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Questionner le monde en CE1 avec un ambassadeur virtuel, un Clément aplati, voilà le projet original que propose à ses élèves Isabelle Watrinet, professeure des écoles à Valence (26). La lecture d’un roman de littérature jeunesse sert de prétexte à explorer les autres classes du monde mais aussi à interroger ses préjugés : quel regard porte-t-on sur l’autre ? comment accepter les différences ? Ce projet riche, croisant différents domaines du socle de compétences, permet également une éducation aux médias de jeunes élèves, qui, en publiant en toute sécurité et avec l’aide bienveillante de leur enseignante, sur un réseau social, apprennent à échanger sans diffuser d’informations personnelles. Rencontre avec l’enseignante.

Dans quel contexte avez-vous mené ce travail ?

Enseignante depuis plus de vingt ans, j’aime particulièrement créer un lien entre mes élèves et les apprentissages : il s’agit en général d’un fil rouge autour de la production d’écrits. Le projet « Flat Stanley » (version originale de « Clément aplati ») offre cette singularité. Nous partons de la lecture d’un roman de littérature de jeunesse comme prétexte à explorer les autres classes du monde.

En 2015-2016, j’ai mené ce projet avec ma classe de CE1. Au mois de septembre nous avons travaillé en lecture-compréhension le début du roman « Clément aplati » de Jeff Brown, la suite de l’histoire a été découverte en lecture offerte. L’exploitation du roman peut être adaptée au niveau de classe, j’ai déjà mené les aventures de Clément aplati avec des classes de cycle 3.

Les élèves accrochent à l’histoire particulière de ce héros. Il est question de fantastique, d’enquête policière, mais aussi d’enseignement moral et civique (regard de l’autre, harcèlement). Ils accueillent avec enthousiasme l’idée de créer leurs propres personnages et de les envoyer par courrier postal, dans les mêmes conditions que dans le roman. Les parents sont dans la confidence du projet dès la réunion de rentrée, car ils seront mis à contribution dans le courant de l’année pour accueillir un Clément le temps d’un week-end ou des vacances.

Dans notre classe, les Clément accueillis avaient une place particulière : un bureau, un numéro d’appel, et même un cahier !

Les personnages sont créés de toutes pièces : écriture collaborative de l’histoire de l’aplatissement ; élaboration d’un courrier de présentation pour les classes accueillantes (par petits groupes en APC); création plastique des personnages. Quand tout est prêt, nous faisons une « expédition » à la Poste pour envoyer nos messagers. Les contacts se font ensuite par le biais du numérique jusqu’à leur retour vers le mois de mai.

Quels sont les domaines de compétences que vous avez travaillés avec vos élèves à l’occasion de ce projet ?

Ce projet permet de travailler un très large éventail de domaines de compétences : en premier lieu l’écriture et la production d’écrits, mais aussi « questionner le monde » (se situer dans l’espace, explorer les organisations du monde) ou la géographie au cycle 3 (connaissance de son territoire).

L’idée de ce projet est basée sur l’échange avec les autres classes : on travaille l’enseignement moral et civique (être à l’écoute, accepter les différences…), mais aussi le langage oral lorsqu’il s’agit de créer des documents sonores.

L’un des axes de votre projet est l’échange avec d’autres élèves, donc avec d’autres horizons, d’autres cultures. Quel bilan faites-vous de cette ouverture sur le monde de vos élèves ?

Les élèves ont vraiment été impliqués et intéressés par l’approche d’autres fonctionnements : ils se sont identifiés aux personnages ambassadeurs et le fait d’en accueillir en retour permet une réelle implication: on pense à partager chacune de nos activités, de nos découvertes, de nos lectures ou particularités.

Vous avez utilisé en particulier le réseau social Twitter : de quelle façon ? Avez-vous rencontré des réticences de la part des parents ? De la part de votre hiérarchie ? Quels conseils pourriez-vous donner à un collègue désireux d’utiliser ce média en classe ?

Nous avons ouvert un compte classe Twitter au mois d’avril, en milieu de projet, afin de participer au dispositif #Twictée. En le faisant nous avons découvert que 2 autres classes « Clément » y avaient un compte. Cela a permis une communication vraiment directe et beaucoup plus « réelle » avec elles. Les parents ont adhéré à la démarche car nous avions déjà un blog de classe et ils avaient une expérience des productions postées. Les quelques réticences ont vite été levées, grâce à la discussion, et la mise en valeur des réalisations des élèves. Twitter peut faire peur aux enseignants comme aux parents, avec une véritable inquiétude sur la diffusion d’informations personnelles sur les réseaux sociaux. Ici, il ne s’agit sur d’échanges autour de projets pédagogiques de classe, ou de groupes.

La visite de mon IEN dans l’école, Mme Schmitt @VMSRDZDM, a été le déclencheur : elle utilise elle-même ce réseau social pour diffuser les « jolies trouvailles » de ses passages dans les classes, et de fait, son accord ne faisait aucun doute. Il est indispensable, tout comme est nécessaire une découverte en amont des codes de Twitter : les balises, les abonnés, les paramétrages, le choix d’un compte ouvert ou privé. Ce dernier permet dans un premier temps de mieux filtrer les tweets, mais à l’inconvénient de limiter la visibilité. Mon conseil : commencer à tweeer en communiquant simplement avec une autre classe, ou en participant à un projet plus élargi ! Parmi les balises que je conseille, il y a #EMCPartageons, #twitconte #Pixeltag.

Propos recueillis par Delphine Barbirati

Sur le site de l’académie de Grenoble

Présentation du dispositif Clément aplati