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Allez donc expliquer aux élèves que les filles peuvent faire aussi bien que les garçons en sciences quand le professeur de maths a deux chances sur trois d’être un homme et le professeur d’anglais une femme ! Si l’Education nationale affiche sa volonté de lutter pour l’égalité filles garçons, elle ne s’applique pas à elle-même ce principe. Pour les salariés de l’Education nationale aussi la parité reste à gagner.

Une hiérarchie masculine

Les inégalités entre hommes et femmes dans l’Education nationale se lisent d’abord dans les emplois. Selon une règle simple et qui s’applique jusque dans les détails: plus le poste est élevé dans la hiérarchie moins il est féminin.

Cela commence par la place des femmes dans les catégories de salariés. On trouve 85% de femmes en catégorie C, 80% en catégorie B et 71% en catégorie A. Mais la catégorie A est un fourre tout où sont regroupés les enseignants, particulièrement mal payés, et les postes de dirigeants, ce qu’on appelle le A+. Dans le A+ les hommes sont majoritaires avec 58% des emplois.

Si l’on s’intéresse aux enseignants la même logique prévaut : 83% des professeurs des écoles sont des femmes, 65% chez les certifiés , 53% chez les agrégés. Chez les professeurs de chaire supérieure les hommes dominent. Il n’y a que 37% de femmes.

Continuons à monter. En apparence les emplois de direction sont à parité : 50% de femmes. Mais ce n’est qu’une illusion ! On compte seulement 32% de femmes chez les proviseurs. Et elle sont plus nombreuses que les hommes dans les lycées les moins cotés (catégories 2 et 3). Par contre 56% des proviseurs adjoints sont des femmes comme 57% des principaux adjoints (mais seulement 48% des principaux).

La moitié des IEN sont des femmes mais on va les trouver plutôt dans les circonscriptions quand on aura nettement plus d’hommes au rectorat.. Dans les emplois de l’encadrement supérieur les hommes dominent nettement : 36% de rectrices, 34% d’inspectrices générales, 36% de Dasen femmes selon le dernier « Bilan social » du ministère.

Inégalité salariale

Observer la répartition des salaires à l’éducation nationale est aussi instructif. Si le traitement indiciaire brut moyen d’un professeur des écoles homme est de 2650€, celui d’une femme est de 2392€. Chez les certifiés, l’écart est de 100 € (2694 et 2590). Comment expliquer ces écarts alors que les grilles indiciaires ont les mêmes ? On observe un écart aussi chez les personnels de direction (4107 et 3970)ou dans l’encadrement supérieur (4545 et 4365). A noter qu’il s’agit du traitement indiciaire brut c’est à dire du traitement calculé sans primes. Mais on va voir qu’il y a aussi des différences du coté des primes.

« Dans le premier degré public, le salaire net des hommes est supérieur de 11 % à celui des femmes et, dans le second degré public, de 8 % . Les écarts entre les hommes et les femmes s’observent à la fois pour le traitement indiciaire brut (TIB) et pour les primes », note le Bilan social. En effet, « les hommes enseignent davantage à temps plein et sont plus avancés dans leur carrière. Le niveau et la part des primes sont également plus élevés pour les hommes. Parmi les professeurs des écoles du public, l’écart de primes est de 43 % entre hommes et femmes, en lien avec une relative surreprésentation des hommes dans les directions des écoles et sur des établissements de plus grande taille (la prime de direction étant en partie liée à la taille de l’établissement). Dans le second degré, public comme privé, et plus encore parmi les professeurs agrégés et de chaire supérieure, les hommes perçoivent en moyenne 26 % (dans le privé) à 29 % (dans le public) de primes de plus que les femmes ». Si les femmes gagnent moins comme enseignantes c’est aussi qu’elles ont un second métier : celui de femme, avec toutes les charges familiales que cela représente.

Même les disciplines ont un genre

Même les disciplines sont genrées. Ainsi 79% des professeurs de lettres, 83% de ceux de langues vivantes sont des femmes quand on ne trouve que 43% de femmes en EPS ou en physique chimie. L’écart est encore plus important dans les disciplines technologiques et professionnelles. 4% de femmes en génie thermique ou mécanique, 9% en STI ou en informatique quand on compte 86% de femmes en biotechnologies santé environnement et 91% en paramédical.

Loin de montrer l’exemple aux jeunes générations, l’Education nationale illustre et prolonge les inégalités de genre.

François Jarraud