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Ca sera aussi notre plaisir déconfiné du jour… En temps ordinaire, comment sont vues les sorties scolaires dans les systèmes scolaires européens ? Si toutes les écoles européennes pratiquent la mobilité scolaire, elle ne tient pas la même place dans tous les pays. Surtout ses finalités ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre. Et du coup le vocabulaire pour les désigner varie selon les pays révélant des conceptions pédagogiques différentes. Aux « sorties » des pays latins, répondent les « camps » des pays nordiques ou les « visites » et « tours » du monde anglo saxon…

« Cet article vise à analyser les manières dont les déplacements des classes hors du lieu habituel de l’école sont conçus dans les différents Etats européens ». Dans Géocarrefour (n°94/2), Xavier Michel (Université de Caen) étudie les règlements officiels qui organisent les mobilités scolaires dans les pays européens. Après la réunion d’un important corpus sur 24 pays, émanant des ministères ou des autorités régionales, il identifie les termes utilisés et quantifie leur présence. Les termes les plus utilisés (voyage, séjour, excursion etc.) définissent des activités précisées dans les textes. Certains thème sont spécifiques au pays ou renvoient à une éducation spécifique comme la Bewegungserziehlichen autrichienne, une éducation au mouvement en lien avec des pratiques sportives. Le mot voyage peut ainsi prendre des sens différents selon les pays.

Ce travail nous vaut d’intéressantes cartes lexicales de la mobilité scolaire ne Europe. Cartes qui définissent, selon X Michel, 5 aires régionales en Europe pour les mobilités scolaires. IL s’agit en fait de frontières pédagogiques renvoyant à des conceptions pédagogiques différentes.

« L’Europe alpine et septentrionale est marquée par l’importance de l’outdoor education, de l’aventure et des camps. Une culture de proximité avec les environnements naturels favoriserait les expériences de contact et de maniement d’une nature à apprivoiser en situation de forest schools (Knight, 2009), qui émanent des pays scandinaves, ou de l’outdoor education, dont une des origines géographiques a été située en Ecosse », écrit X Michel. « Les atouts de la présence à l’extérieur sont identifiés, en pouvant se rapporter à la fois aux processus d’acquisition des connaissances : l’environnement extérieur est plus calme pour l’élève que dans une salle de classe et donc plus propice à l’attention et aux acquisitions, et aux démarches de socialisation : l’environnement extérieur favorise les relations entre pairs et avec l’enseignant ainsi qu’un climat de classe plus apaisé ».

« L’Europe méditerranéenne est une aire de pays qui connaissent une ambiance touristique importante. Les visites de lieux culturels y prennent une grande place, ce qui se traduit aussi au niveau scolaire, les visites de « nature » étant alors davantage désignées en rapport avec les réserves et parcs naturels.. Les lieux particuliers comptent beaucoup dans le classement et la justification des déplacements ».

« Les pays d’Europe de l’Est connaissent notamment la mise en oeuvre de la notion d’excursion… C’est le texte polonais qui apparaît le plus explicite à ce sujet : il importe de faire connaissance avec le pays, son environnement à la fois « naturel », culturel, traditionnel et historique (PO21). Ce type d’excursion cherchant à se rendre dans des destinations du pays a été qualifié, à partir d’une analyse espagnole, d’ « excursion romantique-nationale » ».

« Les acteurs des îles britanniques insistent sur ce qui s’élabore et se réalise, ou ne peut pas se réaliser, avec la classe lors de l’expérience environnementale dans leur terminologie. Ils se focalisent.. sur la description des modalités de relations très précises de la classe et de l’élève avec les caractéristiques matérielles de chaque environnement culturel et/ou naturel ».

Et nous ? « L’aire francophone, en premier lieu la France, exprime le plus l’idée de confrontation à un environnement inconnu… Il s’agit d’une représentation davantage tournée vers des espaces de seuil : seuil de démarrage, d’apparition du mouvement par la sortie du fait de l’acte de quitter le lieu habituel de l’école – que l’objectif relève de l’apprentissage non formel ou informel, facilement identifiable et ainsi assimilable à une limite d’espace « dur », et d’autre part seuil de contacts pour la perception des environnements géographiques et humains à expérimenter au sujet de la notion de découverte ».

« Les différences entre éducation formelle, non formelle et informelle, les catégories de l’outdoor education et de l’outdoor learning, et la différenciation des objectifs de la pratique scolaire à l’extérieur, entre repérage dans l’espace, apprentissage de connaissances et développement de vastes compétences de vie, structurent la compréhension des spécificités nationales », conclue X Michel.

F Jarraud

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