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Le président de la République a longuement évoqué le rôle de l’Ecole dans la lutte contre l’antisémitisme lors du diner du CRIF le 20 février. Le développement de l’antisémitisme dans la société française, et particulièrement la jeunesse, est très inquiétant. E. Macron a promis un audit des établissements qui perdraient des élèves juifs. Il a plaidé pour un enseignement de la méthode historique en classe, une mesure qui va à l’encontre des nouveaux programmes rendus perméables au « roman national ». Regardons y de plus près.

« Ces instituteurs, ces professeurs sont encore trop souvent livrés à eux-mêmes, en particulier quand, dans ces quartiers gangrénés par l’islamisme radical, évoquer la Shoah, la situation au Proche-Orient, est parfois devenu impossible », dit le président. « Ces instituteurs, ces professeurs trouveront toujours la République à leurs côtés. Au niveau national, une équipe de réaction a été mise en place, qui leur apporte une solution en 24 heures, dès qu’une difficulté se fait jour. Dans chaque rectorat, des messages clairs ont été passés, pour que tout soit dit, le moindre problème, dès qu’il est observé ». En même temps il plaide pour une approche éducative : « L’enseignement de la méthode scientifique, de la méthode historique, sera renforcé. Tous les enfants de France seront sensibilisés au temps long des grandes civilisations, ce temps long cher à BRAUDEL, qui apporte le goût de la tolérance et de l’humanisme ». Cette approche intelligente se heurte à l’enseignement du « roman national » qui alimente les nouveaux programmes d’histoire de JM Blanquer.

L’enseignement de la Shoah est-il impossible ou difficile dans certains établissements ? Il semble bien, à entendre l’association des professeurs d’histoire-géographie (APHG), que cet enseignement soit donné partout. « Les professeurs assument pleinement, sur le terrain, l’enseignement des questions dites sensibles. Dans tous les territoires de la République, avec tous les élèves de la Nation, malgré des situations parfois délicates, les enseignants d’Histoire-Géographie / EMC font toute sa place à la Shoah, dans le respect des programmes », écrit l’APHG. Des progrès très importants ont été faits dans la didactique de la Shoah par la formation et surtout l’auto formation des enseignants. Les outils du Mémorial, ceux de l’association des Fils et filles de déportés sont des appuis importants pour ces nouvelles approches. L’appui de l’État au Mémorial, annoncé par E Macron, est une bonne chose.

C’est plutôt l’enseignement du conflit moyen oriental qui est à améliorer. Évidemment le conflit israélo-arabe ne justifie en rien les actes antisémites. Mais de fait il alimente la propagande antisémite. Cela renvoie d’ailleurs à la condamnation de l’antisionisme par le président. Ce sujet est carrément difficile à traiter en classe. Il cumule beaucoup d’événements avec la compréhension de ce que sont la naissance du sentiment national et l’influence des religions sur le terrain politique. Plus complexe, c’est difficile ! Voilà des sujets sur lesquels le ministère pourrait apporter des outils pédagogiques, adaptés aux collégiens et aux lycéens, permettant aux élèves de comprendre vraiment ce qui se passe au Moyen Orient, d’avoir une vision nuancée et de séparer cette question de celle de l’antisémitisme.

« J’ai demandé au ministre de mettre en place des actions spécifiques et de procéder à un audit de tous les établissements marqués par le phénomène de déscolarisation des enfants de confession juive ». On ne sait pas comment techniquement cette étude pourrait avoir lieu. Mais ces promesses gagneraient en efficacité si l’État était capable d’instaurer plus d’égalité entre les écoles publiques des quartiers populaires et les établissements privés parce qu’on a là aussi une des raisons de cette fuite. Elles gagneraient aussi en légitimité si l’État montrait moins de complaisance envers la stigmatisation de certains élèves, par exemple quand il s’agit du voile des mamans accompagnatrices.

F Jarraud

Déclaration de l’APHG