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La décision de la Cour de Cassation de débouter une élève d’un lycée privé qui n’avait pas pu être accompagnée d’un avocat au conseil de discipline de son établissement peut-elle être étendue au public ? Nous avons sollicité Valérie Piau, avocate spécialisée dans el droit de l’Ecole , auteure de plusieurs ouvrages sur cette question.

« Cette décision, n’a pas d’incidence pour les établissements publics pour lesquels le droit de se faire assister par une personne de son choix qui peut être un avocat découle de l’article R 5111-32 du code de l’éducation », nous a-t-elle dit. « Ainsi dans les établissements publics, la famille peut se faire assister d’un avocat ».

« Cet arrêt qui paraît critiquable, affaiblit davantage la position de famille dans les établissements privés pour lesquels, si le règlement intérieur ne le prévoit pas, la famille pourrait se trouver privée de son droit d’être assisté par un avocat. Cette jurisprudence qui n’émane pas de la chambre plénière de la Cour de cassation, est susceptible de revirement » .

« Surtout la famille est susceptible de faire un éventuel recours devant la cour de justice européenne pour les 2 motifs suivants :

-la cour européenne des droits de l’homme a déjà jugé, que le droit à un procès équitable prévu à l’article 6 de la Convention des droits de l’homme s’applique aux procédures disciplinaires des fonctionnaires ou dans les prisons. Une instance non judiciaire en droit interne peut être qualifiée de tribunal si elle exerce une fonction juridictionnelle . Ainsi, l’affirmation de la Cour de cassation selon laquelle l’article 6 de la Convention sauvegarde des droits de l’homme n’est pas applicable à un organe de discipline est sujet à discussion.

– Si l’article 6 de la cour européenne des droits de l’homme n’impose pas que les procédures de première instance en matière civile ou pénale devant les organes qui ne sont pas intégrés aux structures judiciaires ordinaires telles que certains organes disciplinaires remplissent les exigences de procès équitable, dans ce cas le justiciable doit disposer d’un recours devant un organe judiciaire indépendant, doté de la plénitude de juridiction et offrant les garanties de l’article 6. Or, c’est là que le bât blesse puisqu’en violation de l’article 6, la famille ne dispose d’aucun appel en cas d’exclusion par un conseil de discipline d’un établissement privé sous contrat. Ce vide juridique, est susceptible de conduire à des abus en cas d’exclusion, par l’établissement privé, qui ne respecte pas les règles d’un procès équitable , sans aucune possibilité d’appel pour la famille devant quelque organisme que cela soit. En résumé, selon cette jurisprudence, les familles, pourraient être exclues, par un conseil de discipline ne remplissant pas les règles du procès équitable, sans droit d’être assisté ‘un avocat et sans aucune possibilité d’appel. À suivre donc l’avis de la cour européenne des droits de l’homme si elle est saisie ».

Propos recueillis par F Jarraud

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Le cabinet Piau

Sur la décision de la Cour de cassation