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« La série S est une filière généraliste dotée d’une légère coloration scientifique » s’indigne l’académie des sciences dans une courte note publiée en octobre 2017. Signé par 19 de ses 262 membres, le communiqué explique la nécessité d’une restructuration de l’enseignement scientifique au lycée. La note met à l’index les nouvelles pratiques pédagogiques telles la classe inversée, la contextualisation et l’évaluation par compétences. Ces dernières « accroissent les inégalités face au savoir et à l’accessibilité aux études ». L’académie des sciences préconise des programmes clairs avec davantage de profondeur. La réduction importante du volume horaire en sciences et des chapitres très descriptifs aboutissent à des connaissances éphémères. Quelles sont les préconisations de l’institution pluricentenaire pour le nouveau lycée ?

Des réformes successives à conséquences négatives

La publication de l’académie des sciences revient sur les réformes des années 2000 et 2010 au lycée et souligne les conséquences négatives sur l’enseignement des mathématiques et de la physique-chimie notamment aux résultats de Timss. La France décroche et arrive dernière à l’étude publiée en novembre 2016. « Les nouveaux bacheliers S arrivent désormais dans l’enseignement supérieur scientifique sans y avoir été véritablement préparés ». Pour les signataires, il faut « repenser la série S et les pratiques d’enseignement de manière à satisfaire les besoins des métiers de la science ».

Les lacunes en matière de calcul viennent entre autre de l’usage « mal géré des calculettes ou tablettes ». La faiblesse dans les raisonnements vient aussi « du manque de vocabulaire précis et ciblé » et surtout du manque de temps pour enseigner correctement.

Quid de La main à la pâte ?

Dans ces constats listés par l’académie, la critique des nouvelles pratiques pédagogiques type classe inversée n’est pas passée inaperçue sur les réseaux enseignants. Nombre d’entres eux soulignent en retour « une méconnaissance de leurs pratiques et surtout des résultats obtenus en classe par les élèves ».

D’un autre côté, on peut s’étonner de l’absence de retour sur le dispositif « La main à la pâte » créé en 1996 par la dite académie. Quid du dispositif qui promeut « une pédagogie d’investigation permettant de stimuler chez les élèves l’esprit scientifique » ? La démarche pédagogique pluridisciplinaire de « La main à la pâte » est claire : il s’agit « de promouvoir l’enseignement des sciences à l’école primaire en privilégiant la construction des connaissances par l’exploration, l’expérimentation et la discussion. La science n’est plus un apprentissage d’énoncés figés à mémoriser mais devient une pratique active, interrogative et expérimentale et une construction collective. »

Du primaire au secondaire, la fondation a réussi à imposer une version de l’EIST en classe de 6ème depuis 2016. Pourtant, cet enseignement intégré des sciences fut l’objet d’un premier rapport en 2009 qui indiquait « déjà » le manque de rigueur des élèves. Cela est dû à des phases d’activités « qui se déroulent dans une atmosphère de réflexion un peu bouillonnante qui n’est pas toujours propice au développement de leur rigueur» explique ce rapport de 152 pages de la DEPP. La polyvalence des enseignants de sciences qui découle de cette réforme améliorera-t-elle l’enseignement scientifique ?

Des préconisations et du bon sens

L’académie des sciences demande donc un recentrage des cours sur des objectifs plus spécifiquement scientifiques comme d’ailleurs demandé une semaine plus tôt par un groupe de travail des sociétés savantes de mathématiques et d’informatique.

Le cours de l’enseignant doit « identifier clairement les résultats et les méthodes à connaître ». Les enseignants doivent « définir des objectifs clairs et raisonnablement ambitieux en matière de techniques de calcul ». On n’évoque pas de pluridisciplinarité mais des zones de superposition entre champs disciplinaires. Enfin, les enseignants de mathématiques, sciences-physiques et SVT doivent véritablement avoir leur mot à dire pour l’entrée dans une voie scientifique. Par ailleurs, on peut s’interroger sur l’unique évocation de la biologie dans ce rapport. Parfois qualifiée de matière rédactionnelle, les sciences de la vie et de la Terre recouvrent aussi des intérêts scientifiques fondamentaux et contribuent à la construction des concepts scientifiques.

Julien Cabioch

Note de l’académie des sciences

Propositions pour le futur programme de mathématiques du lycée

Dans le Café

Timss : La France en queue de peloton en maths et sciences

Rapport EIST 2009

Rapport EIST 2012