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Pour la seconde fois, Emmanuel Macron décrète la fermeture générale des écoles, collèges et lycées à partir de lundi prochain. Un an après la première fermeture, presque jour pour jour, cette décision signe l’échec des demi mesures prises depuis des mois par JM Blanquer. Sans changement de cap quel sera son impact durable ?

Fermeture pour un mois

« Oui, le virus circule dans les établissements scolaires. Mais pas plus qu’ailleurs », a dit Emmanuel Macron le 31 mars en présentant les nouvelles mesures de confinement. Une affirmation immédiatement démentie par le fait que le seul confinement total décidé par le président de la République concerne les écoles. « L’éducation de nos enfants, elle, n’est pas négociable. L’école n’est pas négociable. C’est pourquoi nous devons prendre nos responsabilités. Oui, il faut freiner le virus. Aussi, nous aller fermer durant trois semaines les crèches, les écoles, les collèges et les lycées », poursuit E Macron dans un racoirci où la logique se perd.

Le président de la République décide de fermer les crèches, écoles, collèges et lycées dès le 5 avril. La semaine du 5 au 12 avril les cours auront lieu à distance sauf pour les enfants de soignants qui seront accueillis dans les écoles. Du 12 au 25 avril toutes les zones seront en vacances scolaires. Mais sans possibilité de quitter la région ou de dépasser un rayon de 10 km. Le 26 avril les écoles du premier degré rouvriront en présentiel. Ce sera le cas pour le second degré le 3 mai. C’est donc une fermeture d’un mois pour le système éducatif avec deux semaines de distanciel dans le 2d degré.

Une décision qui s’impose

« C’est la solution la plus adaptée pour freiner le virus tout en préservant l’éducation et donc l’avenir de nos enfants », estime le président.

Cette décision devenait incontournable avec la montée des taux d’incidence. Contrairement à ce qu’E Macron a dit, le taux d’incidence des 10-19 ans est plus élevé que la moyenne nationale. Et ceux des jeunes d’âge scolaire augmentent nettement plus vite que le reste de la population.

Depuis la mise en place du nouveau protocole, le 27 mars, la règle de la fermeture dès le 1er cas de covid dans les 19 départements les plus touchés par l’épidémie a entrainé une inflation rapide des classes fermées. Dans l’académie de Versailles le Snes comptait 460 classes fermées, Créteil 751, Lille 206 pour le seul second degré. A Paris 850 classes du 1er degré sont fermées soit 249 de plus en 24 heures et près de 500 en 48 heures. A cela s’ajoutent e 24h 218 classes du 2d degré, selon la Mairie de Paris. Dans la journée du 31, la maire de Paris a demandé la fermeture des écoles.

Les raisons de la fermeture

L’apparition du variant anglais, qui domine maintenant l’épidémie, a totalement changé la donne. Beaucoup plus contagieux, plus mortel il s’attaque aux jeunes comme aux plus âges indifféremment. L’époque où les scolaires sont moins contaminés et contaminants est révolue et on savait depuis fin décembre que ce variant dominerait très rapidement le territoire national. Depuis le début de l’année on se trouve dans le cas classique des pandémies grippales, étudié en 2012 sous l’angle des fermetures d’école, par le Haut Conseil de Santé Publique.

Ce que montre l’étude c’est que les enfants sont bien des auxiliaires très actifs de la pandémie. « Les enfants jouent un rôle particulièrement important dans la transmission de la grippe ; ils sont plus réceptifs à l’infection que les adultes, sont responsables de plus de cas secondaires dans les foyers que les adultes, ont un portage viral plus important et prolongé, « maîtrisent » beaucoup moins leurs sécrétions respiratoires, et sont en contact étroit avec les autres enfants à l’école, favorisant ainsi les transmission », écrit le HCSP.

Est ce efficace ?

Fermer toutes les écoles est-il efficace ? Il y a d’autres réponses, la plus efficace étant la vaccination. Mais le gouvernement s’est avéré incapable d’obtenir les doses de vaccin nécessaires faisant de la France un des pays où le taux de vaccination est le plus faible.

Ce que dit le HCSP c’est que « l’impact de la fermeture des écoles ne concerne pas que les enfants d’âge scolaire : 66 % des cas évités sont hors du groupe d’âge scolaire (qui représente 20 % de la population) ». Fermer les écoles c’est diminuer le risque de propagation dans l’ensemble de la population.

Du moins si cette fermeture arrive au bon moment. Quand faut-il fermer les écoles ? Là dessus aucun modèle clair ne s’impose. Certaines fermetures n’ont eu aucun effet, comme celle de 1957 en France ou aux Etats-Unis en 2009. D’autres ont eu de grands effets positifs (Etats-Unis face à la grippe espagnole en 1917). Selon une étude américaine, « une fermeture avant que 1 % de la population ne soit atteinte serait optimale ». On est à ce niveau dans les 19 départements.

Quelle continuité pédagogique ?

Mais la fermeture pour être efficace doit être accompagnée. C’est là qu’intervient la « continuité pédagogique ». Si le ministre la présente comme une exigence éducative, elle a aussi son utilité sanitaire. Si les enfants ne sont pas occupés par des travaux scolaires ils vont se réunir et continuer à transmettre la maladie. Cela risque d’être le cas du 12 au 26 avril.

Mais l’Ecole est elle vraiment prête à assurer un enseignement à distance ? Les élèves sont ils tous capables de le recevoir ? Depuis mars 2020 seulement quelques milliers d’ordinateurs ont été distribués sans rapport avec les besoins d’une partie des élèves. L’institution n’a pas prévu de donner des accès Internet. Rares sont les établissements qui ont pu trouver le temps pour concevoir de véritables plans de continuité pédagogique et les faire découvrir aux élèves. Comme en mars 2020, presque partout on va recommencer à improviser en fonction des outils connus par chaque professeur en espérant qu’ils fonctionnent. Le repérage des élèves en difficulté n’ pas été fait partout loin de là. Ne parlons pas de la formation des enseignants au suivi à distance. Les enseignants n’ont même pas de consignes claires sur les finalités de la continuité. S’agit il de continuer à avancer dans le programme ? Ou de garder le lien avec les élèves ?

Tout le monde perd

Aussi ce 31 mars, avec la fermeture, tout le monde perd. D’abord les élèves qui se retrouvent dans une grande incertitude pour leurs enseignements. Ils le sont aussi pour les examens. Pourra t-on vraiment maintenir le bac et le brevet tels qu’ils sont prévus ? Les épreuves en présentiel pourront elles avoir lieu ? Les élèves seront ils préparés au Grand Oral ? Quand rattraperont ils l’épreuve d’E3C1 quand elle n’a pas eu lieu, puisque JM BLanquer s’est obstiné à la faire passer à ceux qui n’ont pu le faire l’année dernière ?

Les enseignants aussi se retrouvent dans l’incertitude. Une certaine presse a déjà commencé à les déclarer en vacances. En fait ils sont dans l’incertitude des outils et des objectifs qu’ils pourront utiliser. Ils doivent basculer dans un nouveau mode, avec moins d’inconnues qu’en 2020 mais avec uen réorganisation complète de leur travail et l’inquiétude de perdre des élèves.

Les parents sont bien sur affectés. A nouveau ils vont devoir accompagner de plus près le travail de leurs enfants, du moins pour ceux qui le peuvent. A nouveau on leur demande à la fois de télétravailler et de laisser leurs enfants suivre leurs cours à distance, une situation impossible. Et à nouveau ils n’ont que 2 jours pour trouver la solution.

L’échec de JML Blanquer

Le dernier perdant c’est le ministre. JM BLanquer a fait de l’ouverture des écoles un véritable dogme et le président de la République lui donne tort pour la seconde fois. C’est que la démonstration vient d’être faite que sa politique a échoué. POur maintenir le dogme de la faible circulation du virus dans les établissements, le ministre de l’éducation nationale a refusé toutes les mesures qui auraient pu en réalité réduire la pression épidémique. Cette semaine encore il a refusé la généralisation de demi groupes dans les collèges y compris dans les départements où le virus est très présent partout. Il a transformé la « demi jauge » décidée par J Castex dans les lycées en une demi mesure n’empêchant pas le brassage des élèves imposé par sa réforme des lycées. Il a même pris la mesure provocante de réouverture des gymnases. Rien de sérieux n’a été fait pour limiter vraiment les risques dans les cantines. Rien n’a été entrepris pour améliorer l’état sanitaire des établissements ou permettre une vraie aération. Les tests ont été lancés au compte gouttes à la différence de certains pays qui testent tous les élèves chaque semaine. Les élèves n’ont même pas eu droit à des masques gratuits et les professeurs doivent payer s’ils veulent être testés ! On a vu les résultats de cette politique dans les économies réalisées en 2020 par le ministère. Permettre de vrais demi groupes aurait pu être envisagé avec le recrutement d’enseignants. En fait l’Education nationale n’a rien anticipé en 2020 et pas plus en 2021.

Faut il croire en la vaccination des enseignants ?

 » Nous avons donc je le crois bien fait » s’est félicité E Macron le 31 mars. C en’est pas le cas pour l’Education nationale et ce n’est probablement pas plus vrai en général. Le président annonce une grande campagne de vaccination.  » Une stratégie de vaccination spécifique sera par ailleurs prévue pour toutes les professions les plus exposées, en particulier nos enseignants », a t-il déclaré. Il conviendrait que des précisions soient données rapidement sur ce point. Avec le nouveau variant des enseignants non vaccinés non seulement prennent beaucoup plus de risques qu’en 2020 mais ils peuvent aussi devenir des transmetteurs de la maladie , si contagieuse, dans toutes les classes où ils interviennent. Jusque là le gouvernement a perdu la course à la vaccination déjà vantée plusieurs fois.

François Jarraud

L’étude du HCSP

Peut on confiner sans fermer les écoles ?