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Sous le titre « Les élèves immigrés et l’école », c’est une plaidoirie argumentée en faveur d’une meilleure intégration scolaire que se livre l’OCDE. Statistiques à l’appui , l’Organisation montre que les élèves immigrés peuvent avoir un bon niveau. Pourtant les chefs d’établissement français sont trois fois plus nombreux que dans les autres pays de l’Ocde à considérer les élèves issus de l’immigration comme une source de difficultés. Comment expliquer cet écart ? En se basant sur les cas des pays qui ont fait progresser rapidement leurs élèves issus de l’immigration, l’Ocde donne quelques pistes pour avancer.

 » Les analyses mettent au jour un second constat frappant : la variation considérable entre les pays de la performance des élèves immigrés et de leurs pairs autochtones, même après contrôle de leur milieu socioéconomique. Ce constat laisse penser que les politiques publiques peuvent jouer un rôle important dans la réduction des désavantages accompagnant les migrations ».

Les performances sont en effet très variable. On remarquera qu’en France elles sont parmi les plus faibles des pays développés (seule la Suède et la Grèce font pire) et que l’écart entre immigré et autochtone est particulièrement fort : 100 points soit presque deux années d’école. Pire encore : la France fait partie des rares pays où le niveau s’est dégradé depuis 2003.

L’autre constat de l’Ocde c’est que l’écart de niveau entre immigrant et autochtone s’explique par les politiques éducatives des pays d’accueil. Ainsi, selon l’Ocde, « les élèves immigrés originaires de pays de langue arabe et vivant aux Pays-Bas obtiennent un score en mathématiques supérieur de 100 points à celui des élèves originaires des mêmes pays mais installés au Qatar, et ce même après contrôle des différences de milieu socio-économique – soit un écart correspondant à peu près à la différence de performance entre la Corée et la Grèce. Les élèves albanais ayant émigré en Grèce obtiennent un score en mathématiques supérieur de 50 points à celui de leurs compatriotes issus d’un milieu socioéconomique similaire, mais installés au Monténégro ». Autrement dit ce n’est pas l’origine des migrants qui compte mais le pays d’accueil.

Il est donc possible de relever rapidement le niveau des enfants immigrés. Selon l’Ocde, c’est ce qu’a fait par exemple l’Allemagne.  » En moins d’une décennie, l’Allemagne est ainsi parvenue à améliorer la performance en mathématiques de ses élèves immigrés de la deuxième génération de 46 points de score – soit l’équivalent de plus d’une année de scolarité dans le cadre institutionnel, même après contrôle des effets de composition ».

Le rapport propose des pistes pour mener ces politiques. Le premier c’est la scolarisation en pré élémentaire. On remarquera qu’en France, où cette scolarisation est générale à partir de 3 ans, elle touche quand même moins les immigrés que les autochtones.

L’autre c’est d’éviter de regrouper les élèves de façon précoce par aptitudes et d’éviter d’avoir des regroupements par classe. Ainsi, note l’Ocde, «  il existe des différences sensibles entre les pays quant au degré de préparation des établissements d’enseignement pour la gestion d’effectifs plurilingues et multiculturels. Plus de 15 % des chefs d’établissements défavorisés en Belgique, en France, en Islande et au Qatar indiquent ainsi que la diversité ethnique entrave l’apprentissage au sein de leur établissement. Ces différences reflètent la concentration d’élèves immigrés – soit ceux qui présentent sans doute les lacunes scolaires et linguistiques les plus importantes – dans les établissements d’enseignement défavorisés. »

Ainsi, selon l’Ocde, il faut  » éviter la concentration des élèves immigrés dans les mêmes établissements d’enseignement défavorisés. Il est évident, et prouvé par les données du présent rapport, que les établissements d’enseignement qui peinent à obtenir de bons résultats avec les élèves autochtones, rencontreront encore plus de difficultés s’ils scolarisent un nombre important d’enfants ne parlant et ne comprenant pas la langue d’enseignement. Les pays répartissant les élèves immigrés dans tout un éventail d’établissements d’enseignement et de classes obtiennent avec ces élèves de meilleurs résultats ».

Ce n’est pas sans rapport. L’Ocde pointe aussi le sentiment d’appartenance à l’établissement. Or c’est en France que le sentiment d’appartenance à l’école est le plus bas pour les jeunes issus de l’immigration. Seulement 41% d’entre eux se sentent intégrés à leur école, alors que c’est el cas de 80% des jeunes immigrés en moyenne dans l’OCDE.

Dernier conseil de l’Ocde :  » Aller au devant des parents immigrés. Si les enseignants sont essentiels au succès des élèves immigrés à l’école, leurs parents jouent également un rôle déterminant. Les élèves réussissent ainsi mieux lorsque leurs parents comprennent l’importance de l’école, le fonctionnement du système d’éducation ». On mesure là aussi le chemin à parcourir…

François Jarraud

L’ouvrage

Les immigrés ne font pas baisser le niveau

Ce que l’école française a raté