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Tout fier, O Dussopt s’était fait photographié en train de le signer. Effectivement ce texte marque l’histoire. Après plus d’un demi siècle de paritarisme dans la fonction publique, le décret publié au journal officiel du 1er décembre tourne la page. Avec ce texte les fonctionnaires, et particulièrement les enseignants, tombent totalement entre les mais de leur chef immédiat sans autre possibilité de défense qu’une plainte en justice administrative mais sans possibilité d’avoir les informations nécessaires à cette plainte.

« Les commissions administratives paritaires ne sont plus compétentes pour examiner les décisions individuelles en matière de mobilité applicables à compter du 1er janvier 2020, ainsi que pour les décisions individuelles en matière de promotion applicables à partir du 1er janvier 2021″, annonce le décret du 1er décembre.  » le décret précise les conditions dans lesquelles, dans la fonction publique, l’autorité compétente peut édicter des lignes directrices de gestion définissant la stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines, les orientations générales en matière de promotion et de valorisation des parcours professionnels et, pour la fonction publique de l’Etat, les orientations générales en matière de mobilité. En outre pour la fonction publique de l’Etat, il définit les conditions dans lesquelles les administrations peuvent définir des durées minimales ou maximales d’occupation de certains emplois. Le décret supprime la référence à la consultation des commissions administratives paritaires en matière de mobilité, de promotion et d’avancement au sein des textes réglementaires applicables. Il précise les conditions dans lesquelles les agents peuvent faire appel à un représentant syndical dans le cadre d’un recours administratif formé contre les décisions individuelles en matière de mobilité, de promotion et d’avancement ».

Ce texte est pris en application de la loi de transformation de la fonction publique adoptée cet été. Cette loi met fin aux garanties dont pouvaient disposer les fonctionnaires sur le suivi de leur dossier de mutation ou avancement par les syndicats. Les syndicats étaient informés de ces procédures, les suivaient et étaient capables de repérer les erreurs et d’obtenir réparation avant que la décision soit prise. Avec le nouveau système les décisions de mutation et avancement seront prises par l’administration seule, sans que les syndicats puissent suivre les dossiers. Les fonctionnaires pourront après que la décision soit prise et appliquée porter plainte en justice mais on ne voit pas trop sur quoi ils pourront asseoir cette plainte.

Ce qui se profile avec ce décret c’est rien moins que le recrutement , l’évaluation, l’avancement et l’affectation des enseignants par les seuls chefs d’établissement et IEN sans aucun contre pouvoir des syndicats.

Dans une note réalisée pour la Fcpe , F Dubet soulignait la rupture que réalise le gouvernement et JM Blanquer.  » Le recrutement des enseignants par les établissements mettra à mal la conception traditionnelle de l’autonomie professionnelle des enseignants et privera les syndicats d’une de leurs principales ressources, celle de la « cogestion » des carrières. Le renforcement du pouvoir des chefs d’établissement sera, lui aussi, perçu comme une révolution : au pouvoir lointain du ministère et de l’inspecteur se substituera un pouvoir proche… Il ne faut pas voir dans la philosophie scolaire de Jean-Michel Blanquer une série de « mesurettes », mais une rupture profonde. Si ses propositions en venaient à s’appliquer, c’est le coeur de l’institution lui-même qui en serait bouleversé. »

Au coeur de l’institution il y a aujourd’hui les syndicats. Ce décret et la loi Dussopt les prive de leurs droits les plus importants. Il organise leur déclin et le retour à une administration toute puissante comme on l’a connu avant 1945. E Macron et JM Blanquer réalisent une défaite historique des fonctionnaires.

F Jarraud

Le décret

L’annonce par O Dussopt

Une loi qui dynamite les droits des enseignants