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« La difficulté de la période c’est l’impression d’être ballotée au fil des événements ». Patricia Bonnard, professeure de français en collège, résume bien l’atmosphère de cette rentrée faite en classe, pour le premier degré, à distance dans le second degré. Partout il faut s’adapter aux urgences du jour, comme les classes sans professeurs dans les écoles, et partout tenter d’anticiper sur un avenir très incertain.

Des classes fermées dès le premier jour

Dès le premier jour de la rentrée ce sont plus de 200 classes sans enseignant en Seine Saint Denis, selon un sondage du Snuipp Fsu. « Il y a 860 écoles dans le département. Nous avons pointé plus de 200 enseignants non remplacés le jour de la rentrée », nous dit Corinne Marchand, co secrétaire départementale du Snuipp.

Emilie Garcia, directrice de l’école maternelle Jules Ferry d’Aulnays sous Bois, a du faire face dès lundi matin. Une enseignante a attrapé le covid est en arrêt pour la semaine. Cette absence prévisible n’est pas remplacée. « J’ai prévenu les parents la semaine dernière. Mais ce matin six élèves de petite section sont arrivés à l’école ». D’après les instructions ministérielles, les élèves ne doivent pas être répartis dans les autres classes, comme c’était le cas auparavant. Mais que faire de ces enfants ? « Par chance j’étais déchargée de cours ce lundi et j’ai pu garder les enfants et appeler les parents pour qu’ils viennent les reprendre ». Mais Emilie Garcia s’inquiète pour les jours à venir. Elle craint de ne pas avoir de remplaçant. Et les parents sont souvent dans des situations impossibles. « Je crains que les parents n’aient pas d’autre choix que d’amener les enfants à l’école ».

C’est l’occasion pour Corinne Marchand de rappeler que le rectorat a refusé d’embaucher les 100 reçus sur liste complémentaire en septembre. « On sait et on l’a dit dès septembre : il faut des sureffectifs enseignants pour faire face à la crise ». Non seulement le syndicat n’as pas été entendu mais l’académie de Créteil est spécialement visée par les réductions de postes mis aux concours dans le premier degré en 2021 : il y en aura 300 de moins qu’en 2020.

Un plaisir d’enseigner altéré

A Pontiacq Vieillepinte, dans les Pyrénées atlantiques, l’atmosphère est différente. « C’est une rentrée normale, comme en février », nous dit la directrice Laëtitia Vautrin. Les élèves ont pris l’habitude des masques , même si en CP c’est un frein à l’apprentissage de la lecture. « L’atmosphère est moins chaude que normalement mais les élèves sont contents de se retrouver », souligne L Vautrin. En zone rurale les enfants ont moins l’occasion de se rencontrer durant les vacances.

Ce qui pèse le plus c’est le fait de ne pas pouvoir faire l’école comme on voudrait. « On est en zone rurale et on ressent fortement le fait de ne plus pouvoir faire de sorties scolaires », nous confie L. Vautrin. « Il nous reste les twitt classes avec des projets d’écriture et des défis EPS avec d’autres classes là aussi par voie électronique ».

Eviter le bug du Cned…

Professeure de lettres au collège de Genas (69), Patricia Bonnard a des 3èmes et 4èmes, classes qui seront en mi jauge dans une semaine. Pour cette semaine, pour elle et tous les élèves du second degré, l’enseignement est à nouveau en distanciel. « J’ai évité le bug du Cned », nous dit-elle, « en postant la veille des vidéos sur youtube et le travail sur Pronote ». Elle communique avec les élèves via un tchat de classe sur l’ENT. Les élèves ont leur travail dès lundi pour la semaine. « Je leur demande de m’envoyer des photos du travail fait dans leur cahier. Cela évite que le travail se perde ».

Evidemment on ne peut pas faire ce qu’on ferait en classe. « En 4ème ils ont terminé une séquence sur l’émotion et doivent préparer une séquence sur l’oral basée sur l’étude d’un roman. Ils peuvent s’aider d’une vidéo qui est accessible sur leur téléphone ». En 3ème ils font des recherches sur le roman « 1984 ». « Je suis consciente que cette façon d etravailer ne convient que ponctuellement. Après il faudra des moments ensemble pour faire l’explication de texte. Celle ci nécessite leur interaction. Si je dois faire des classes virtuelles ce sera en demi groupe ». L’établissement est dans les 15 départements où s’impose la demi jauge. Mais prendra t-elle la forme de demi groupes ?

En Rep s’adapter à l’équipement des élèves

Au collège Rep Valéry de Valence, Nathalie Ingrassia , professeure d’anglais, n’a pas plus prévu de classe virtuelle. Les élèves de 5ème et 4ème ont du travail déposé à l’avance sur un site personnel. « J’utilise des jeux, Leanring Lab, un padlet. Il sont un plan de travail avec différents niveaux ».

Au collège Rep Anatole France de Sarcelles, Joris Parent, professeur d’histoire-géographie, n’envisage pas non plus de classe virtuelle. « Je ne suis pas équipé pour en faire et la majorité de mes élèves non plus », explique t-il. « C’est bien d’avoir une tablette. Mais ça ne veut pas dire qu’on a forcément la connexion et les outils pour que tous les enfants de la famille suivent une classe virtuelle ».

Joris Parent a donc préparé des jeux avec Genially. « J’y ai passé beaucoup de temps mais ça me fait plaisir. Les élèves font presque la même chose qu’en classe avec un soupçon de jeu en plus ». Ils doivent exploiter des documents pour réaliser une carte mentale ou un petit texte. « Ils choisissent le niveau de difficulté et sont plus ou moins aidés ».

A Sarcelles comme à Genas le souci à venir c’est la semaine prochaine. Comment sera appliquée la demi jauge ? Il faudra de toutes façons encore réorganiser son enseignement…

François Jarraud