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« La période de la semaine de 4 jours et demi d’école par semaine a été celle de la plus forte baisse de niveau en France ». Dans sa conférence de presse de rentrée, JM Blanquer a fait le lien entre la semaine de 4.5 jours et les résultats de PIRLS, une enquête internationale évaluant les compétences en lecture. La réforme des rythmes scolaires a-t-elle vraiment fait baisser le niveau des élèves français ?

Blanquer lance la polémique sur la semaine de 4.5 jours

« Arrêtons de vivre sur de fausses images. La période de la semaine de 4 jours et demi d’école par semaine a été celle de la plus forte baisse de niveau en France… Il y a des débats parisiens sur ces questions mal posées avec un arrière plan polémique ». Le 29 août, interrogé sur les effets de la généralisation de la semaine de 4 jours suite au décret qu’il a pris en arrivant au ministère, JM Blanquer a lancé une nouvelle polémique en accusant la réforme des rythme scolaires mise en place par V Peillon de la baisse du niveau évaluée dans l’enquête internationale PIRLS.

Qu’est ce que PIRLS ?

Selon les résultats de PIRLS, une enquête internationale qui évalue le niveau en lecture des élèves de 9-10 ans (CM1), la France se situe au dessus de la moyenne des 50 pays participant (500) mais à la 34ème et presque dernière place en Europe. Avec un indice de 511 points nous sommes en dessous de la moyenne européenne (544) et loin de la Russie (581) , de Hong Kong, de la Finlande qui prennent les meilleures places. Nos voisins font nettement mieux : Allemagne 537, Angleterre 559, Italie 548 et Espagne 528. Surtout nous reculons par rapport à nous-mêmes. La France avait fait un score de 525 points en 2001, puis de 520 en 2011. Depuis la baisse s’accélère.

La baisse résulte de l’augmentation du nombre des élèves très faibles qui a aussi été reconnue par les enquêtes Cedre du ministère. Cèdre montrait déjà qu’en fin de Cm2 40% des élèves n’atteignent pas les objectifs attendus en lecture. Ainsi la part des élèves de haut niveau est passée de 7 à 4% depuis 2001. Celle des plus faibles atteint 39% contre 25% dans l’OCDE. Les points faibles ce sont les textes informatifs plus que les textes narratifs. Surtout ce n’est pas le décodage mais la compréhension. Les jeunes français savent prélever des informations dans un texte mais ne savent pas en tirer des inférences pour comprendre les textes. Ils ont du mal à argumenter et à s’exprimer. Depuis 2001 nous avons perdu 8 points sur le prélèvement d’informations mais 21 sur l’interprétation.

Quel rapport entre PIRLS et le périscolaire ?

La réforme des rythmes explique-t-elle cette chute des résultats ? Les élèves évalués dans PIRLS ont fait toute leur scolarité avec les anciens programmes de 2008, plutôt conformes aux idées de JM Blanquer, les nouveaux programmes étant mis en place seulement en 2016 à l’école c’est a dire au moment où PIRLS évalue les élèves. Ces enfants en CM1 en 2016 ont à peine connu la réforme des rythmes. Et il se trouve que PIRLS n’évalue pas leurs compétences dans les activités périscolaires mais la lecture.

PIRLS montre le poids des facteurs sociaux sur ce taux d’échec. L’école française y est décrite par les élèves comme une des écoles les moins sures et disciplinée parmi les pays de l’OCDE. Quant au degré de satisfaction des enseignants envers leur travail il est le plus bas de toute l’OCDE : 26 de très satisfaits contre 57% en moyenne. Pirls pointe d’autres éléments de misère. On sait que la France compte près de 3 millions d’enfants pauvres. Pirls montre que , loi Lang ou pas, la France est un des pays où les parents aiment le moins lire : 22% aiment la lecture contre 32% dans l’OCDE. Qui oserait dire que ce désamour envers l’école des parents, ce déficit culturel est sans rapport avec la misère et sans effet sur la scolarité des enfants ?

Comment Blanquer utilise PIRLS

Ce n’est pas la première fois que JM BLanquer utilise PIRLS pour justifier sa politique. En décembre 2017 il avait utilisé ces résultats pour annoncer la révision des programmes de l’école et la mise en place des évaluations expliquant que « la liberté pédagogique ce n’est pas l’anarchie ». Alors que PIRLS montrait des difficultés en compréhension et non déchiffrage chez les jeuens français, le ministre et ses programmes mettent l’accent sur le déchiffrage et la fluence en lecture. C’est aussi PIRLS qui justifie « la dictée quotidienne » et à l’époque la récitation quotidienne, un élément de communication un peu passé à la trappe depuis.

Les propos du ministre le 29 août montrent surtout son goût pour la polémique stérile et son incapacité à assumer une politique. La vérité c’est que le retour à la semaine de 4 jours , qui concerne maintenant 85% des communes, a surtout permis à l’Etat de récupérer immédiatement près de 500 millions servant à financer les activités périscolaires. Ce faisant il a aussi permis de faire plaisir aux maires en réduisant leurs dépenses et aux enseignants qui récupèrent une journée libre. Pour les enfants, elle se traduit par des journées d’école particulièrement chargées. Ce n’est pas bon pour les apprentissages et particulièrement pour les enfants en difficulté avec l’école. Mais ils ne voteront que dans 10 ans, eux…

François Jarraud

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