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« Une fois de plus ce n’est pas ça qui va changer la donne dans la contamination ». « Cela ne va pas changer grand chose ». Guislaine David, secrétaire générale du Snuipp Fsu, nous dit la même chose que Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen Cfdt. Une directrice et un directeur, interrogés par le Café pédagogique, sont plus alarmants : « Ce n’est pas à la hauteur de la contamination ».

« On n’attendait pas grand chose »

Pour Anna (1), qui dirige une grosse maternelle dans la Vienne, les décisions gouvernementales ne tiennent pas compte de la réalité. « Cela ne va pas changer grand chose », nous dit-elle. « On reste avec des questions non résolues. Par exemple j’ai un seul dortoir pour 2 classes de petite section : je ne peux pas éviter le brassage. Ou alors comment je fais ? Je mets les enfants ensemble ou j’en renvoie la moitié chez eux ? Le protocole actuel n’est pas à la hauteur de la contamination actuelle dans les écoles. C’est une réponse pour donner l’impression que quelque chose est fait. Mais dans deux semaines le taux de contamination sera énorme. Or si peu d’enfants ont des formes graves certains en ont. Et leur contamination a une incidence sur les familles ».

Anna souligne le caractère irréaliste du protocole actuel. « Pour les petits de maternelle le test PCR est très agressif. Or très peu de laboratoires font des tests salivaires. La logistique ne suit pas les consignes ministérielles. On est face à des paroles en l’air ». Pour elle, « on aurait pu faire comme au printemps dernier et éviter une semaine de plus de contamination ».

Youssef dirige une école élémentaire Rep+ en Seine Saint-Denis. Depuis la Toussaint deux classes ont déjà fermé à cause de l’épidémie. « Au niveau 2 ou au niveau 3, pour nous cela ne change rien. La mairie s’était déjà organisée pour ne pas brasser les élèves ». Ce qui ne change pas c’est aussi le travail. « En fait les enseignants préparent aussi du travail pour les élèves absents. Il faut du présentiel et du distanciel. Le directeur passe sa journée à gérer les tests, à chercher à savoir pourquoi tel élève est absent. On avait déjà peu de place pour la pédagogie mais avec le protocole actuel il faut faire la police avec les parents ». Pour lui, « fermer une semaine plus tôt aurait pu être une solution pour pouvoir passer des fêtes sereines avec les parents et grands parents ». Youssef se dit résigné. « on n’attendait pas grand chose. On s’adapte ».

Déraisonnable

« Dans le premier degré, le passage au niveau 3 a peu d’effets si ce n’est la limitation du brassage pendant les récréations et le port du masque en extérieur, déjà imposés à de nombreux endroits par les préfets », nous dit Gusilaine David, secrétaire générale du Snuipp Fsu. « C’est chez les 6-10 ans qu’on a le taux d’incidence le plus élevé , au delà de 1000 dans certains départements, et on continue avec un protocole allégé ».

« Le temps d’incubation dure plusieurs jours. On a donc en classe des élèves négatifs qui deviennent positifs et cela favorise la contamination. C’est une aberration quand on voit la puissance de la vague dans les écoles de continuer pendant deux semaine à augmenter les taux d’incidence. C’est déraisonnable. Les écoles sont débordées par les cas à signaler aux parents, les documents à controler, le distanciel qui est fait par de nombreux enseignants. On a écrit au ministère qui n’a pas répondu. On demande aux enseignants de saisir les CHSCT ».

Pour le Snuipp Fsu, les mesures gouvernementales sont « politiques et économiques et non sanitaires. Ces choix ont des conséquences sur la contamination des enfants mais aussi des familles. Il est temps de changer de discours ». Le Snuipp a demandé le retour à la règle de la fermeture dès le 1er cas de covid.

« Il faudrait des dépenses »

« Ca ne va pas changer grand chose », nous dit Catherine Nave Bekhti, secrétaire générale du Sgen Cfdt. Son syndicat a déposé une motion invitant l’Etat à investir dans l’équipement des classes en compteurs de Co2 et purificateurs et à distribuer des masques FFP2 aux enseignants. « On demande la fermeture des classes dès le 1er cas de covid. La gestion actuelle entraine une surcharge de travail pour les directeurs et aussi les professeurs qui passent leur temps à recomposer leur enseignement avec le roulement des élèves ». Le Sgen Cfdt attire aussi l’attention sur les élèves qui ont été plusieurs fois cas contacts dans l’année. « On les met sous pression. ils ne sont pas pris en compte ».

Pour C Nave-Bekhti « pour faire vraiment fonctionner l’école il faudrait des dépenses et accepter des adaptations. Il y a un refus d’adapter le système éducatif dans son bâti et son organisation à une pandémie qui dure ».

Propos recueillis par François Jarraud

(1) pseudonyme, les directeurs témoignant sous anonymat