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Un vent de défaite semble souffler sur la réforme des retraites. La troisième journée nationale de grève contre la réforme des retraites, le 17 décembre, a vu un spectaculaire rebond de la mobilisation. Le gouvernement annonce 615 000 manifestants, soit le double du 10 décembre. La CGT parle de 1.8 million. Dans l’éducation nationale, le ministère annonce 24% de grévistes chez les enseignants soit le double du 10 décembre. Les syndicats considèrent, eux, les grévistes comme majoritaires. Les explications, la soirée débat à Nancy, la réception des syndicats rue de Grenelle : tout cela n’a en rien rassuré les enseignants. Avec la démission de JP Delevoye s’ouvre maintenant une nouvelle étape politique.

E Philippe vacille devant l’Assemblée

Le 17 décembre, E Philippe a assuré à nouveau de sa « détermination totale » à mener la réforme des retraites jusqu’au bout. Mais la veille, JP Delevoye haut commissaire aux retraites et artisan de la réforme, a du démissionner. Le 17, à l’Assemblée nationale, le premier ministre sent sa détermination fléchir. Interrogé par C de Courson pour savoir s’il pourrait revenir sur l’âge pivot, E Philippe laisse voir qu’il y pense. « J’ai affirmé avec la plus grande clarté que si les partenaires sociaux – en qui j’ai confiance – sont capables de se mettre d’accord pour dire comment ramener le système actuel à l’équilibre à l’horizon 2027, et donner place à un système équilibré, je prendrai leur solution…. C’est très clair. L’objectif est donc simple : garantir l’équilibre en 2027. Si les partenaires sociaux avancent une meilleure proposition, nous l’adopterons ».

Mobilisation nationale massive

En effet, la journée du 17 décembre est marquée par une mobilisation massive et même un durcissement des revendications. Le gouvernement compte 615 000 manifestants contre 339 000 le 10 et 800 000 le 5 décembre. La Cgt évoque 1.8 million. Après le recul du 10 décembre, la communication gouvernementale a obtenu comme seul résultat un rebond de la mobilisation. A Paris on comptait entre 76 000 (police) et 350 000 (cgt) manifestants. A Marseille entre 20 000 et 200 000. A Toulouse de 17 à 120 mille. A Lyon et à Nantes de 17 à 40 mille.

Après Nancy, deux fois plus de grévistes dans l’enseignement

Dans l’enseignement, le ministère annonçait 25% de grévistes dans le premier degré et 23% dans le second. Des taux qui sont le double de ceux de la grève du 10 décembre. Les syndicats annoncent 50% de grévistes dans le 1er degré (Snuipp Fsu) et 65% dans le second (Snes Fsu).

« Après Delevoye, objectif Blanquer ». Dans les cortèges enseignants les pancartes visaient directement le ministre de l’Education nationale demandant sa démission. Au delà de la question des retraites, ce sont les réformes, les injonctions, la perspective d’un « nouveau métier enseignant » dessiné par JM BLanquer qui poussent les professeurs dans la rue.

Qui sera devant nos enfants demain ?

Hawa, CPE dans un lycée professionnel de Saint-Denis et Perihan, professeure des écoles à Bobigny manifestent à Paris sous le ballon de l’UNSA. Elles étaient déjà dans la rue le 5 décembre. « On est mobilisées aujourd’hui, aussi, car nous ne voulons aucune perdant dans cette réforme. Au niveau de l’UNSA, notre position est claire : nous ne voulions pas de cette réforme. L’âge pivot introduit mercredi dernier est extrêmement pénalisant pour l’ensemble des fonctionnaires et des salariés. Il faut absolument que le gouvernement revienne dessus » explique Hawa. Perihan reconnaît que les dernières annonces du ministre n’ont fait que renforcer sa détermination. Toutes deux assurent que s’il le faut, elles seront encore dans la rue demain et après. « On a déjà du mal à attirer les futurs enseignants, alors si on promet des pensions basses à la retraite, qui sera devant nos enfants demain ? »

Refus des primes

A Rennes, pour Louise, professeure de lettres en collège, c’est  » l’esprit des primes au sein de l’éducation nationale  » qui ne passe pas.  » On demande une revalorisation du salaire pour rejoindre la moyenne européenne « . Beaucoup d’enseignants décrivent leur pouvoir d’achat qui a diminué.  » Je fais désormais attention à mes dépenses chaque mois « . Christine, enseignante en économie-gestion au lycée Coîtlogon de Rennes  » ne veut pas de primes. Le gouvernement veut nous diviser et monter les statuts des fonctionnaires les uns contre les autres. On aime notre métier, mais depuis 10 ans la perte de pouvoir d’achat est très importante « .

Le chaudron enseignant qu’on voit bouillir depuis un an vient semble t-il de déborder. Maintenant c’est au gouvernement d’éponger.

François Jarraud, Nadia Habassi, Julien Cabioch

A l’Assemblée