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De quelle hauteur sera la revalorisation promise par JM Blanquer ? les premiers éléments officiels du budget 2021 seront connus le 28 septembre. Mais déjà JM Blanquer en a dévoilé les grandes lignes.

Que représente 1.4 milliard d’augmentation ?

« Ce qui se passe l’an prochain sur le plan budgétaire est exceptionnel », a déclaré JM Blanquer sur France Info le 25 septembre. Le ministre annonce 1.4 milliard d’augmentation de son budget dont 1 milliard « pour faire une augmentation naturelle » et 400 millions qui « ont vocation à être la première marche des marches suivantes ».

Si cette hausse de 1.4 milliard parait élevée, elle représente un faible pourcentage d’augmentation pour un ministère dont le budget devrait atteindre 54 milliards. Pour situer cette hausse il faut la comparer à celles des années précédentes. En 2017, N Vallaud Belkacem avait arraché 3 milliards à Bercy. En 2018, JM Blanquer avait obtenu une hausse de 1.3 milliard, qui s’est avérée insuffisante pour que les premiers dédoublements se fassent sans peser sur les autres classes. En 2019 le budget de l’éducation nationale augmentait de seulement 0.9 milliard. C’est pratiquement cette hausse qui a été renouvelée en 2020. Et on va le voir également en 2021.

Revenons sur les deux éléments annoncés par JM Blanquer. Le milliard annoncé ne correspond pas réellement à une augmentation « naturelle » des salaires du million d’enseignants et personnels de l’Éducation nationale. Il y a bien une évolution automatique (le « glissement vieillesse technicité ») qui correspond à environ 300 millions. S’y ajoutent une centaine de millions au titre du PPCR. Il y a des mesures catégorielles. On sait par exemple que les personnels de direction ont déjà obtenu 25 millions sur 2 ans. La hausse du budget restante, entre 500 et 600 millions, pourrait relever des créations de postes (pour 50 à 100 millions), de la hausse du format du ministère qui englobe maintenant le sport (400 à 500 millions), de la montée en puissance du SNU (100 millions ?), des AESH (au moins 200 millions) et peut-être aussi des services civiques affectés dans l’Éducation nationale. On voit que tout est vite dépensé. Les versements aux communes au titre des maternelles du privé (entre 50 et 150 millions) seront probablement sur le budget 2022.

JM Blanquer annonce des créations de postes dans le premier degré mais aucune création dans le secondaire, qui va pourtant continuer à accueillir des milliers d’élèves supplémentaires. Les classes devraient donc être encore plus chargées en 2021-2022, du moins là où ce sera possible. La réforme du lycée permet de remplir au maximum chaque spécialité. Au collège la marge de manœuvre est plus faible.

Que représentent 400 millions de « revalorisation » ?

Restent donc 400 millions de revalorisation pour les enseignants. JM Blanquer précise qu’il va « commencer par les plus jeunes » mais que sur plusieurs années cela concernera tous les enseignants. Est-ce à dire que les enseignants débutants vont se partager 400 millions ? Probablement pas.

Dans les scénarios ministériels qui avaient été présentés avant le confinement, seulement 200 millions correspondait à une augmentation automatique. Le premier scénario prévoyait de verser une prime aux échelons 2 à 5 allant de 157 à 64 € nets par mois de façon dégressive de l’échelon 2 au 5ème. Cela toucherait seulement 14% des enseignants. Au-delà de l’échelon 5, il n’y aurait rien. Le scénario 2 prévoyait d’attribuer la prime aux échelons 2 à 6, soit 23% des enseignants, en diminuant son montant. On passerait de 128 à 49.80€ nets par mois. Le scénario 3 envisageait de verser la prime de l’échelon 2 au 8ème échelon en faisant passer son montant de 114€ (échelon 2) à 14.25€ (échelon 8). Cela toucherait 44% des enseignants. Enfin le scénario 4 concernait 76% des enseignants mais toujours dans la même enveloppe budgétaire. La revalorisation concernerait tous les enseignants de la classe normale (76% des enseignants) avec une prime allant de 92€ nets par mois à l’échelon 2 à 14.25€ par mois pour les échelons 8 à 11.

JM Blanquer n’a pas dit quel scénario il a choisi. Mais il parle de « quelques dizaines d’euros par mois » et de « plusieurs centaines d’euro par an ». Ce qui nous renverrait au 1er scénario.

Pourquoi parler alors de 400 millions alors que le montant du 1er scénario peut être évalué à 200 millions seulement ? C’est que JM Blanquer n’a jamais fait mystère d’utiliser la revalorisation pour changer le métier enseignant. Il le confirme lui-même quand il parle d’une prime destinée aux enseignants de Seine Saint-Denis. « Quand on va en éducation prioritaire l’enjeu ne doit pas être d’indemniser la difficulté d’être là mais de récompenser le fait de faire réussite dans des endroits difficiles ». Cette prime ne serait donc pas due mais à mériter en fonction de la réussite des élèves. Ce serait une prime au mérite, telle qu’elle est présentée par le ministre.

Les 200 millions non distribués automatiquement pourraient donc dépendre de la participation à des formations sur les congés, du fait de faire des heures supplémentaires dans le second degré, par exemple.

On est bien loin de la revalorisation attendue par les enseignants dont les salaires sont nettement plus faibles que dans les pays voisins comme on l’a montré ici. On est aussi loin de la revalorisation nécessaire pour maintenir la retraite des enseignants, puisque le 1er ministre déclare qu’il n’enterre pas le projet. On aura plus d’information le 28 au soir pour y voir plus clair.

François Jarraud

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Sur le budget 2020