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Jean-Michel Blanquer a présenté à l’Assemblée le 21 avril de façon détaillée les grandes lignes de la réouverture des écoles et des établissements scolaires à partir du 11 mai. La rentrée serait étalée sur 3 semaines. Elle commencerait par le 1er degré. Les enfants ne seraient pas obligés de rentrer. Les classes ne devraient pas compter plus de 15 élèves. Le ministre est resté évasif sur les garanties sanitaires qui seront mises en place. Et quelques heures plus tard il a présenté ces décisions détaillées comme de simples « hypothèses ».

Le calendrier de la reprise

JM Blanquer a présenté le 21 avril aux députés de la Commission de l’éducation de l’Assemblée nationale le programme de réouverture des écoles et établissements à partir du 11 mai.

Tous les enseignants seront appelés à effectuer une pré rentrée le 11 mai à l’exception des personnels fragiles ou ayant un proche malade. Ceux là continueront à enseigner à distance durant les mois de mai et juin puisque cet enseignement perdurera.

La rentrée des élèves commencera durant la semaine du 11 mai par le premier degré en grande section de maternelle, CP et CM2. Elle s’effectuera par groupe de 15 élèves maximum à partir du 12 mai. Une semaine plus tard, le 18 mai s’effectuera la rentrée des collégiens et lycéens , 6èmes et 3èmes et première et terminales et les classes du professionnel industriel , toujours avec la limite de 15 élèves maximum par classe. Puis le 25 mai tous les autres élèves rentreront avec la même limite.

Les parents pourront ne pas envoyer leur enfant à l’école. Il devra dans ce cas suivre le téléenseignement. Dans l’esprit du ministre cela ne devrait concerner qu’un petit nombre d’enfants. Mais cela pourra durer en mai et juin. Sur ce point, JM Blanquer fait une nouvelle volte face. Il avait assuré le 15 avril que l’école serait obligatoire.

Le ministre s’est peu étendu sur la dimension pédagogique de la reprise. Il a évoqué la priorité donnée à rattraper les décrocheurs (4% des élèves selon lui) et à accueillir les élèves à besoins particuliers. Il mise sur la personnalisation. Et il renvoie à des outils qui sont ne préparation. Les enseignants vont recevoir des outils d’évaluation et des guides pédagogiques pour la réouverture.

Où seront les élèves ?

Que faire des autres élèves ? Le ministre évoque 4 situations. Chaque jeune devra être soit en classe, soit en téléenseignement, soit en étude soit dans des activités périscolaires. Pour elles le ministère invente un nouveau sigle appelé à devenir un label : les « 2S2C » réunissant du culturel et du sport. La mise au point de ces 2S2C dépendra des moyens des collectivités locales. Certaines sont déjà réticentes à la réouverture des écoles. Dans beaucoup de communes les activités périscolaires ont lieu dans les locaux scolaires qui sont occupés par les classes. Mais le ministre semble miser grandement sur elles pour permettre l’accueil de tous les élèves. Il mise aussi sur le local. C’est au niveau des circonscriptions et des établissements que sera définie l’application concrète des directives ministérielles. Par exemple chaque établissement devra évaluer si la réouverture de la cantine est possible ou pas.

Oral de français et directeurs

Le ministre a aussi justifié le maintien de l’oral de français : « on le maintient car c’est un domaine pour lequel il n’y a pas de note ne contrôle continu. Et on veut montrer que le but n’est pas de supprimer les épreuves terminales ». Mais l’oral n’aura lieu que « si les conditions sanitaires le permettent ».

JM Blanquer a été interrogé par des députés sur des points chauds. F Reiss (LR) lui demande s’il ne serait pas possible de prolonger les cours en juillet. « Il n’est pas souhaitable de mordre sur les vacances d’été », lui répond JM Blanquer.

Interrogé par Mme Rilhac sur le statut des directeurs, JM Blanquer déclare qu’il y a des sujets d’avant la crise sanitaire qui restent d’actualité.  » Les directeurs d’école ont été de véritables cadres de l’Education nationale », dit-il. « Ma volonté est plus forte de faire évoluer leur situation ». On se rappelle que cette question a soulevé une vague au moment de la lo Blanquer et que le ministre a du faire machine arrière. Une consultation des enseignants peu de temps avant la crise sanitaire a montré qu’une large majorité des enseignants est hostile à un statut de supérieur hiérarchique pour les directeurs d’école.

Quelles garanties sanitaires ?

Tout au long de son intervention, le ministre a rappelé la sécurité sanitaire. « Il y aura un protocole sanitaire pour tous les établissements scolaires. Ce protocole sera indépassable. Si un établissement ne peut pas la respecter il ne sera pas réouvert », a-t-il répété plusieurs fois. il s’est attaché à rassurer l’opinion publique et les enseignants en martelant ce respect du « protocole sanitaire  » national.

Aura-t-il pour autant rassuré ? Ce protocole devrait être défini par le délégué interministériel à la gestion de la crise sanitaire, Jean Castex.

Et ce renvoi au protocole sanitaire évite à JM Blanquer de s’engager de façon précise. On ne sait toujours pas si les enseignants et les élèves auront des masques ni comment seront respectés les gestes barrières dans les classes et les couloirs. Seule la garantie de ne pas dépasser 15 élèves par classe est donnée. Mais on a vu, avec l’accueil des enfants de soignants, que cela n’empêchait absolument pas la propagation de l’épidémie. L’exemple de l’école de Panne n’est pas oublié.

Le ministre est ambigu aussi sur le droit de retrait. « Un professeur qui a une vulnérabilité de santé ne viendra pas » a-t-il déclaré. « Le droit de retrait n’est pas la question… Il ne doit pas y avoir un professeur qui se mette en danger en sortant du confinement ». Il semble bine que tous soient en réalité en danger….

Quelles bases scientifiques ?

Ce rappel des garanties sanitaires vise aussi à faire oublier la faiblesse des bases scientifiques de la réouverture. Interrogé sur ce point, le ministre se réfugie derrière une étude de l’académie des sciences allemande. Mais la situation allemande est bien différente de la notre avec une maitrise de l’épidémie beaucoup plus forte et un appareil hospitalier beaucoup plus développé. Par exemple, ce même 21 avril, l’Institut Pasteur de Paris publie une étude qui déconseille vivement le déconfinement le 11 mai. JM Blanquer argumente d’ailleurs sur les risques qu’il y a à maintenir le confinement.  » Il n’y a pas que le covid-19 qui fait des morts. Il faut avoir une vision large ».

Sur cet aspect sanitaire, JM BLanquer renvoie les responsabilités au niveau local. Les chefs d’établissement devront dire si leur établissement respecte le protocole sanitaire. Si ce n’est pas le cas l’établissement sera fermé , promet le ministre.

Des hypothèses !

« Ce matin même, lors de la réunion de la commission des affaires culturelles et de l’éducation – qui a duré plus de deux heures –, je vous ai déjà apporté plusieurs éléments de réponse, qui peuvent aisément être consultés. J’ai émis des hypothèses qui ont vocation à être discutées avec les collectivités locales, les associations d’élus locaux, les organisations syndicales dans le cadre d’un dialogue social actuellement très approfondi, les fédérations de parents d’élèves et le Conseil national de la vie lycéenne ». Quelques minutes après ces annonces très précises, JM Blanquer a fait marche arrière lors des questions au gouvernement de la même Assemblée nationale. Pour lui, « ces discussions nous permettent d’avancer et de définir chacun des points d’ici au 11 mai ». On comprend alors que ces annonces ont pour seul but de faire pression sur l’opinion, les enseignants , leurs syndicats, les collectivités locales mais ne l’engagent pas et encore moins le gouvernement !

A quelques jours de la réouverture, JM Blanquer pratique l’intox. Il tente de fixer seul le tempo. Mais il faudra encore attendre plus d’une semaine pour savoir quelles garanties réelles seront données sur le plan sanitaire. Quant à connaitre les bases scientifiques de la réouverture, il semble bien qu’il faille en faire son deuil. Le gouvernement n’assume pas sa décision sur ce point tout comme il n’assume pas la justification économique.

François Jarraud

Le 11 mai et ses dénis

Questions au gouvernement