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Annoncée le 25 mai par Jean-Michel Blanquer, la nouvelle aide aux devoirs, appellée « Devoirs faits », sera proposée obligatoirement par tous les collèges. Le ministre envisage une possible extension à l’école. Il propose de la confier à des enseignants comme à des assistants d’éducation ou des associations. Mais cette forme d’aide est-elle efficace ? Et à quelles conditions ? Bruno Suchaut, directeur de l’Unité de recherche pour le pilotage des systèmes pédagogiques du Canton de Vaud, revient sur ces questions. Pour lui il est urgent de prendre le temps de réfléchir au dispositif que l’on veut créer.

L’idée d’instaurer un temps d’étude pour faire les devoirs à l’école ou au collège revient régulièrement, pratiquement à chaque alternance. Mais elle n’est jamais totalement et durablement mise en place. Pourquoi ?

La question des devoirs à la maison est un sujet important aussi bien pour les enseignants que les parents. Et cela dans tous les pays, pas seulement en France Les acteurs de l’école accordent une grande importance aux devoirs.

En effet on se souvient de « l’accompagnement éducatif » décidé par X Darcos en 2007 dans 1000 collèges puis en principe généralisé. En réalité la mesure a été très peu appliquée.

Si ça revient tout le temps c’est que, pour autant que les ministres prennent en compte les recherches, on sait qu’il y a un lien positif entre le temps passé à faire ses devoirs et la réussite scolaire. Là dessus on a des résultats solides particulièrement pour le collège.

Ainsi Pisa a pu chiffrer l’impact du temps passé aux devoirs. En Allemagne, par exemple, chaque heure consacrée aux devoirs correspond à 16 points en plus en maths. Il y a donc un vrai consensus sur l’utilité des devoirs.

Le débat porte plutôt sur la mise en place. Faut-il mettre en place ces heures d’études uniquement dans les établissements où les familles ont besoin de cette aide ou la généraliser ? Avec quel type de personnel ? Ce qui est certain c’est que c’est un instrument de réduction des inégalités.

La question des personnels est importante ?

Bien sur tout va dépendre de sa qualification. Si on emploie du personnel de surveillance on est moins dans une logique de compensation et d’aide. Une étude française a pu montrer l’impact de cette aide quand elle est faite par des enseignants.

Mais il faut aussi que les devoirs donnés à faire soient le prolongement de ce qui se fait en classe. C’est une vraie question pédagogique.

Un professeur de français peut aider des élèves en maths ?

Peut-être pas au lycée mais à l’école et au collège certainement. Au lycée les inégalités se renforcent , les familles aisées ayant un recours plus fréquent aux cours particuliers.

Ces aides aux devoirs existent dans d’autres pays ?

Pratiquement dans tous, mais avec des financements différents. En Asie , on va avoir largement recours à du financement privé pour faire les devoirs mais aussi répéter els cours et préparer les examens. Dans d’autres pays ce sont les communes qui prennent en charge l’aide aux devoirs, comme c’est le cas en France au primaire.

A quelles conditions l’aide peut-elle être efficace ?

Il faut observer comment elle est mise en place. Le danger ce serait d’avoir une organisation très variable d’un point à un autre avec ici une simple surveillance des devoirs et ailleurs une aide efficace aux élève. Il va falloir aussi observer la taille des groupes réunis pour l’aide. Enfin il va falloir aussi se prémunir contre le détournement de ce temps, comme on le voit au primaire pour l’APC que certains voudraient transformer en un temps de concertation. Il va donc falloir prendre le temps de la réflexion. Une aide comme celle là ne peut pas se décider du jour au lendemain.

Propos recueillis par François Jarraud

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