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C’est le grand absent des débats sur l’évaluation. Pourtant le B2i a révolutionné l’évaluation en proposant pour la première fois dans le système éducatif français, en 2000, une évaluation par compétences. Réformé en 2013, étendu , en théorie, jusqu’au lycée, le B2i est absent des projets de textes sur l’évaluation qui ont circulé récemment. Alors que le ministère généralise l’enseignement de l’informatique, de l’éducation aux médias et veut relever le défi de l’intégration du numérique dans le système éducatif, le B2i n’a t’il plus sa place ? La ministre devrait trancher très prochainement sur cet objet très particulier du système éducatif.

« Le B2i qui se limite apparemment à une simple attestation de compétence délivrée aux élèves se révèle à l’analyse bien plus qu’un simple produit fini destiné à satisfaire l’image que l’école donne d’elle-même au sujet des TIC. Il s’agit surtout d’un véritable processus mis en place pour répondre à une question d’équité entre tous, la certification que tous les Français qui sortent de l’école disposent bien d’un « socle de compétences » informatiques et internet ». En 2001, dans un gros dossier consacré à cet objet totalement nouveau dans le paysage éducatif français, Bruno Devauchelle en saluait les singularités.

Un dispositif révolutionnaire

Institué en novembre 2000, le B2i est apparu de suite comme particulièrement révolutionnaire et ambitieux. Qu’on en juge. A l’orée d’un nouveau millénaire, le B2i introduisait pour la première fois une évaluation de compétences en contexte. Il posait aussi pour la première fois cette évaluation comme un socle commun à tous les élèves. Cette évaluation devait être faite par une équipe d’enseignants et non dans une discipline particulière. L’évaluation devait avoir lieu à la demande de l’élève au moment où il se sentirait prêt. Elle couvrirait toute la scolarité de l’école au lycée. Enfin elle reconnaissait des compétences acquises hors de l’école, matérialisant la continuité éducative. En 2000, le B2i c’était déjà la loi d’orientation de 2013, mais en plus ambitieux.

Pour quel bilan ?

Evidemment la réalité a été très différente de ces ambitions. Le B2i a été recadré par des textes en 2006, dans un sens plus « connaissances » puis en 2013, avec un retour aux sources « compétences ». Surtout, le B2i s’est heurté aux réalités du monde scolaire, de ses pratiques et de ses représentations. La liberté dont a bénéficié le B2i n’a pas réussi à assurer son intégration heureuse dans le système. Son inclusion dans la loi de 2005 non plus. 15 ans après son lancement, le B2i n’a toujours pas réussi à pénétrer la forteresse lycée qui a déjà assez à faire avec le bac, où le b2i n’apparait pas.

Le B2i a du transiger avec la logique disciplinaire au collège où souvent il est devenu la chose du professeur de technologie. A l’école il doit s’accommoder avec la réalité de l’équipement informatique et la multiplication des « éducation à » qui s’accumulent avec les rappels constants à l’ordre sur les fondamentaux.

Le bilan est clair. Si le B2i fait finalement partie du paysage de l’école et du collège, il n’a pas réussi à le transformer. Trop révolutionnaire sans doute, le B2i fait figure d’idéal inatteignable et maintenant, au moment des réformes, presque de mauvais augure.

Le B2i inutile avec les nouvelles réformes ?

Mais c’est maintenant que se décide l’avenir du B2i. Alors que le ministère arrête une réforme de l’évaluation à l’école et au collège, curieusement le B2i n’est apparu dans aucun projet alors même qu’il a été très précurseur en ce domaine. Le B2i interroge aussi la réforme des programmes. Les nouveaux programmes introduisent un enseignement de l’informatique qui tire vers le codage et donc n’est pas une éducation aux usages. Pour ceux-ci les nouveaux programmes généralisent une éducation aux médias et à l’information, mais là aussi ce n’est pas exactement le champ du B2i. Enfin le plan numérique annoncé pour 2016 veut généraliser l’intégration du numérique dans les disciplines au collège.

Toutes ces évolutions interrogent l’avenir du B2i. Faut-il le garder ou est -il en germe dans ces nouveaux plans et programmes ? Le système éducatif a-t-il encore besoin de cet objet singulier pour faire évoluer ses pratiques ?

Le B2i une ouverture vers l’emploi ?

C’est oublier une des composantes du débat.  » L’attente sur le numérique dans les formations post-bac est de plus en plus importante », nous disait B Devauchelle en 2013. Il posait aussi la question des compétences professionnelles attendues par les entreprises.  » Il est probable que l’appellation elle-même sonne mal aux oreilles des professionnels et surtout que le référentiel donne peu à voir les véritables savoir-faire qu’en attendent ceux-ci. En donnant la part principale à des pratiques personnelles et scolaires, on a du mal à imaginer comment faire valoir le B2i sur le marché du travail. Il semble bien que cette voie soit une des principales pour sortir le B2i de son ornière scolaire ».

Aujourd’hui l’avenir du B2i va se décider au croisement de ces deux univers. D’un coté le B2i n’est plus en rupture avec la culture scolaire promue par les réformes ministérielles ce qui semble atténuer sa singularité. De l’autre, la maitrise raisonnée de la culture numérique est devenue une qualité déterminante sur le marché de l’emploi. L’Ecole peut-elle ne pas le voir ?

François Jarraud

Le nouveau b2i en 2013

Le dossier de 2001

Le dossier de 2004