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Est-ce une bonne idée de reprendre le 11 mai ? Qu’en pensez-vous ? Le Café pédagogique a sondé ses lecteurs enseignants à travers deux réseaux sociaux : notre groupe Facebook et notre fil Twitter. Cette consultation express sur 24 heures ne prétend pas valoir un véritable sondage d’opinion. Mais, avec près de 10 000 réponses (9303 pour le premier sondage), elle atteint un volume de réponses qui fait qu’on ne peut pas l’écarter. Et ce que vous dites c’est que cette reprise n’a pas d’intérêt pédagogique mais que vous rejoindrez malgré tout l’Ecole le 11 mai la peur au ventre…

6000 réponses sur Facebook, 3000 sur Twitter, en 24 heures vous avez été près de 10 000 à répondre à 3 questions posées par le Café pédagogique entre le 25 et le 26 avril. Vous avez aussi livré de très nombreux commentaires : plus de 1500. Ils éclairent quelques unes de vos réponses. La répartition des réponses montre un équilibre entre le premier degré 44% (dont 10% en maternelle) et le second degré (55% dont 30% en collège).

Une rentrée sans intérêt pédagogique

« Trouvez-vous qu’il existe un intérêt pédagogique à reprendre pour 6 semaines dans des conditions très particulières » demandait Le Café pédagogique dans une première question. Vous êtes 77% à répondre « non » et seulement 15% à trouver un intérêt pédagogique à la reprise.

« Oui c’est sûr que l’intérêt pédagogique sera au rendez-vous si on réussit à avoir les fameux décrocheurs et autres enfants en difficulté. Au delà je vois mes propres enfants, ils ont envie de retrouver leurs pairs », estime Candide. « Oui même pour une semaine, je trouve important de boucler cette étrange année en présentiel », estime Armelle. « Avec les collègues nous réfléchissons à comment faire pour que cela soit viable. Et je trouve ce moment très stimulant. Nous avons été créatifs, nous nous sommes adaptés ».

Mais les avis négatifs l’emportent. « Pour ceux qui y trouvent un intérêt social, ce ne sera pas le cas des élèves de maternelle à qui on va interdire des contacts physiques. Mes élèves sont en PS. Ils n’auront pas le droit de se toucher, de jouer ensemble, de s asseoir à côté du copain.. Cela va à l’encontre des programmes, des besoins physiologiques de mouvement d un enfant de 3 ans; des besoins affectifs », explique Florence. «  Je trouve que nous allons creuser les écarts », écrit Vanessa. « Les enfants en petit nombre que nous aurons vont progresser plus rapidement et les élèves décrocheurs seront absents et arrêtés au niveau des apprentissages. Donc à la rentrée l’écart sera considérable ».

Deux enseignants sur trois se préparent à reprendre à reculons

« Indiquez votre future décision à propos de la réouverture des écoles et établissements scolaires le 11 mai », demandions nous à nos lecteurs enseignants. 14% des enseignants s’apprêtent à rentrer « volontiers ». Exactement autant (14%) refuseront de reprendre leur classe. 62% annoncent vouloir « rentrer à reculons ». Et les autres ? 10% ne pourront pas rentrer car ils sont malades, fragiles ou ont un proche malade ou fragile. Cette réponse donne une indication sur le volume des enseignants qui sont susceptibles d’être autorisés à ne pas rentrer.

C’est le cas par exemple de Séverine : « J’ai été malade du Covid19, sans complications mais suffisamment pour un petit tour aux urgences et revenir avec de l’oxygène à domicile. Or les tests sérologiques ne sont pas au point et je ne suis pas sûre d’être immunisée. Je ne peux pas courir le risque de retomber malade », nous dit-elle. Elle n’est pas la seule à laisser un commentaire en ce sens.

Avant la classe, le danger est dans la cour de récréation

Nous avons voulu savoir où les enseignants voient en premier le danger. « Selon vous, les risques de contamination les plus important lors de la rentrée sont : ». Pour 46% des enseignants la cour de récréation est vue comme la zone la plus propice à la contamination. Vient ensuite la restauration pour 23% des enseignants et 13% évoquent les transports scolaires. Autrement dit la contamination n’est pas particulièrement appréhendée durant les cours. Même si 28% des enseignants citent la salle de classe lors des enseignements comme le principal espace de contamination.

Plusieurs enseignants nous disent que c’est un peu tout cela. «  Notre ministre a comme toujours une vision très 16e arrondissement. Il faut déjà que les élèves arrivent à l’école. Dans ma région plus de 50% des élèves sont transportés. Comment les faire monter dans les cars ? Ces cars passeront-ils ? Selon quels horaires ? », dit Florence. «  Partout à l’école …aux toilettes dans les salles, en récré, au réfectoire, dans les couloirs, dans le bus scolaire, en groupe d’humains venant de divers horizons d’abord confinés en famille puis regroupés en promiscuité dans les établissements sans pouvoir appliquer les gestes barrière avec l’appréhension de contaminer ou d’être contaminé soi-même », dit Fabrice.

« Même avec 15 élèves par salle on va devoir désinfecter toutes les tables et les chaises à chaque inter cours », explique Martina. « Éviter que les classes se croisent dans les couloirs (pas très larges…) et surtout ne plus prêter de stylos, ne plus appeler au tableau, ne plus s’approcher pour lire dans leurs cahiers… Dur dur ! Il faudra s’y faire ».

«  Vous avez testé de parler trois heures dans un masque ? Moi oui, pendant que je gardais les enfants des personnels des soignants. C’est impossible. Alors à partir de là aucun moment n’est safe », dit Marc. Il ne nous rassure pas…

François Jarraud