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Alors que le ministre promet à nouveau une revalorisation, particulièrement pour les professeurs débutants, que représente-elle vraiment ? Comment se situent les salaires des enseignants français en Europe ? Si les salaires des enseignants varient très fortement entre les 42 systèmes éducatifs européens, allant de 4000 à 90 000 euros annuels, les salaires français sont bien parmi les plus bas de l’Europe de l’ouest avec l’Italie et l’Angleterre. Ils sont aussi parmi ceux qui ont le moins augmenté entre 2017-18 et 2018-19 et qui progressent le moins avec l’ancienneté selon une nouvelle étude européenne.

Des écarts énormes entre pays européens

En apparence, tout va bien coté salaire pour les enseignants français. Avec des salaires annuels de début de carrière entre 26 000 et 27 000 euros, ils se situent dans la moyenne des 42 systèmes éducatif européens, annonce Eurydice. En Europe, un enseignant de maternelle gagne en moyenne 23 499 €, 26 237 en élémentaire, 27419 au collège et 28 420 au lycée.

Problème : cette moyenne n’est pas la médiane. L’Europe de l’éducation reste à construire et le continent connait au moins 4 catégories différentes de pays. Dans une douzaine de pays, le salaire annuel du professeur débutant est inférieur à 10 000 €. Ainsi en Albanie, les enseignants commencent à 4214€ en maternelle ou 5457 au lycée. C’est guère mieux en Bulgarie (5161€ quelque soit le niveau), en Hongrie (7000€), en Serbie, Bosnie ou Macédoine (dans les 6000), en Pologne (7000) ou en Turquie (9000).

Les anciens pays de l’Est développés ( Tchéquie, Slovénie, Lithuanie, EStonie…) et la Grèce versent de 10 000 à 15 000 euros par an à leurs enseignants.

La France dénote en Europe de l’Ouest

En Europe de l’Ouest les salaires sont nettement plus élevés . Ainsi un professeur de lycée suisse gagne 90 525 € par an, le professeur des écoles 71 917. Au Luxembourg les salaires se situent entre 67 391 et 76 378€. En Allemagne, en Norvège et au Danemark le salaire annuel dépasse 50 000 €. En Belgique , en Irlande, en Espagne, aux Pays Bas, en Autriche, en Finlande, en Suède, en Ecosse, et même dans la petite Islande , les enseignants touchent 30 000 à 40 000 €.

Avec leurs 36 329 € de départ dans le premier degré et 27 709 dans le second, les enseignants français rejoignent le camp des mal payés avec les enseignants anglais et gallois (28 et 27 000 depuis la privatisation), les portugais (22 000) et les Italiens (23 à 25 000).

Une évolution de carrière minable

Ces bas salaires les enseignants français les trainent longtemps. Jusqu’à 15 ans d’ancienneté ils peuvent espérer une hausse de 20%, ce qui est très peu par rapport à nos voisins : Belgique 40%, Royaume Uni 70%, par exemple.

La revalorisation en France et en Europe

Il y a encore une dernière caractéristique des salaires des enseignants français. Si on regarde l’évolution de leur salaire depuis 2014, ils font partie du petit nombre de pays où le salaire n’a pas bougé, voire a reculé. En France le salaire de début a augmenté de 2% dans le premier degré et reculé de 1.1% dans le second. La Belgique, la Grèce, le Luxembourg, le Portugal et la Norvège ont connu également de légères baisses . L’Italie, l’Espagne ou la Pologne des hausses très faibles.

Mais partout ailleurs en Europe, les salaires enseignants ont connu une hausse significative sur ces 5 années. En Angleterre elle n’a été que de 4%, en Allemagne de 4 à 9%. Partout ailleurs c’est beaucoup plus. Le record c’est la Roumanie avec 164% de hausse dans le 2d degré et 181% dans le premier. En Tchéquie, Lettonie, Lithuanie et en Bulgarie, la hausse est de 50%. Au Danemark, en Irlande, en Autriche, en Suède, elle va de 15 à 30%.

Alors que le gouvernement parle beaucoup de revalorisation et annonce vouloir y consacrer 400 millions il faut rappeler ce que représente cet effort présenté comme exceptionnel. Par rapport aux dépenses de personnel de l’éducation nationale (70 milliards) cela représente une hausse de 0.5%. Par rapport à la potentielle réforme des retraites c’est très insuffisant : il faudrait augmenter les salaires d’un tiers. Par rapport à nos voisins c’est lilliputien.

François Jarraud

Etude Eurydice