui augmente leur crédibilité[11]. Cette posture éthique fondamentale de respect de la personne de l’enfant, du jeune, se justifie par le fait qu’un adulte se trouve dans une position générationnelle antérieure, ce qui en fait le dépositaire symbolique d’une culture, le garant des interdits anthropologiques aux fondements de toute vie sociale (interdit d’inceste, de meurtre, de parasitage) dont les valeurs de la République sont une actualisation. En conséquence, cette position générationnelle l’oblige à être à l’initiative du respect de ceux qu’il éduque et enseigne, sans condition préalable. Outre le fait qu’elle témoigne de la considération qu’un professeur porte à ces élèves, elle a une valeur d’exemple. Les élèves s’identifient au professeur qui les respecte en reprenant à leur compte certains de ses traits psychiques ou physiques. La psychanalyse a permis de mieux appréhender les enjeux de l’identification des enfants et des adolescents à des figures d’adultes dans la construction de leur personnalité. À l’heure où des modèles d’identification en tout genre sont proposés aux jeunes dans nos sociétés médiatiques et connectées, le rôle des adultes de proximité reste fondamental. De nombreux enseignants sont déjà ces supports d’identification qui engagent les élèves à la réciprocité. Il est alors beaucoup plus facile pour eux d’exiger d’être respectés en tant qu’enseignants parce qu’autant que faire se peut, ils « s’interdisent tout comportement, geste ou parole, qui traduirait du mépris à l’égard des élèves ou de leur famille, qui serait discriminatoire ou susceptible de heurter leur sensibilité »[12]. Il ne s’agit donc pas de contester la légitimité de cette exigence du respect, mais d’expliquer comment celui-ci se construit à partir de l’enseignant pour conforter son autorité. Si l’école doit être « un sanctuaire de civilité » comme l’affirme François Hollande, alors elle se doit d’être un sanctuaire de civilité réciproque. Car le problème du respect est qu’il s’éprouve, mais ne se commande pas[13].

En affirmant que « tout comportement mettant en cause les valeurs de la République ou l’autorité du maître ou du professeur fera l’objet d’un signalement au chef d’établissement », qu’ « aucun incident ne sera laissé sans suite » et qu’il faudrait développer le recours aux mesures de responsabilisation, nos responsables politiques semblent d’une part, réduire l’autorité à l’exercice de la force et d’autre part, externaliser son traitement hors de la classe voire hors de l’établissement.

Toutes les définitions de référence de l’autorité, en particulier celle si souvent citée d’Hannah Arendt, soutiennent pourtant que son exercice ne peut se confondre avec le recours à la contrainte par la force, auquel la philosophe ajoute la persuasion par arguments[14]. Pour autant à l’école, il est des situations où le pouvoir de sanctionner doit s’exercer en toute légalité et légitimité, particulièrement lorsque les interdits anthropologiques fondateurs de notre vie sociale sont en cause, à commencer par les atteintes aux personnes. Des sanctions pénales doivent pouvoir être requises lorsque des faits se déroulant dans un établissement ou à ses abords renvoient à des cas prévus par la loi[15], mais leur traitement s’effectuera principalement à l’extérieur de l’école. Certes, les victimes accompagnées si nécessaires par des professionnels de l’école, voire les professionnels eux-mêmes, feront appel aux force de l’ordre, déposeront plainte ou signaleront les faits au procureur de la République. Ces actions relèvent des obligations de ces professionnels et ils sont assurément dans leur rôle. Mais leur autorité en sortirait-elle nécessairement renforcée ? Je n’en suis pas sûr. Comme l’indique Eirick Prairat, parce qu’elle est un lieu d’éducation, l’école est dotée de propriétés spécifiques[16] et d’une certaine manière, l’exercice de l’autorité dans une perspective éducative ne peut se dérouler qu’en son sein et avec la communauté éducative. Les logiques du signalement généralisé, de la menace et du châtiment y sont limitées du fait même de ses finalités éducatives. Les circulaires de 2011 puis de 2014 relatives au règlement intérieur et aux procédures disciplinaires dans les établissements secondaires actuellement en vigueur[17] reconnaissent d’ailleurs cette spécificité de l’école, puisqu’elles promeuvent et encadrent les pratiques de sanctions éducatives, à l’encontre de pratiques encore effectives dans beaucoup d’établissements. Tout l’enjeu de l’autorité éducative consiste à maintenir quoiqu’il arrive la relation d’éducation, et personne ne prétend que cela soit facile avec les élèves les plus troublés. Mais sans ce lien maintenu, sans cette relation entretenue, aucun acte d’apprentissage et aucune appropriation de savoirs ne sont possibles. L’école perd alors le sens de ses missions. C’est pour cela aussi que les pratiques d’exclusion de cours, de classes ou d’établissements, aujourd’hui très répandues dans l’enseignement secondaire, inquiètent[18]. Si dans des cas limités, exclure un élève s’impose (par exemple, lorsqu’il est dangereux pour lui-même ou met la vie des autres en danger ; lorsque la fréquentation d’autres élèves l’empêche d’évoluer), c’est à condition d’en avoir pesé et mesuré les avantages et les inconvénients pour tous (y compris pour l’élève concerné), et de s’être assuré qu’un relais était passé aux professionnels d’une autre classe, d’un autre établissement, d’une autre structure éducative, afin que cet élève soit accompagné à sortir du cercle infernal dans lequel ses pratiques de transgressions réitérées l’enferment. Car généralement, l’acte d’exclure est une façon de déplacer un problème. Souvent associé à un échec scolaire, il renvoie à l’élève qui le vit de manière répétée un vécu de rejet parfois verbalisé comme tel, avec des conséquences insondables sur l’estime de soi et les comportements futurs. Et si décidément l’école ne veut pas de lui, d’autres à l’extérieur l’attendent. J’ajoute que l’une des propriétés de l’autorité est que, contrairement au pouvoir, elle est une responsabilité qui ne se délègue pas. Dans l’absolu, dès que quelqu’un d’autre exerce l’autorité à ma place, tous peuvent constater que je n’ai plus d’autorité. L’externalisation de l’autorité, lorsqu’elle devient systématique, signe l’échec des professionnels de l’éducation et affaiblit de fait leur autorité. C’est pourquoi je m’interroge sur l’opportunité de développer le recours aux mesures de responsabilisation lorsqu’elles sont effectuées hors de l’établissement, qui externalise les sanctions et dont un rapport ministériel publié en 2012 a montré les difficultés de mise en œuvre[19]. Que cette mesure soit pratiquée dans ou hors de l’établissement, les personnels devront veiller à ce qu’elle n’apparaisse pas comme une remise en cause de l’autorité de celle ou de celui qui s’est trouvé en relation avec l’élève concerné, au moment où son comportement a pu justifier que la mesure soit prise.

En laissant enfin entendre qu’il suffirait d’un enseignement moral et civique s’appuyant sur la compréhension et la célébration des valeurs de la République, de ses rites et de ses symboles, pour faire apprendre aux élèves le respect du professeur et rétablir son autorité, nos responsables politiques pensent-ils que la compréhension et la célébration suffisent à permettre aux élèves d’intégrer ces valeurs ?

Le récent rapport pour un enseignement laïque de la morale publié en 2013[20] m’a conduit à discuter, dans un autre texte auquel je renvoie le lecteur[21], une orientation qui privilégie la transmission de connaissances, mais sans l’articuler suffisamment avec une mise en pratique, par exemple au moyen d’une pédagogie active.

Deux questions pour poursuivre

Au final, ces déclarations que je viens de commenter me semblent aboutir à deux questions, auxquelles je n’apporterai ici que quelques éléments de réponses.

Comment nos responsables politiques, mais aussi comment l’Éducation nationale, à travers sa hiérarchie et ses cadres, peuvent-ils conforter l’autorité des enseignants ?

On pourrait bien sûr évoquer les conditions de travail et de rémunération des enseignants français, loin d’être partout équivalentes d’ailleurs, notamment selon le lieu d’exercice et l’ancienneté dans le métier. Je m’en tiendrai à signaler les difficultés qu’a aujourd’hui notre représentation nationale à définir les finalités que la société française assigne à son école, à travers les savoirs qu’elle transmet et leurs utilité sociale. En témoigne par exemple ses difficultés à traduire dans les pratiques le socle commun de connaissances, de compétences et de culture ; ou encore le fait que dans une société de chômage de masse, la valeur sociale de certains diplômes se déprécie du fait de leur abondance. Ainsi, si l’accès à l’école s’est démocratisé, ce n’est pas le cas de la réussite scolaire, du fait notamment d’une ségrégation scolaire avérée[22]. En conséquence selon Philippe Meirieu, notre école ne tient pas ses promesses à l’égard des jeunes des milieux populaires[23] et le chantier est immense.

Du côté de la hiérarchie et des cadres intermédiaires, il est des situations où des faits dont tel personnel ou tel élève a été victime ne sont pas signalés. Certains cadres semblent préférer « ne pas les voir » pour préserver l’image de leur établissement, ce qui peut parfois s’expliquer par une mise en concurrence des établissements du fait de l’assouplissement de la carte scolaire. Les enseignants et autres personnels auraient pourtant grandement besoin de soutiens de proximité dans ces moments. Ils peuvent d’ailleurs fort heureusement bénéficier d’une protection juridique[24]. Il est d’autres cas où des personnels dont l’autorité académique sait qu’ils dysfonctionnent, qu’ils mettent à mal des élèves et/ou leurs collègues sont maintenus à leurs postes. Les marges de manœuvre sont peu nombreuses : le statu quo, la mutation qui ne fait que déplacer le problème. Qu’en est-il des possibilités de réorientation professionnelle, de seconde carrière ? Dans un contexte de pénurie d’enseignants, la gestion des personnels ne semble plus vraiment d’actualité.

Dans une perspective de formation, quelle posture professionnelle d’enseignant construire pour favoriser l’exercice d’une autorité éducative ?

Il est tant de dire qu’il ne s’agit pas pour moi de juger les actions de professionnels qui, dans des situations difficiles et parce qu’ils se sentent démunis, font ce qu’ils peuvent. Parce que je ne crois pas qu’un enseignant cherche délibérément à nuire à ses élèves, à les faire échouer ou à les humilier, je considère que les façons d’agir inappropriées que l’on peut observer chez des enseignants sont avant tout des symptômes, les conséquences d’un déficit de professionnalisation. Je me limiterai à indiquer ici quatre conditions a priori d’une reconnaissance par les élèves du caractère bénéfique de l’influence qu’un professeur peut exercer sur eux, une posture première d’enseignant en quelque sorte. 1) Tout d’abord, désirer être en classe, c’est-à-dire avoir suffisamment envie d’exercer son métier pour être présent aux situations. Sans cela, comment transmettre aux élèves l’envie d’y être aussi ? La formation continue, notamment les groupes d’analyse de pratiques professionnelles, peuvent entretenir cette flamme. 2) Avoir la conviction de l’éducabilité des élèves. Même dans les situations apparemment sans issue, tout n’est jamais définitivement joué. Des progrès même ténus sont possibles, qui peuvent s’avérer déterminants pour l’élève en difficulté si l’enseignant sait les voir[25]. 3) Faire preuve de « bonneveillance », selon l’expression de Daniel Marcelli ; cette nécessité que l’enseignant offre à l’enfant, au jeune, le regard dont il a besoin pour grandir et progresser[26]. 4) Enfin, être à l’initiative du respect de l’enfant, du jeune, donc de l’élève sans condition préalable ; ce « respect initié par l’enseignant » dont j’ai parlé plus haut.

La dernière loi d’orientation sur l’école ne dit pas autre chose, lorsqu’elle définit les missions du service public d’éducation et des enseignants[27]. En voici quelques morceaux choisis, en guise de conclusion : « Le service public de l’éducation est conçu et organisé en fonction des élèves (…). Il reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser. Il veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction. (…) Outre la transmission des connaissances, la Nation fixe comme mission première à l’école de faire partager aux élèves les valeurs de la République. Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité. Par son organisation et ses méthodes, comme par la formation des maîtres qui y enseignent, il favorise la coopération entre les élèves. (…) Dans l’exercice de leurs fonctions, les personnels mettent en œuvre ces valeurs. (…) Le droit à l’éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, d’exercer sa citoyenneté ».

Bruno Robbes[28]



[3] Observons qu’il ne dit pas « le professeur » ou « l’enseignant », mais qu’il préfère employer un lexique qui l’inscrit dans la tradition de l’École républicaine.

[4] En particulier, une posture première d’enseignant. J’y reviendrai en conclusion.

[5] Il s’appuie pour cela sur des savoirs relevant de la communication, sur des dispositifs pédagogiques et didactiques permettant aux élèves de mieux s’approprier les savoirs scolaires.

[6] Robbes, B. (2010). L’autorité éducative dans la classe. Douze situations pour apprendre à l’exercer. Paris : ESF.

[7] Le seul ministre de l’Éducation nationale qui, a ma connaissance, en ait jamais parlé publiquement est Gilles de Robien en décembre 2005 et en janvier 2006, suite à l’agression d’une professeure dans un lycée professionnel d’Étampes (91).

[8] Ministère de l’Education nationale. (2010, 7-8 avril). Fiches thématiques. Contributions du conseil scientifique. Site des États généraux de la sécurité à l’École. [En ligne]. http://media.education.gouv.fr/file/Mediatheque/88/5/fiches_thematiques_141885.pdf ; Conseil scientifique de suivi des États généraux de la sécurité à l’École. (non daté). Propositions concernant la formation des enseignants (formation initiale et continue et accompagnement). [En ligne]. http://media.education.gouv.fr/file/09_septembre/08/0/Conseil_scientifique_EGSE_-_Propositions_formation_des_enseignants_155080.pdf ; voir encore les travaux et les publications de l’actuelle Délégation ministérielle chargée de la lutte et de la prévention des violences, sur le site www.education.gouv.fr

[9] Robbes, D. (coord.) (2013). L’autorité éducative. La construire et l’exercer. Amiens : SCÉREN-CRDP d’Amiens et CRAP-Cahiers pédagogiques (Repères pour agir).

[10] Piaget, J. (1930-1964/1998). De la pédagogie. Paris : Odile Jacob.

[11] Ce principe « je m’applique à moi-même ce que j’exige d’eux » s’inspire des travaux du philosophe Paul Ricœur. Ricœur, P. (1990). Soi-même comme un autre. Paris : Seuil ; (1993). Le soi digne d’estime et de respect. Autrement, Série Morales n° 10, p. 88-99.

[12] Extrait des obligations des personnels enseignants et non enseignants. Circulaire n° 2014-088 du 9 juillet 2014, publiée au Bulletin Officiel n° 28 du 10 juillet 2014 – Règlement type départemental des écoles maternelles et élémentaires publiques. À noter que ce texte recense les droits et obligations de tous les membres de la communauté éducative (élèves, parents, personnels enseignants et non enseignants, partenaires et intervenants).

[13] J’emprunte cette formule à Robert Gloton, ancien président du GFEN, qui écrivait très exactement : « Le respect est comme l’amour, il s’éprouve, il ne se commande pas » (Gloton, R. (1974). L’autorité à la dérive. Paris : Casterman, p. 42).

[14] « L’autorité exclut l’usage de moyens extérieurs de cœrcition ; là où la force est employée, l’autorité proprement dite a échoué. L’autorité, d’autre part, est incompatible avec la persuasion qui présuppose l’égalité et opère par un processus d’argumentation. (…) S’il faut vraiment définir l’autorité, alors ce doit être en l’opposant à la fois à la contrainte par force et à la persuasion par arguments » (Arendt, H. (1972). Qu’est-ce que l’autorité ? In La crise de la culture (pp. 121-185). Paris : Gallimard, p. 123).

[15] Direction générale de l’enseignement scolaire (2006, juillet). Conduites à tenir en cas d’infractions en milieu scolaire. Mémento [en ligne]. http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Action_sanitaire_et_sociale/27/8/memento_infractions_115278.pdf

[16] « Lieu spécifique de transmission et de formation », l’école doit « promouvoir une morale civique (…) compatible avec les choix privés les plus divers sur les plans éthique, culturel et religieux (…) morale ouverte à tous et qui permet, à chacun, d’échapper à la fois à la clôture narcissique et au grégarisme communautaire » ; « lieu intermédiaire et transitionnel », l’école est un lieu où le droit ne peut entrer que partiellement, « conditionné (…) par des impératifs d’éducation » ; « lieu d’exercice et de simulation », l’école est un lieu où « pour les apprentissages sociaux (…), on ne paie pas cash toutes ses bêtises » ; « lieu hospitalier » enfin, l’école « doit accueillir tous les enfants sans exclusive » (Prairat, E. (2013). La morale du professeur. Paris : PUF, p. 32-37).

[17] Circulaire n° 2011-112 du 1er août 2011, publiée au Bulletin Officiel spécial n° 6 du 25 août 2011 – Le règlement intérieur dans les établissements publics locaux d’enseignement ; Circulaire n° 2014-059 du 27 mai 2014, publiée au Bulletin Officiel n° 22 du 29 mai 2014 – Application de la règle, mesures de prévention et sanctions.

[18] C’est cette inquiétude qui fut notamment à l’origine de la tenue des États généraux de la sécurité à l’École, en avril 2010. Voir aussi Moignard, B. (2014). Le collège fantôme. Une mesure de l’exclusion temporaire des collègiens. Diversité, n° 175, p. 63-70.

[19] Direction générale de l’enseignement scolaire (2012). Vademecum. Les mesures de responsabilisation dans les établissements du second degré [en ligne]. http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Sanctions_disciplinaires/27/5/Vade-mecum_mesures-responsabilisation-etablissements-second-degre_213275.pdf

[20] Ministère de l’Éducation nationale (2013, 22 avril) Morale Laïque. Pour une enseignement laïque de la morale. Résumé des préconisations du rapport [en ligne]. http://cache.media.education.gouv.fr/file/04_Avril/64/5/Rapport_pour_un_enseignement_laique_de_la_morale_249645.pdf

[21] Robbes, B. (2014, juillet). Comment aborder concrètement la question de la sanction dans un cours de morale ? Diotime, n° 61 [En ligne]. http://www.educ-revues.fr/DIOTIME/AffichageDocument.aspx?iddoc=99877

[22] Felouzis, G., Liot, F. et Perroton, J. (2005). L’apartheid scolaire. Enquête sur la ségrégation ethnique dans les collèges. Paris : Seuil.

[23] Battaglia, M. (2015, 22 janvier). « Notre école ne tient pas ses promesses à l’égard des jeunes des milieux populaires », Le Monde [en ligne].

[24] Article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires.

[25] Les nombreuses monographies élaborées par les enseignants pratiquant la pédagogie institutionnelle en témoignent.

[26] « La bonneveillance peut se définir comme une surveillance bienveillante qui consiste à (re)garder son enfant de telle sorte qu’il soit préservé des mauvaises expériences mais qu’il puisse aussi faire et recevoir les bonnes expériences, bases sur lesquelles la relation de confiance pourra s’élaborer » (Marcelli, D. (2003). L’enfant chef de la famille. L’autorité de l’infantile. Paris : Albin Michel, p. 282).

[27] Article L111-1 du Code de l’éducation, modifié par la Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013.

[28] Maître de conférences en Sciences de l’éducation – laboratoire École, Mutations, Apprentissages – Université de Cergy-Pontoise. Responsable du master MEEF 3 – Encadrement Éducatif (Conseiller Principal d’Éducation) – ESPE de l’académie de Versailles.