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L’Ecole est-elle le meilleur investissement pour notre pays ? L’éducation peut-elle sortir la France de son marasme économique ? C’est ce qu’a recherché, avec prudence, France Stratégie, un service du premier ministre. Selon France Stratégie, l’impact économique d’une amélioration des résultats de l’Ecole serait important. Amener la France au niveau des résultats de l’Allemagne augmenterait le PIB de 0.1 à 0.3 points de PIB d’ici 2050. Un sacré pactole ! Mais comment faire ?

« Le niveau de revenu d’un pays est fortement corrélé à différents indicateurs du niveau d’éducation de la population… Une année d’études supplémentaire est associée en moyenne à un niveau supérieur du PIB par tête d’environ 30 % », écrit France Stratégie qui s’appuie sur des travaux d’économistes devenus des classiques comme ceux d’Eric Hanushek et de Ludger Woessmann.

Une affirmation ancienne

Depuis des années, l’OCDE tient d’ailleurs le même discours. Ainsi en 2010, Angel Gurria, secrétaire général de l’OCDE, expliquait que face à la récession mondiale, « l’éducation constitue un investissement essentiel », particulièrement dans un monde où la concurrence s’accroit.

L’OCDE avait calculé que l’instruction était une bonne affaire à la fois pour la société et pour les individus.  »  » En moyenne dans l’ensemble des pays de l’OCDE, un homme diplômé du supérieur génèrera 119 000 $ de plus en recettes fiscales et en cotisations sociales sur toute sa vie active qu’un diplômé du deuxième cycle du secondaire. Même après avoir pris en compte les dépenses publiques nécessaires au financement des formations supérieures, les recettes fiscales et les cotisations sociales des diplômés de l’université font de l’enseignement supérieur un bon investissement sur le long terme. Déduction faite du coût des formations supérieures, le gain à long terme pour le Trésor public s’élève en moyenne à 86 000 $ dans la zone OCDE, soit près de trois fois le montant de l’investissement public par étudiant dans l’enseignement supérieur ».

58 milliards de plus par an

Ainsi, en France, France Stratégie observe bien un lien entre le niveau éducatif des personnes et leur salaire moyen : « 20 ans après la fin de leurs études, les diplômés du supérieur ont un salaire en moyenne 80% plus élevé que ceux qui ont un diplôme du bac ou équivalent ».

Selon France Stratégie, pour Eric Hanushek et Ludger Woessmann, « un pays qui parviendrait à augmenter de façon durable son niveau de capital humain d’environ 100 points de score PISA verrait sa croissance rehaussée d’environ 1 point de PIB par an ».

En ce qui concerne la France, une évaluation présentée par France Stratégie estime les gains de PIB générés par une hausse des compétences des élèves de 15 ans (test PISA) au niveau de l’Allemagne (classée 9ème) et de la Corée du Sud (classée 1ère). Ils sont extraordinaires !

A en croire France Stratégie, si la France rattrapait le niveau éducatif de l’Allemagne sont PIB augmenterait de 25 milliard en moyenne par an de 2015 à 2075. Rattraper la Corée du Sud nous vaudrait 58 milliards de plus par an , soit le budget de l’Education nationale ! Le taux de croissance du pays augmenterait de 0.12% par an entre 2015 et 2050 dans le cas « allemand » et de 0.28% dans le cas « coréen ».

La réduction des inégalités

Dans le cas français, obtenir ces résultats ne serait possible qu’en diminuant les inégalités scolaires d’origine sociale, beaucoup plus fortes en France que dans les autres pays de l’OCDE.  » En France, l’écart moyen de performance entre le quart des élèves les plus défavorisés et le quart des plus favorisés représente 24 % de la moyenne nationale, révélant le poids des inégalités sociales et économiques sur les performances des élèves », note France Stratégie.

« En Allemagne, cet écart est de 16 %, en Corée du Sud, il est de 5 %. Il apparaît donc possible d’atteindre les objectifs d’amélioration moyenne du score PISA pour arriver aux scores moyens de l’Allemagne et de la Corée du Sud tout en réduisant les inégalités scolaires d’origine sociale à leur niveau ».

Prudence

« De telles estimations sont néanmoins à considérer avec prudence », déclare France Stratégie. « Car il reste délicat de quantifier l’impact causal de la qualité du capital humain sur la croissance. Au-delà de cette difficulté, il est également nécessaire d’identifier les réformes éducatives qui permettraient d’améliorer durablement et significativement les performances des élèves ».

Un graphique publié par France Stratégie montre qu’il y a bien une corrélation entre le nombre d’années d’étude et le PIB, le lien n’est pas mécanique. Ainsi pour des pays qui comptent une douzaine d’années d’études en moyenne, l’écart entre le PIB des différents pays est très important.

Comment générer en France le « choc Pisa » ?

« La principale difficulté reste de mettre en oeuvre une réforme qui permettrait d’améliorer significativement et durablement les performances des élèves… Il n’y a pas de schéma « clé en main » efficace d’allocation des ressources en éducation. Ainsi, toute augmentation de la dépense par élève ne garantit pas à elle seule d’obtenir une hausse des compétences des élèves », explique France Stratégie.

Des pays sont pourtant arrivés à relever significativement leurs résultats sur une ou 2 études PISA (4 ou 8 ans). C’est justement le cas de l’Allemagne par exemple, au prix d’un effort significatif consenti par les Länder. Maison peut aussi citer le Portugal ou la Pologne, pour rester chez nos voisins.

Et dans le cas de la France, France Stratégie indique des pistes précise d’amélioration : la prise en charge précoce des enfants, des tailles de classe réduites en cycle 1 particulièrement en éducation prioritaire. Une situation qui avait déjà été calculée par T Piketty et M Valdenaire en 2004.

En France, à chaque publication d’une nouvelle édition de Pisa, on s’attend à un choc en retour. Or force est de constater que le « sursaut » ne s’est pas produit même après Pisa 2012. Il reste 6 mois pour connaitre les nouveaux résultats de Pisa qui attendus en décembre…

François Jarraud

Etude France Stratégie

L’OCDE en 2010

Piketty et Valdenaire