Comment rendre plus concret l’étude d’un écosystème ? Céline Hascher, professeure en Segpa et Simon Alonso, professeur de SVT au collège Le Colombier de Dun-sur-Auron (18) emmènent leurs élèves dans les marais. Au programme : analyse du sol, plantation de saules, récolte de l’osier et atelier vannerie pour concevoir des mangeoires à oiseaux. « La préservation de l’environnement dans ses ressources et ses usages » est au cœur du projet des enseignants qui sont aussi référents EDD (éducation au développement durable) au collège.
Quel est cet appel à projet auquel vous avez répondu ?
Il s’agissait d’un appel à projet du CD18 : « Les collégiens agissent pour les Espaces naturels sensibles » Notre collège était pilote pour cette première. Mon collègue Simon Alonso, professeur de SVT, et moi-même avons souhaité nous lancer et notre projet a été validé.
Quelles sont les plantations effectuées par les élèves dans le marais ?
Les élèves ont effectué des plantations de saules mardi 28 mars sur 750m de long de chaque côté du chemin à raison d’une bouture tous les 6m.
Comment allez-vous proposer de la vannerie aux collégiens ?
Les élèves ont fait une première découverte de la vannerie avec un vannier corrézien. Les élèves de 6è et 5è Segpa ainsi que les élèves volontaires éco-délégués ont fabriqué une mangeoire à oiseaux au cours d’une journée d’initiation.
Dans les années à venir nous allons poursuivre en proposant l’activité sous forme d’un club certainement. La vannerie demande patience, minutie, régularité et un peu de force dans les doigts !
Comment intégrez-vous ces sorties terrains dans vos cours de SVT ?
Nous avons comme partenaire le CPIE Brenne Berry. Une animatrice du CPIE est intervenue au collège pour expliquer ce qu’est un marais, quels sont les enjeux au Marais de Contres. En classe, nous retravaillons ensuite sur l’écosystème « marais » et faisons le lien avec les besoins des plantes, les plantes adaptées ou non au marais.
Par exemple, lors des analyses sur le terrain, les élèves testent le pH du sol. Les élèves apprennent à utiliser une clé de détermination pour reconnaître les variétés.
Dans les semaines qui suivent la plantation nous effectuons
– un suivi météorologique
– un suivi des boutures (évolution, croissance de chaque variété, adaptation au milieu)
A la rentrée prochaine nous poursuivons le projet et le suivi de la plantation puisque l’idée est de récolter (fin novembre) et d’utiliser l’osier en vannerie et pourquoi pas vendre nos productions sur le marché de Noël. Nous savons que cette année l’osier ne sera probablement pas encore exploitable mais nous espérons pouvoir l’utiliser tout de même en attendant que la plantation soit optimale (d’ici 3 ou 4 ans).
Et en maths ?
En maths cela me permet de proposer des problèmes concrets en rapport avec le projet, avec des données probables puis des données réelles.
Ce sont les mêmes « problèmes » qu’ils rencontreront plus tard s’ils sont paysagistes ou même dans un jardin personnel.
Par exemple, si l’on plante 1 bouture de saule tous les 6 mètres sur 750m combien cela fait-il de boutures ? Les boutures sont plantées de chaque côté du chemin, combien cela fait-il de boutures en tout ? On peut changer les variables en simplifiant si certains élèves en ont besoin pour mieux comprendre.
Ou encore « nous avons 5 variétés de saule à planter. Chaque variété est plantée dans les mêmes quantités. Quelle fraction représente chaque variété ? ». On peut également travailler sur les échelles pour réaliser le plan des plantations, sur la symétrie…
En quoi ce projet donne du sens autour de la biodiversité ?
Pour une même espèce, le saule, les élèves prennent conscience qu’il existe différentes variétés et que toutes ne vont pas réagir de la même façon au milieu et aux contraintes météorologiques. Toutes les variétés ne sont pas non plus adaptées à la vannerie, il a fallu effectuer quelques recherches et prendre des conseils auprès d’un professionnel. Sachant qu’il existe plus d’une centaine de variétés de saule !
Notre idée était de faire une plantation qui fasse sens pour les élèves et qui soit pérenne. Le choix du saule est venu en partie de la suggestion du Conservatoire des Espaces Naturels, qui est gestionnaire de l’ENS, et nous permet de créer du lien entre l’environnement, une culture, les activités humaines, la mise en valeur d’un matériau cultivé.
L’endroit de la plantation est un chemin sur lequel de nombreux promeneurs viennent et où des peupliers ont été abattus par la mairie pour des raisons de sécurité. Pour les élèves replanter cette partie permet de valoriser directement leur travail en apportant une embellie sur un lieu de promenade proche de chez eux, mieux comprendre l’environnement proche et pour beaucoup de le découvrir. Nous espérons qu’ils y reviendront avec leurs familles.
Ce projet permet de planter de l’osier et de renouer avec une tradition vannière que peu connaissent, fabriquer des objets avec un matériau que l’on a planté et vu grandir puis récolté, trié. Nous espérons montrer aux élèves le sens que la préservation de l’environnement a, par la préservation de ses ressources et l’intérêt que cela a pour l’Homme dans ses besoins et ses usages.
Propos recueillis par Julien Cabioch
Dans le Café
Dominique Thézard : La pédagogie des marais