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« Il est problématique de traiter de la discrimination scolaire spécifiquement à propos du segment singulier qu’est le lycée professionnel (LP). Car s’il concentre à l’évidence des populations d’origine populaire et d’ascendance migratoire, la dynamique de ce segment est en partie le produit de la discrimination, non le lieu premier de sa production. Cela n’empêche que la discrimination organise aussi l’espace du LP », écrit Fabrice Dhume dans le numéro 23 de Carnets rouges dédié au lycée professionnel. « L’orientation scolaire scelle des hiérarchisations socio-ethno-genrées construites tout au long de la scolarité, et les reformule entre autres dans la distribution entre voies générale et professionnelle. Pour la génération entrée en 6ème en 2007, on observe par exemple que « les trois quarts des garçons descendants d’Afrique subsaharienne sont scolarisés dans les filières professionnelles ainsi que plus de la moitié des descendants d’immigrés turcs et portugais ». Bien entendu, la classe sociale joue un rôle déterminant dans la construction de ce statut scolaire, une grande majorité de familles concernées relevant du prolétariat ; néanmoins, à même origine sociale les garçons descendants d’Afrique subsaharienne s’avèrent nettement sur-orientés en filière professionnelle ». Mais la discrimination existe aussi en interne en lien avec l’originalité des LP. « L’enquête de l’IGEN susmentionnée estimait qu’entre 30 % et 50 % des jeunes « issus de l’immigration » subissaient de la discrimination dans l’accès à un stage. Loin d’être du seul fait des employeurs, cela relève d’un processus de coproduction entre l’école et l’entreprise. Ainsi, face à une demande discriminatoire du patron ― et compte-tenu de la charge de travail, d’injonctions paradoxales, de priorité au placement des élèves, de stratégies de préservation de carnets d’adresse, etc. ―, les enseignant.es peuvent entériner voire anticiper la discrimination ».

Dans Carnets rouges n°23