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Faut-il modifier les délais de garde à vue pour lutter contre un virus ? Faut-il supprimer des pans entiers du code du travail pour venir à bout du Covid-19 ? L’épidémie fait basculer à nouveau le pays dans l’état d’urgence comme si la démocratie était incapable de lutter contre une épidémie. La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 confie le pouvoir législatif au gouvernement pour une durée qui n’est pas précisée. Elle a été adoptée par les deux assemblées le 22 mars. A l’Assemblée, elle a été votée par LREM, le modem, l’UDI et les Républicains. Le PS s’est majoritairement abstenu. LFI et le PC ont voté contre.

La loi crée un « état d’urgence sanitaire » décidé par le seul gouvernement en conseil des ministres qui suspend les libertés démocratiques sur une partie ou la totalité du territoire. Durant cette période les droits de réunion , de circulation , de rassemblement sont suspendus. Le ministre de la santé , le préfet peuvent prendre des mesures de placement ou d’isolement dans le lieu de son choix de toute personne. Des peines allant jusqu’à 6 mois de prison sont prévues en cas de violation de ces interdictions.

L’article 7 suspend des pans entiers du code du travail et du droit de la fonction publique sur ordonnance gouvernementale et sans limitation de délai. Ainsi l’employeur peut de façon unilatérale modifier les dates de prise des congés payés dans la limite de 6 jours ouvrables en dérogeant aux délais prévus par le code du travail et les accords collectifs. Il peut modifier les dates des jours de réduction du temps de travail ou les jours de repos. Il peut aussi déroger à la durée du travail, eu repos hebdomadaire et au repos dominical. Les gardes à vue sont prolongées sans présentation devant un juge. Tout cela est décidé sans limitation de délai. Autrement dit ce régime dérogatoire pourrait continuer au-delà de la fin de l’épidémie, l’Assemblée ayant repoussé les amendements limitant l’application dans le temps.

« La façon dont la majorité prévoit un certain nombre de dérogations au code du travail, sans qu’on en connaisse vraiment ni l’ampleur ni la durée, est de nature à inquiéter », a estimé B Vallaud (PS) qui s’est abstenu sur le texte.

De fait la loi va beaucoup plus loin, donnant au gouvernement le pouvoir législatif dans de larges domaines relevant des libertés publiques comme de l’organisation du travail. En seulement 14 heures de débat, le parlement a accepté d’être dessaisi de son pouvoir législatif sans limitation de durée. Le gouvernement détient maintenant les pouvoirs exécutifs et législatifs sans aucun contrôle. Les premières ordonnances devraient être prises le 25 mars.

Un point concerne directement les enseignants : suite à un échange entre le député M Millienne et la ministre Pénicaud, les enseignants devraient être tenus de garder les enfants des policiers comme les enfants de soignants. « Nous prendrons, dans les heures et les jours qui viennent, des mesures qui produiront leur effet dans les semaines qui viennent »,a déclaré la ministre.

F Jarraud

Le texte définitif

Le débat sur l’article 7