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Le 7 janvier 2019 débutera la troisième édition de Twoulipo. Cinq semaines durant lesquelles 140 classes du CP au lycée s’affronteront lors d’un défi d’écriture sous contrainte. Twoulipo, c’est la contraction de Twitter et d’Oulipo – nom d’une association de passionnés de littérature fondée par Raymond Queneau et par le mathématicien François le Lionnais. Le défi est lancé sur Twitter et les élèves devront twitter leurs productions chaque semaine avec l’hashtag #Twoulipo.

Frédéric Dupont, professeur des écoles depuis bientôt vingt ans dans l’école Charles Péguy du XIe arrondissement parisien, a découvert Twitter, comme support d’activités pédagogiques en mars 2015. Alors, quand au hasard des tweets, il découvre le projet #Twoulipo en septembre 2016, c’est naturellement qu’il s’est lancé dans l’aventure. Depuis, il s’est impliqué dans l’équipe organisatrice de l’événement. Pour l’édition 2017, il a produit le graphisme du compte Twitter et a créé un album numérique présentant toutes les créations des différentes équipes. D’ailleurs, Julien Crémoux, professeur des écoles à Nuits-Saint-Georges qui est à l’initiative de Twoulipo, et lui ont présenté le projet lors de l’université d’été Ludovia, en août 2018.

Produire des écrits sous contrainte et collectivement

Chaque début de semaine, les élèves des classes participantes visionneront une vidéo indiquant le défi de la contrainte d’écriture pour la semaine. Durant la semaine, chaque élève, soutenu par l’enseignant mais aussi par ses camardes dans le cadre d’un travail d’écriture collective, rédigera son texte. Les différentes productions seront présentées à l’ensemble de la classe, affichées ou lues à voix haute. Trois textes – celui qui respecte le mieux la contrainte, celui qui est le plus drôle et celui qui fait le plus preuve d’imagination – sont sélectionnés par vote et publiés le lundi suivant sur Twitter. La semaine suivante, chaque classe votera pour désigner le meilleur texte de la catégorie de son équipe. Mais écrire sous contrainte, qu’est-ce que cela signifie ? « Écrire sous contrainte, c’est, par exemple, supprimer une lettre comme le E, obliger à écrire avec des mots qui commencent par la même lettre ou bien encore supprimer une nature grammaticale comme interdire d’utiliser des noms communs. Les idées sont très nombreuses et variées et permettent une belle créativité dans l’écriture » explique Fréderic.

Cette année, il a 27 élèves impatients de se lancer dans le défi d’écriture. Il faut dire que cela fait un certain temps qu’il leur en parle. Cette semaine, par exemple, c’est le lancement. « Nous avons regardé la vidéo qui lance vraiment le projet. La vidéo explique la contrainte de cette Semaine 0 et indique la démarche à suivre, un seul acrostiche de présentation par classe. Même s’il y a un exemple d’acrostiche dans la vidéo, ce qui a été notre point de départ, je leur ai expliqué que cela pouvait se présenter de différentes manières : soit un mot par lettre, soit en faisant des phrases complètes à partir des lettres du mot. Comme il faut présenter la classe, je leur ai conseillé d’utiliser la seconde solution mais chacun est resté libre. Pour la recherche de l’acrostiche, j’ai donné à chaque enfant une feuille où j’ai déjà écrit les lettres de notre pseudo sur Twitter @CM1B_Peguy. Au crayon à papier, chacun a commencé dès ce lundi à écrire quelque chose. Mardi, nous avons poursuivi l’écriture. Certains textes sont terminés, d’autres nécessitent encore de l’enrichissement. Nous ferons notre choix définitif en fin de semaine lors d’un vote de la classe ».

Cinq semaines au rythme de défis d’écriture riches en apprentissages

Ainsi, à partir du 7 janvier, et pendant les cinq semaines suivantes, le défi rythmera les apprentissages des élèves de cette classe de CM1, tout comme ceux des 139 autres classes participantes, réparties en équipes de sept. « Chaque semaine se déroulera de la même manière. Le lundi matin, toute la classe visionnera la vidéo indiquant la contrainte de la semaine. Dès le lundi après-midi, sur une feuille préparée par mes soins, les enfants commenceront à écrire quelque chose. En fonction de la difficulté, le mardi et le mercredi, il pourra y avoir un retour collectif permettant de préciser certaines choses ou bien pour apporter de l’aide comme la recherche d’une banque de mots facilitant l’écriture. Le jeudi, les créations devront être terminées. Je les récupèrerai alors toutes afin de projeter au tableau les différentes phrases oulipiennes de la classe le vendredi. On procédera ensuite aux votes pour choisir la phrase la plus réussie, la phrase la plus drôle et la phrase coup de cœur. Personne n’a le droit de voter pour sa création. Ainsi, après les choix faits, les enfants qui auront leur texte choisi pourront les écrire sur une tablette avant de les tweeter. Au début de la semaine suivante, nous ferons un vote pour choisir les trois meilleures phrases de notre équipe ».

Frédéric dresse un bilan élogieux des deux précédentes éditions. « Les deux premières saisons ont été un vrai régal de créations pour les enfants mais aussi pour l’enseignant que je suis. Tous les enfants se prêtent au jeu et même si parfois les contraintes paraissent compliquées, des textes incroyables sont écrits. Et ce ne sont pas nécessairement les meilleurs élèves qui écrivent les meilleurs textes. La contrainte libère vraiment la créativité des enfants et il y a une belle motivation dès le début ». Et ce constat, une majorité des participants le dresse. « Finalement, proposer des jeux d’écriture aux élèves, c’est permettre de réutiliser de ce que l’on fait en français quotidiennement, de l’orthographe, de la grammaire, du vocabulaire. Et cela de manière indirecte ».

Twitter pour découvrir de nouveaux horizons

Frédéric apprécie aussi cette ouverture que permet l’écriture sur un réseau social. Il apprend ainsi à ses élèves à utiliser un média en ligne pour découvrir d’autres élèves, de différents niveaux mais aussi d’horizons différents. « Nous échangeons avec des classes que nous n’aurions sans doute jamais rencontrées sans ce projet. Par exemple, cette année, nous sommes avec trois classes de collège. L’année dernière, nous avions une classe de première dans notre équipe qui faisait toujours des dessins avec les textes créés, c’était toujours un moment sympathique lorsque les enfants les découvraient ». Et puis, le challenge, la compétition mais dans un climat bon enfant. « Comme il y a un vote, si nos textes ne sont pas choisis, les enfants sont encore plus motivés pour la semaine suivante ».

Alors à partir du 7 janvier, nous suivrons avec plaisir l’hashtag #Twoulipo, conscients des efforts et du plaisir ressentis par ces écrivains en herbe.

Lilia Ben Hamouda