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P Picard

Marie Choquet, épidémiologiste à l’INSERM

La santé, ce n’est pas la maladie…

C’est au centre du bon épanouissement du sujet. Il n’y a pas deux catégories (bonne santé ou mauvaise santé), mais des degrés variables selon les individus.
Nous avons une approche psychosociale, multifactorielle, relationnelle.. Je n’aime pas trop l’idée de  » conduites à risques » qui sont souvent une vision masculine (prise de substances, violence, fugues…), et ne prend que peu en compte le mal-être du corps, les dépressions ou les troubles de conduites alimentaires, les tentatives de suicides qui sont plutôt des attitudes féminines. Le taux de dépression a été multiplié par 3 en 5 ans, et personne n’en parle, c’est un scandale. La mixité est pour moi celle du sexe : les garçons ou les filles qui adoptent des troubles de l’autre sexe sont souvent ceux qui sont en plus grand danger. Et l’âge tend à augmenter les problèmes : à 15 ans, on recense deux fois plus d’enfants en danger qu’à 14, et la moitié qu’à 16…

Les troubles que nous étudions sont peu corrélés au niveau social de la population. L’apparition des troubles survient lorsque les relations entre parents et enfants sont mauvaises, et ça existe dans tous les milieux.

La prévention ?

Mais prévenir le début n’est pas prévenir le plus grave. La prévention doit jouer sur la globalité de l’individu, et en même temps être ciblée. C’est ce qui en fait la difficulté : orienter, accompagner, mettre en liaison.

La prévention des troubles psychosociaux graves passe un travail sur les pathologies familiales graves. Les comportements déviants n’arrivent pas comme un cheveu sur la soupe : ces familles ont besoin d’accompagnement lourd, et il nous faut repenser la façon dont on traite la question. Placer un enfant victime d’inceste ou de violences dans une institution pour enfants, n’est-ce pas lui infliger une double peine, en ne lui permettant aucune reconstruction de son image personnelle et de son intimité ? Que fait-on pour accompagner les jeunes lorsque ses parents divorcent ? On soigne beaucoup mieux les blessures physiques que les blessures psychologiques, alors que ce sont pourtant celles qui laissent le plus de traces…

Mais la première santé mentale dont il faut s’occuper, c’est celle des enseignants… Je suis sûre que si les enseignants étaient mieux dans leur tête. Si on s’occupait mieux des enseignants, les choses iraient déjà mieux pour les élèves…