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Il est fréquent d’entendre dire : « le bac, ça ne veut plus rien dire », ou « le bac, tout le monde l’a », ou encore « on fait cadeau le bac ». Une première réponse à ce type de réflexions, basée sur des faits indiscutables : ce n’est pas vrai, il y a de nombreux élèves qui ne sont pas reçus à cet examen, de l’ordre de 10 à 20% selon les séries ; il y a donc une certaine forme de mépris pour ces malheureux élèves lorsque l’on déclare qu’ils ne sont même pas capables d’obtenir un tel diplôme.

La constante macabre pour mieux comprendre la situation

Rappelons d’abord en quoi consiste le phénomène (inconscient) de constante macabre, dont l’existence est reconnue par la plupart des partenaires du système éducatif français. Une évaluation n’est crédible que lorsqu’il y a un certain pourcentage d’élèves en situation d’échec, une constante macabre en quelque sorte. Ainsi par exemple, beaucoup d’enseignants pensent qu’une moyenne de classe de 10 sur 20 correspond à une situation normale. Or, avec une répartition de notes à peu près régulière, une telle situation signifie que la moitié des élèves environ ont plus de 10, et que l’autre moitié a moins de 10 et se trouve donc dans une situation d’échec.

Personnellement, il m’a fallu une vingtaine d’années d’enseignement pour me rendre compte que c’était absurde : je trouvais normal que ma mission d’enseignant était remplie correctement lorsqu’un élève sur deux environ était en échec, quel que soit son travail, les qualités pédagogiques de l’enseignant, le niveau de difficulté du programme de révision, le climat…Avec recul, une telle situation peut vraiment sembler aberrante, grotesque, et surtout injuste car de nombreux élèves se trouvent ainsi dans une situation d’échec artificiel, non mérité.

Pas de constante macabre au bac

Dans un tel contexte, le taux de réussite au bac peut sembler « anormal », « hors norme ». Il n’en est rien. En effet, le baccalauréat est un des rares exemples en France où la constante macabre n’existe pratiquement pas. Pour savoir dans quel état d’esprit sont élaborés les sujets de bac, le témoignage de Jacques Moisan, ancien doyen de l’inspection générale de mathématiques, est édifiant : « Il est normal qu’un élève qui a travaillé réussisse », « une évaluation n’est pas faite pour piéger ».

Ainsi, les questions à résoudre sont classiques, c’est-à-dire analogues à des questions traitées en classe ; cela permet à des élèves travailleurs d’obtenir des résultats convenables.

Il y a donc effectivement un décalage entre les évaluations réalisées en cours d’année scolaire et la conception du baccalauréat. Mais ce qui est anormal, ce n’est pas le bac, mais l’évaluation usuelle empreinte d’un « esprit constante macabre ».

En conclusion, je suis convaincu que le bac est un examen sérieux.

Pour les élitistes, amateurs d’un esprit de compétition, souvent sournois et inconscient, qu’ils soient rassurés. Les élèves, après le bac, devront le plus souvent être confrontés à des concours pour acquérir une qualification professionnelle, et pour entrer dans la vie active.

André Antibi